Tome 2 | Chapitre 8 : Indélébiles

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Point de vue Bonnie :

Et puis, c'est l'acte lui-même – un instant de rupture, où la réalité se déforme, où le temps se dilate et se contracte en un point focal d'intensité pure.

Ce n'est pas seulement le couteau qui traverse l'espace, c'est toute mon existence qui bascule, emportée par une vague d'émotions contradictoires.

Il y a une dissociation, comme si je me regardais de loin, incapable de me reconnaître dans cet acte irréversible.

Pourtant, c'est bien une vie anéantie que j'aperçois distinctement quitter les yeux de l'homme. C'est bien ma prise autour du couteau enfoncé dans son cœur que je sens.

L'anatomie humaine n'a plus aucun secret pour moi.

Il n'a pas souffert, n'est-ce pas ?

C'est bien mon souffle saccadé qui résonne dans mes oreilles que j'entends. Son liquide visqueux qui a teint mes mains et qui colle à ma peau.

Subitement, je relâche le couteau et effectue un pas en arrière, mes yeux grands ouverts.

Puis, il y a la douleur, pas physique, mais profondément ancrée dans mon esprit, et cette sensation déchirante de perte - non seulement la perte de l'autre, mais la perte d'une partie de moi-même que je ne pourrai jamais récupérer.

Pendant un long moment, ni Jaw, ni moi ne prononçons le moindre mot. Le silence s'étire entre nous comme un gouffre d'une profondeur vertigineuse.

Puis, lentement, son regard se pose sur moi, un regard qui semble sonder les profondeurs de mon âme, cherchant à déchiffrer les remous émotionnels que j'essaie désespérément de masquer.

— Tu as fait ce que tu devais faire, Bonnie. Mon monde, notre monde, exige parfois de prendre des décisions qui dépassent la morale ordinaire. Tu as montré que tu pouvais le faire, dit-il d'une voix étonnamment calme.

— Ce n'est pas mon monde, je parviens miraculeusement à dire, à bout de souffle.

Un sourire en coin étire ses lèvres tandis que je reste tétanisée.

Profondément lâche aussi.

Je suis incapable de reposer mon regard sur l'homme que je viens de... tuer.

— C'est ton monde, maintenant. Tu n'as d'autre choix que de l'accepter, dit-il avec une conviction puissante.

Je secoue doucement la tête, laissant mes yeux plongés dans les siens. Comme pour me raccrocher à quelque chose qui m'empêchera de tomber.

Il soutient mon regard, sans jamais faiblir.

Aucun remord ne peint ses traits.

Aucun regret ne transparaît.

Rien.

— Cet homme... Tu m'as dit qu'il avait tué des femmes et des enfants, est-ce que... c'est vrai ? Je demande d'une voix fébrile.

Un sourire amusé se dessine sur ses lèvres alors que je me sens plus que jamais défaillir.

— Pas à ma connaissance. Mais il m'a manqué de respect à plusieurs reprises. C'est un argument suffisant, tu ne crois pas ? Me demande-t-il de manière rhétorique, son sourire s'élargissant.

Ma fébrilité se transforme en un mélange d'incrédulité et de trahison, une douleur nouvelle s'ajoutant au tourbillon d'émotions déjà tumultueuses qui m'assaillent.

Mon rythme cardiaque s'intensifie.

Puis, c'est la colère qui prend le dessus. Elle agit comme un bouclier pour me protéger contre la douleur aiguë qui m'embrase toute entière.

LA MARQUE | TOME 2 [DARK ROMANCE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant