CHAPITRE 10(YANN)

7 2 0
                                    

-《Mais qu'est-ce qui vous arrive,hurle le Coach, vous êtes tous mous! Allez on se réveille,les feignasses!》

Je soupire en retirant mon casque. Malgré le fait que nous sommes déjà en octobre, la sueur perle sur mon front à cause de mes efforts vains pour bien jouer. Malheureusement,ce n'est le jour de personne. Même Finn et Walter,nos meilleurs joueurs,ne sont pas dans leurs assiettes.

Je passe mon maillot au-dessus de ma tête,exposant ainsi mes abdos aux regards. Je vois le seul gay de l'équipe et la seule fille s'ésclaffer ce qui me fait sourire. Puis je me retourne vers le Coach,qui passe une main dans ses cheveux ébouriffés.

-《Bon,lance le prof de sa voix rauque. Ma femme et ma fille Bonnie m'attendent sûrement chez moi et je n'ai qu'une envie:les rejoindre. Alors bougez-vous,bordel!》

Il tappe dans ses mains et nous et nous fait signe d'y retourner.
Depuis la rentrée,nous avons joué trois matchs et nous n'en avons perdu aucun. C'est principalement pour ça que la moitié de l'équipe n'a plus de vie sociale et d'énergie,les entraînements prennent tout notre temps. Mais le match du 16 contre un collège de Houston s'annonce compliqué...et pour y remédier il n'y a qu'une chose à faire:travailler davantage. Malheureusement,cela nous épuise. Même les pom-pom girls sont à bout.

Une odeur de déodorant et d'humidité flotte dans le vestiaire des garçons après l'entraînement. Le miroir en face de moi me renvoie l'image d'un ado blond à demi-nu,les genoux macullés de terre sur son survêtement bleu roi. Puis j'aperçois Stanley Walter juste derrière et décide d'entamer la conversation:

-《Hey! T'en fais une de ces têtes!
-Ouais. Je crois qu'on est tous morts à ce stade!
-Le Coach est tellement à cran...
-Il faut le comprendre. L'équipe n'est jamais allé aussi loin dans le championnat depuis dix ans.
-Heureusement que Finn et toi êtes là pour rattraper le coup et nous motiver.
-Tu n'es pas en reste non plus. Il faut juste que tu te fasse confiance! Tu as beaucoup de talent,j'espère que tu le sais?》

Nous nous étreignons et il me fait un high five. Les autres joueurs nous rejoignent et il est bientôt question d'une fête. Je refuse,utilisant comme excuse mon texte d'arts scéniques alors que mes intentions sont toutes autres.
À présent, cette matière me plaît de plus en plus. J'ai regagné l'estime du prof grâce aux conseils d'Anaë et de Hugo, qui sont devenus en quelques semaines des potes pour moi. Anaë n'est vraiment pas qu'une simple bonne élève: elle est aussi empathique, sympa et très bavarde! Quant à Hugo,il est super gentil et talentueux! J'aime aussi beaucoup Pola malgré sa timidité mais j'ai encore du mal avec le caractère de pourrie gâtée de Phoebe. Cette fille peut s'avérer vraiment énervante.

Pourtant,il me reste du chemin à parcourir pour être parfait ou du moins comme j'aimerais être. Mes talents de musicien ne me sauveront pas si je n'apprends pas à chanter correctement et si je ne me mets pas au théâtre. C'est pour ça que j'ai accepté d'apprendre un passage de Dirty Dancing avec Anaë. Je trouve cette fille extrêmement douée dans les rôles féminins dramatiques ou exigeant une prestance importante.

Mais après le dîner ce n'est pas devant mon extrait du célèbre film romantique que je m'installe mais bien devant mon clavier. Je l'ai reçu à mon anniversaire de la part de ma mère. La dernière fois que j'ai entendu parler d'elle à vrai dire: elle l'a fait livrer sans donner son adresse. Partie. Envolée. En Europe. Sans me donner moyen de la contacter. Cela fait quatre mois,et je n'arrive pas à refermer la plaie. Elle m'a donné la vie, bordel! Comment pourrais-je l'oublier du jour au lendemain?

Mes doigts glissent sur les touches avec légèreté sans que j'ai besoin de trop réfléchir. Je monte le volume et me laisse emporter. La musique, c'est mieux que n'importe quel psychologue: ça vide la tête en laissant parler le cœur.

J'imagine que si la vie était une musique, la mienne ne serait qu'une note. Des portées muettes. De fausses notes et des fautes de copie.

Je jette un coup d'œil par ma fenêtre. La rue est déserte, obscure. Mon père n'est toujours pas rentré. Il taffe, comme il dit. Ça toujours été comme ça mais c'est encore pire depuis qu'elle est partie. Je ne le vois presque plus. J'ai l'impression de vivre seul, je vous jure. Pour lui, tout va pour le mieux. Mais pour moi? Ha ha! C'est ma dernière année de collège, je devrais en profiter. Au lieu de ça, je me retrouve à me torturer l'esprit et à faire des nuits blanches. Super!

-《 Hum...oui. Si c'est comme ça...très bien, très bien! Écoute,j'ai tout de même...des responsabilités...écoute-moi bien! Je ne peux pas toujours...bien sûr que si!
Attends deux minutes, marmonne mon père en me voyant vautrer dans le canapé.

-Salut, papa.
-T'es pas couché? (il raccroche et pose son portable sur la table)
-Je dois mater ça pour les cours. Sinon toi tu...
-Ça va. Je vais me coucher. À dem...
-C'était qui au téléphone?
-Un collègue. Un peu trop...impuissant suite à quelques contretemps (il sourit d'une manière étrange).
-Ah, merde. Bah...à demain.
-Oui, c'est ça. Bien sûr. À demain,mon grand.》

Il referme la porte de sa chambre en la laissant claquer. J'ai un mauvais pressentiment...j'ai une impression de déjà-vu...puis soudain

《Je ne peux plus être là, mon chéri. Ton père a ses responsabilités. Désolée.》

H.A.P.P.Y.: THE DESTINY OF USOù les histoires vivent. Découvrez maintenant