Chapitre 8

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Depuis que j'avais éconduit Jasper au Palacio au début de la semaine, le regard que Jonathan posait sur moi avait changé, et ce n'était pas fait pour me plaire. Il me toisait avec un mépris à peine dissimulé et je me retenais depuis plusieurs jours de lui envoyer mon poing en plein dans son sale petit sourire.

Il y avait deux raisons pour lesquelles je ne m'étais pas encore exécutée. La première concernait Anthony. Si Jonathan démissionnait ou invoquait une quelconque raison de refuser le poste que mon père lui avait confié, Anthony en souffrirait forcément. La seconde raison était plus terre à terre : je ne savais pas frapper, et si je tentais d'agresser physiquement un homme dont le métier était littéralement d'être prêt à se battre, c'était moi qui allais y laisser des dents.

J'avais donc enfoui mes velléités de violence au plus profond de moi et m'étais contentée de lui fausser compagnie toute la semaine. Avec Anthony c'était presque devenu mission impossible, il me connaissait trop bien. Mais Jonathan ne cherchait même pas à me connaitre. C'était trop facile.

Je m'étais échappée du bureau tous les midis pour aller faire du shopping, déjeuner dans mes endroits préférés, et encore faire plus de shopping. Ma carte bleue avait encore du mal à s'en remettre, mais à ce stade, c'était thérapeutique.

Cependant, durant tout ce temps je continuais de me sentir suivie et observée et je supposai qu'il s'agissait de l'homme de l'ombre que je n'avais toujours pas pu identifier. Jonathan était-il au courant de son existence ? De son identité ? Oui. Il l'était forcément, c'était son collègue au même titre qu'il avait été celui d'Anthony.

Au fond peu m'importait, j'avais seulement besoin de cette impression de liberté, même si elle était contrôlée.

La seule habitude que j'étais parvenue à tordre était celle de faire le mur. Je n'étais plus sortie du manoir la nuit, je ne tenais pas à revivre les événements récents et il faudrait un peu de temps pour que le scandale se dissipe.

De toute façon je n'étais pas vraiment d'humeur à faire la fête ce qui n'était pas plus mal car, comme toujours, mon très cher père s'était arrangé pour que j'aie une montagne de travail.

J'avais beau soupirer et m'envoyer des litres de café, je ne parvenais ni à me concentrer, ni à trouver la motivation de le faire. D'agacement, je balançai mon stylo sur mon bureau ce qui eut pour effet de bousiller la mine, éclaboussant mon sous-main en cuir d'encre bleue.

– Et merde ! pestai-je.

J'arrachai une poignée de mouchoirs du dévidoir qui se trouvait dans le tiroir de mon bureau et m'empressai de tamponner la tâche qui s'étendait à vue d'œil. C'était peine perdue, malgré tous mes efforts le cuir avait déjà bu la plupart du liquide poisseux et je ne faisais qu'étaler le reste avec mes maudits mouchoirs.

Soudain, un bruit sourd provenant du couloir m'interrompit dans mon geste. Je relevai brusquement la tête vers la porte de mon bureau, que je maintenais toujours fermée. Il était tard et la quasi-totalité des employés de l'entreprise était déjà en week-end.

Même si ça me faisait mal d'en arriver là, je décidai tout de même d'envoyer un SMS à Jonathan pour lui demander de monter. Je reposai ensuite mon téléphone sur mon bureau et inspirai un bon coup.

J'étais vraiment parano, à tous les coups j'avais entendu une porte claquer à cause d'un courant d'air provoqué par un employé négligent qui avait laissé sa fenêtre ouverte. Alors je carrai les épaules et repris mon téléphone pour écrire à Jonathan qu'il s'agissait d'une fausse alerte. Non seulement je n'avais pas envie de le voir, mais en prime je savais qu'il me détestait et je ne voulais pas lui donner une occasion de plus de médire à mon sujet auprès de mes parents.

Brand New Dawn - WilderOù les histoires vivent. Découvrez maintenant