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Depuis plusieurs jours, Goulven était perturbé. Il n'était plus à l'aise dans sa chambre, étant d'habitude son havre de paix, sa tanière. Il avait l'impression qu'il y flottait quelque chose, comme si un intrus y était dissimulé.

Assis sur son lit, encore sous ses couvertures, il cherchait en vain l'origine de son malaise. Lassé de chercher à comprendre, il se redressa. Il allait bientôt être l'heure de rejoindre sa famille.

Il soupira. Ce mystère n'était pas celui qui lui causait le plus de soucis. Voilà près d'une semaine qu'il rangeait scrupuleusement chaque recoin de sa chambre.

"C'est moche comme ça. C'est pas comme ça que tu trouveras d'autres indications".

Il avait tout de suite compris où son grand-père voulait en venir. Il lui répétait sans cesse lorsqu'il était petit : "C'est moche comme ça. C'est pas comme ça que tu trouveras tes affaires". C'était une manière de lui conseiller de ranger, ce qui n'a jamais vraiment fonctionné. Cette fois-ci, c'était un message pour lui dire qu'il avait dissimulé d'autres mots dans sa chambre. Mais malgré le travail méticuleux qu'il avait effectué, il ne trouvait rien. Il eut le temps d'un instant, honte de réaliser que, puisqu'il n'était jamais tombé par hasard sur cette autre lettre, cela signifiait que certains objets n'avaient pas été rangés depuis des années ; mais seulement un instant. L'inquiétude de ne pas trouver ce message, additionnée au malaise ambiant dans son havre de paix, le préoccupait trop pour laisser la place à la honte de s'installer. Il sourit en pensant à sa mère. Elle était si heureuse qu'il "se soit enfin décidé à faire du tri une bonne fois pour toutes". Si elle savait…

Goulven soupira une énième fois, avant de se lever. Il ne lui restait que LE tas à ranger. Ce tas de bazar, où une fois que les objets y atterrissaient, ils ne repartaient jamais. Ce tas qu'il n'osait toucher par peur de l'ampleur de la tâche. Mais s'il fallait en passer par là, il le ferait. Il espérait seulement qu'il y trouverait l'objet de ses inquiétudes.

Il enfila à la hâte des vêtements qui étaient roulés en boule dans un coin de la pièce, et s'apprêtait à rejoindre sa famille. C'est à ce moment qu'un détaille l'interpella. L'un de ses précieux souvenirs n'était pas tout à fait à sa place. Goulven était tout aussi tatillon sur le rangement de sa collection d'objets liés à des moments de sa vie ; qu'il était désordonné sur tout le reste. Et la sculpture en bois que lui avait offert son grand-père, représentant une martre, n'était pas dans la même position que d'habitude. En observant attentivement, ce n'était pas la seule anomalie. Le livre renard ayant retrouvé sa place dans l'étagère après que la lettre y ait été découverte, était, lui aussi à l'envers. Plus il observait, plus Goulven découvrait une multitude de petites anomalies. Ses multiples trésors d'enfants, tous conservés religieusement, étaient pour la plupart déplacés. Quelqu'un était venu dans sa chambre et avait fouillé La poussière n'était pas faite. Ce n'était donc pas sa mère qui était venue la faire comme c'était déjà arrivé. Pourtant, rien ne semblait avoir disparu. Au moins, il savait maintenant pourquoi il ne se sentait pas à l'aise. Il n'aurait besoin que de quelques minutes le soir venu pour tout remettre en ordre. Du moins pour remettre en ordre ses souvenirs, pour le tas, ce serait plus long.
Cette fois, il sortit pour de bon de sa chambre.

Quelque temps plus tard, après un petit déjeuner frugal, l'adolescent était dehors, et terminait son installation destinée à arroser les plantations. Il actionna le bras amovible, et les hélices se mirent à tourner, faisant remonter l'eau. Celle-ci se mit à ruisseler le long des bambous, jusqu'à l'embranchement où le filet d'eau se divisa en plusieurs, afin d'irriguer le jardin en différents points.

— C'est génial ton truc mon grand ! T'as encore fait du super boulot.
— Ouais, enfin, on est en automne, on va pas arroser d'un moment. Donc bonjour l'utilité.
— Joanh ! se fâcha Lenaïc. En plus il a deux ans ça a pas plus de l'hiver et on a eu un pic de chaleur. On a dû arroser.
— C'est ça ouais. J'aimerais bien voir à quoi ça va servir quand on aura une nouvelle sécheresse, et que la rivière sera à sec, marmonna-t-il de manière à ne pas être entendu.

Goulven se gratta le bras. Son frère l'embarrassait. Malgré tout, il était heureux que son père valorise sa dernière invention.

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Mya rentrait de sa visite journalière des pièges avec Goulven. Ils n'avaient rien piégé. Elle savait qu'elle subirait le mécontentement de son père en rentrant. Mais tant pis, elle baisserait la tête en attendant que l'orage passe. De toute façon, elle avait l'habitude, et les reproches glissaient à présent sur elle. Pour rien au monde, elle ne partagerait les quelques fruits secs qu'elle avait récoltés avec son géniteur. Nol en avait besoin pour se nourrir, et elle pour prendre des forces afin de repartir le lendemain. Elle n'aurait qu'à déposer ses provisions sur sa fenêtre pour les récupérer de l'intérieur, et à rentrer ensuite par la porte principale. Il ne verrait rien. Comme chaque fois. Elle repensa à l'idée dont Goulven lui avait fait part. Durant leur tournée quotidienne, il avait proposé de lui créer un arc pour maximiser leurs chances de ramener des proies. Elle avait tout de suite été enthousiaste, elle l'était toujours devant une opportunité de ramener plus de nourriture. Et l'idée de tirer à l'arc l'enthousiasmait beaucoup.

Elle repensa également à son attitude. À plusieurs reprises, elle avait eut l'impression qu'il voulait lui dire quelque chose. Pourtant, il n'avait rien dit. Rien qui soit à même de le faire hésiter avant de parler. Peut-être en parlerait-il plus tard. À moins qu’elle ne se soit faite des idées.

Elle s'apprêtait à prendre le petit sentier pour arriver chez elle quand elle entendit des sanglots étouffés. Intriguée, elle se dirigea vers l'origine des bruits. En poussant une fougère, elle découvrit Nol, couvert de sang, qui pleurait à chaudes larmes.


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Coucou les gens, j'espère que ce chapitre, assez court, vous a plu !

Désolée de vous laisser sur cette fin. 🫣 (ou pas 😈)

Je sais pas chez vous, mais ici la température ont grimpée d'un coup, et tout est en fleur, ça sent le printemps.🌸🌱🏵🐞

La semaine prochaine, ce sera deux petits chapitres spéciaux à la suite.

Comme dab, lâchez moi un ⭐️ et 💬 si l'histoire vous plaît. Merciii !! 🤗

Castelizia.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant