Chapitre 13.

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Goulven était totalement désemparé. Son amie devant lui était gravement blessée. Sa jambe était tellement en sang, qu'il était difficile de voir l'étendue des dégâts. Si elle voulait que ses blessures guérissent, elle ne devrait pas marcher durant un long moment. Mais il serait dur d'empêcher une telle tête de mule de se déplacer.

— Comment t'as fait pour monter là-haut dans cet état-là ?

Mya se contenta de hausser les épaules. Elle n'avait pas l'habitude de se plaindre. Quand la survie d'un proche dépend de nous, on ne se pose pas la question de pouvoir ou non s'acquitter de ses tâches. On les fait, c'est tout. Actuellement, elle était bien plus embêtée que Goulven ait découvert ses blessures, que par les blessures en elles-mêmes. Pourtant, elle commençait à ressentir des engourdissements qu'elle ne parvenait pas à s'expliquer. Avait-elle perdu autant de sang ? Surtout, elle ne devait pas le montrer à Goulven, qui en ferait encore des tas.

— Tu ne vas pas pouvoir marcher comme ça, expliqua Goulven d'un air grave en fixant Mya de ses yeux bleus. Tu t'appuies sur moi pour sortir d'ici, et ensuite je te porte à la maison.
— C'est bon je–
— C'était une affirmation.

Et bein voilà.

Mya pesta. Elle détestait cette situation. Elle lui donnait l'impression d'être diminuée, ce qu'elle exécrait.

La sortie du bâtiment fut difficile. Mya étant de taille bien inférieure à celle de Goulven, ce qui impliquait qu'il se penche considérablement pour qu'il puisse passer un bras sous les épaules de son amie, et ainsi la soutenir. Une fois la périlleuse descente effectuée, Goulven se pencha et souleva Mya, la maintenant sous les jambes et les épaules, celle-ci passant un bras autour de son cou pour ne pas glisser. L'adolescent ployait sous le poids de Mya, pourtant très légère pour son âge.

— Je peux marcher. T'es plié en deux. On dirait un peuplier un jour de vent. T'y arrivera pas. C'est totalement ridicule.

Goulven ne répondit pas, il réfléchissait. Il doutait de pouvoir supporter son poids si longtemps. Il était loin de chez lui, trop loin. Il hésitait encore entre lui donner raison, et insister, lorsque la tête de Mya partit violemment en arrière. Elle venait de perdre connaissance.

En panique, Goulven sentait l'angoisse le submerger dangereusement. Son amie était sans connaissance, en train de se vider de son sang, et sa vie ne dépendait que de sa capacité à gérer la situation. Une larme roula sur sa joue, et il dut puiser au plus profond de lui-même pour ne pas perdre son sang-froid.

Il se ressaisit, et commença à avancer un pas après l'autre. Peu à peu, l'adrénaline prenait le dessus sur sa peur, et décuplait ses forces, lui permettant d'accélérer toujours plus. Il avait espéré croiser quelqu'un, n'importe qui, pour peu qu'il puisse l'aider à ramener son amie saine et sauve, malheureusement il n'y avait pas âme qui vive, comme s'ils étaient seuls au monde dans cette fichue contrée.

Il était toujours plié en deux sous le poids de Mya, mais ne sentait plus ni la fatigue, ni la douleur. Il ne se rendit pas compte non plus de la pluie qui s'était mise à tomber, et qui menaçait de les tremper rapidement. Il ne pensait qu'à une chose : sauver son amie, sa seule amie, celle qui lui permettait de tenir lorsque Joanh lui rendait la vie particulièrement difficile et que ses parents ne voyaient rien. Il s'imagina ne plus entendre ses sarcasmes, ne plus l'entendre l'appeler Minus. Elle avait raison finalement. Ce surnom, il adorait l'entendre, autant qu'il l'agaçait. C'était sa manière à elle de lui dire qu'elle l'appréciait. Un sanglot le secoua. Non, il ne pouvait la perdre.

Enfin, après une progression difficile, qui lui parut une éternité, il aperçut sa maison se dessiner entre les chênes séculaires. La boule d'angoisse revint aussitôt se loger dans son estomac, plus fort encore qu'avant. Était-il trop tard ? Il alla jusqu'à la porte, et y donna quelques grands coups de pieds, tenant difficilement l'équilibre. Il avait l'impression que s'il la lâchait pour la poser par terre afin d'ouvrir lui-même, elle le laisserait pour de bon, et ne se réveillerait jamais.

Castelizia.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant