Acte IV - Scène 4

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« Il n'y a pas de résolution sans dissonance »

« Ton Maître t'as trahis, Maître Zed, maugréai-je. Maître Kusho a l'intention de libérer Jhin. Un groupe de guerriers s'apprête à quitter le col sud au levé du jour. »

Zed demeura impassible dans mon dos.

« Le pire, frissonnai-je, c'est qu'il m'a demandé de me joindre à eux... Je sais que je devrais prévenir mes supérieurs... Peut-être même que c'est un piège... Je suis perdue... que dois-je faire ? »

Je soufflai.

« Ah mais évidemment, grinçai-je. Évidemment, tu n'as rien à dire toi... »

Je me retournai vivement vers lui et ma rage fit fondre mon poing dans sa figure.

« Parce que tu n'es pas là ! »

Mon coup perça l'effigie de Zed et les ombres de son leurre se dispersèrent dans la pénombre du dortoir. Je reculai d'un pas et me laissai tomber sur le rebord de mon lit. Je fermai les yeux, les couvris de mes paumes glaciales dans l'espoir de voir jaillir une illumination. Mais à l'inverse, mon esprit agité tordait mon corps, je me tortillai sous la discordance qui me fragmentait de l'intérieur. Quelle torture ! Plus que jamais, je me consumai dans les flammes de deux passions opposées dont la coexistence s'apprêtait à m'exploser au visage.

Je rouvris les yeux sur mes deux bras, les détaillai successivement. A droite flamboyaient de lueurs dorées les élégantes gravures à fleur de cuivre. A gauche les ténèbres pigmentaient mon épiderme d'une allégeance aveugle. Comment avais-je pu en arriver là ?

« Zed... couinai-je. J'ai besoin de toi... et tu es parti... Plus que jamais, j'ai besoin que tu me rattrapes... mais tu m'as déjà... lâchée. »

Le désarroi troubla ma vision. Déchirée entre l'envie irrépressible de hurler ma peine et celle de l'étouffer, je m'allongeai dans le lit, me recroquevillai, me retournai encore et encore.

Encore et encore.

Dans un élan de colère, j'agrippai mon oreiller pour l'envoyer valdinguer à l'autre bout de la pièce. Dans sa course, il emporta et brisa au sol une fiole de verre. Je me redressai. Enferrée dans le déni de l'absence de mes camarades, je m'attendais à ce qu'on me fasse remarquer ma maladresse. Mais le silence qui baigna l'espace se fit l'écho d'un vide absolu : j'étais seule.

Je me levai d'un bond et ouvris un petit meuble pour en extirper mon précieux sac à dos en cuir. J'en tirai le masque de Jhin. Du bout des doigts, je caressai lentement ses reliefs et redessinai ses contours. Son sourire raviva doucement mon cœur et démêla les liens de mes pensées, les laissant s'exprimer sans entraves. Ma plus profonde aspiration ruissela sur mon esprit, plus limpide que jamais : le désir tant refoulé d'une fin parfaite s'imposa spontanément. Libérer Jhin m'accorderait son pardon et je pourrais une dernière fois admirer la pureté de son art façonner mon propre corps dans l'apothéose qui scellerait mon sort.

L'ivresse me tira un sourire. Je rangeai le masque dans le sac et le refermai consciencieusement.

Mon âme s'était apaisée.

Ma décision était prise.


***

L'aurore s'apprêtait à barioler la toile du ciel alors que je chevauchai jusqu'au point de rendez-vous. A chaque foulée, les enrênements tintaient et mes sacoches frictionnaient le cuir de la sellerie.

Un petit groupe d'individus tapis dans l'ombre de larges arbres dénudés se détachèrent du paysage. J'en dénombrai quatre. Quatre seulement. Attendaient-ils des renforts ou disposaient-ils d'une force démesurée ?

Ôde au Chaos [ Zed & Jhin • League of Legends fanfiction ] (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant