Takotsubo

𝓒𝓱𝓪𝓹𝓲𝓽𝓻𝓮 22 ✔️

PDV : Bart

Elle était là, juste en face de moi, souriant largement devant l'échiquier. Je devinais facilement à sa mine victorieuse qu'elle n'avait plus que quelques coups avant de me mettre échec et mat. Mais à cet instant précis, je n'en avais que faire du jeu. Mes yeux étaient captivés par la courbe de ses lèvres, ce sourire angélique qui me faisait littéralement perdre mes moyens. Bon sang, qu'elle était belle, surtout maintenant que ses yeux pétillaient de joie. Quand je l'ai rencontrée pour la première fois, j'étais non seulement en mauvaise posture, mais aussi complètement démuni. Son visage, au départ empreint de tristesse, avait retrouvé une lumière que je ne pouvais m'empêcher de vouloir préserver. Comme si son corps errait alors que son âme avait enfin trouvé un refuge. Elle ne s'en rendait pas vraiment compte, mais elle avait désespérément besoin d'aide, et elle comptait sur moi. Depuis ce jour, tout ce à quoi je pensais, c'était la faire sourire comme aujourd'hui.

C'était une petite victoire, mais un grand pas vers une vie plus sereine. Pourtant, je devais arrêter de m'attacher à l'idée de la rendre heureuse. Cela devenait une obsession qui pourrait me nuire. La sauver n'était absolument pas dans mes plans. La voir régulièrement non plus. Mais lorsque Nelly m'avait révélé son histoire, j'avais senti un nœud se former dans ma gorge en entendant le nom de ce salaud. Mon sang bouillonnait, prêt à retrouver cet ordure qui lui avait fait tant de mal. C'était là le plus difficile : me contenir, paraître impassible pour ne pas me lancer dans une chasse à l'homme. Nelly était si pure ; rares étaient ceux qui voyaient le monde tel qu'il était vraiment, nocif. Rien ne semblait l'étonner, mais elle continuait pourtant à étonner le monde par sa force. Voilà où résidait sa véritable beauté.

-Tu joues ? m'interrompit-elle en agitant sa main devant mes yeux.

Je déplaçai mon pion machinalement, réalisant à peine ce que je faisais. Au fond, la véritable victoire serait de la laisser gagner encore une fois et de la voir sourire. Elle fit une moue boudeuse avant de reprendre :

- Tu l'as fait exprès ?

- Quoi donc ? feignis-je l'innocence. Tu as gagné ?

- Eh oui ! Échec et mat ! rit-elle, son rire doux résonnant dans mes oreilles. Qui ne voudrait pas voir cette fille rayonner ? Comment ce salaud pouvait-il dormir paisiblement en ayant détruit cette lumière chez elle ?

- je vais nager un peu ! Rejoins-moi ! lança-t-elle en se levant, laissant quelques grains de sable tomber sur l'échiquier avant de se diriger vers la mer.

Si je n'étais pas son maudit psy, si je ne devais pas maintenir mes distances avec elle, je lui aurais dit à quel point ce bikini mauve la rendait incroyablement sexy. Son dos nu, les contours de sa poitrine maintenus par une simple ficelle nouée dans son dos... Maintenant je devais attendre un peu avant de me relever, l'inconvénient d'être un homme. Je jetai un coup d'œil autour de moi et surpris deux mecs qui la dévisageaient ouvertement. J'avais presque envie de leur mettre mon poing dans la gueule pour qu'ils détournent le regard. "Une part de moi veut être le seul," chuchota ma conscience.

Mais je n'en avais pas ce droit, et il devenait de plus en plus difficile pour moi de résister. La meilleure solution serait probablement de mettre fin rapidement à nos séances. Je serrai les mains que j'avais enfouies dans le sable, attendant que mon caleçon retrouve sa forme originale.

Je l'aperçus au loin, plongeant dans la mer. Lorsqu'elle ressortit de l'eau, elle ressemblait à une véritable sirène. Sa silhouette délicate, ses longs cheveux bruns qui ondulaient légèrement sous l'effet de l'eau, et ses yeux marron étincelants sous le soleil... Elle était magnifique, et mon cœur ne pouvait s'empêcher de battre un peu plus vite en la voyant ainsi. Je me remémorai ce qu'elle m'avait dit à propos de nager souvent avec sa sœur quand elle était jeune. Je devrais peut-être lui demander si elle avait pris des nouvelles depuis. Recréer des liens était l'un des principaux objectifs de nos consultations. Quelques minutes plus tard, je me redressai enfin pour la rejoindre dans l'eau. L'eau n'était pas très chaude, et il y avait étrangement peu de monde sur la plage ce jour-là.