Le jeune homme resta à terre plusieurs heures. Que ce soit psychologiquement ou physiquement, il était détruit. Son corps ne répondait plus à ses appels. Incapable de se relever, il rampa sur les cadavres. Les brûlures sur son corps lui donnaient envie de hurler, mais il n'en avait plus la force. Il se traîna du mieux qu'il put, sans résultat. Son cœur avait failli lâcher, foudroyé par Eileen. Comment la protectrice du royaume avait-elle pu devenir aussi monstrueuse ? Pourquoi un tel massacre ? À ses yeux, c'était impossible. Personne n'était capable de crime aussi abject. Une partie de lui rejeta cette réalité en bloc. Tout ceci pouvait-il être réel ? Non, bien sûr. Ce n'était qu'une histoire. Un rêve, ou plutôt, un cauchemar. Ils n'étaient pas morts. Les cadavres n'étaient qu'une illusion de son subconscient. Personne n'était mort, c'était évident. Le jeune homme ferma un long moment les yeux. Malheureusement, cela ne change rien. Personne ne pouvait survivre à un tel désastre. Même s'il la refusait, la vérité ne changea pas. Il repensa à sa famille. Ses parents étaient ici. Ils devaient avoir survécu. Oui, c'était obligatoire. Il ne voulait pas y croire. Personne ne devait mourir. Désespéré, le jeune paysan sombra dans l'inconscience.
Erouan se réveilla sur un lit vétuste. Il se redressa rapidement, mais il fut terrassé par ses vertiges. Son crâne le fit terriblement souffrir. Il s'écroula sur son lit, incapable de bouger. Ce n'est qu'après plusieurs minutes qu'il put rassembler ses idées. La mort, les éclairs, Eileen, Jean-Charles. Son cerveau refusait toujours d'accepter ses différents éléments. Ce n'était qu'un rêve. Un très mauvais rêve. Il avait dû être frappé par la foudre et imaginer tout ça. Voilà. C'était uniquement son imagination.
- Erouan, ça va, cria un vieil homme ? Question stupide. Comment te sens-tu ? Pas trop mal ? Mais, que s'est-il passé pour te retrouver dans cet état ?
Le jeune homme tourna difficilement la tête. Il commençait à mieux se sentir. Il put vaguement reconnaître un vieil ami. Peran-Gwenn était un sorcier local très puissant. Il n'avait plus de primes jeunesse et sa santé déclinait. Malgré tout, il gardait une certaine prestance. Dans la région, tout le monde le connaît, et il connaît tout le monde. C'est le genre de personne qu'on a l'impression d'avoir toujours vu âgée. Sa peau de métis dévoilait ses origines lointaines. Personne ne savait vraiment de quelle nation il était originaire, ni où Peran Gwenn avait grandi. On savait simplement qu'il était là pour transmettre ses connaissances. Erouan se rappelait avoir évité plusieurs de ses leçons de magie ennuyantes pour aller s'entraîner à l'épée. À quoi bon lancer des sortilèges ? Une fois tranché en deux, la magie est inutile. C'était son point de vue. Il regrettait quand même de ne pas avoir plus écouté les histoires passionnantes du vieux sage. Pour une fois, c'était lui qui avait une histoire à raconter.
- Oh, tu vas rire. J'ai été frappé par la foudre et j'ai fait un drôle de rêve. J'ai rêvé qu'on allait avec mes parents à une réunion de révolutionnaires. Ils voulaient me convaincre des crimes absurdes dont on accuse le roi. J'ai beaucoup d'imagination, alors mon rêve est absurde. La famille royale est sacrée. Ils ne pourraient jamais commettre de telles horreurs. J'ai imaginé que la reine Eileen était secrètement responsable de l'esclavage des elfes. Il y avait même le héros de la nation, Jean-Charles. Elle nous a tous massacrés, car on a refusé ses idéaux débiles. Elle m'a laissé en vie pour, je ne sais quelle raison. Tu vois, c'est débile ! Comme si Eileen pouvait être si cruelle ? Alors, où sont mes parents ? doivent-ils s'inquiéter ?
Erouan rigola un moment, mais il fut calmé par l'air sérieux de Peran Gwenn. Le vieil homme déglutit. La vérité était difficile pour lui aussi, mais il ne pouvait pas laisser le jeune homme se voiler la face. Il n'afficha aucune émotion, mortifié par la situation.
- Je sais que c'est difficile à accepter. Gamin, quand je suis allé nettoyer le vieux temple abandonné, je t'ai trouvé au milieu des cadavres. Gwilherm et Gwendoline n'ont pas survécu. Je ... Je suis désolé. Ça n'est jamais facile d'accepter un truc pareil. Tu peux le refuser, mais rester dans le déni n'apporte rien de bon. Je suis désolé. Tu étais le seul survivant. J'ignore ce qu'il s'est passé, mais j'ai l'impression que ton rêve est réel. Tu as de la chance d'être en vie.
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Gardien du crépuscule
FantastikCette histoire n'est pas faite pour être heureuse, ni horrible. Dans ce monde de fantaisie, j'espère parler du pouvoir destructeur de la haine, comme du pouvoir réparateur du pardon. C'est l'histoire de personnes brisées, qui se rebellent contre la...