CHAPITRE 14 (HUGO)

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Je dépose les assiettes dans l'évier et me retourne vers mes sœurs. Assises en tailleur sur le sol, et regarde un film de Noël en mangeant du pop-corn.

Nous sommes le 23 décembre,et l'ambiance des fêtes et bien présente. Notre sapin se dresse à côté du meuble TV, décoré avec des boules de plastiques et des créations en pâte à sel. Des guirlandes sont suspendus dans toute la maison et une couronne de houx décore la porte d'entrée.

Ma mère fait son apparition dans mon champ de vision. Ses cheveux tombent en cascade dans son dos et elle porte un chemisier clair avec un jean taché.

-《Bonjour, mes princesses! Vous allez bien?
-Ouais!!! s'exclame Izzy. Hugo a fait des lasagnes!
-C'est pas vrai? Il a réussi à ne pas les faire cramer?
-Ha ha! Non; elles étaient même délicieuse! Pas vrai?
-Carrément!》

Vera tappe dans ses mains, toute contente. Je me dépêche de finir la vaisselle et enfile ma veste. Je déclare à la cantonnade:

-《J'y vais. À plus!
-Fais attention à toi, mon chéri. Bonne soirée.》

Je grimpe sur le toit de l'ancienne gare et pose ma veste pour m'asseoir dessus. Je sors d'une poche mon harmonica et un paquet de chewing-gum à la menthe lorsqu'une voix m'interpelle.

-《Halton?
-Marvish?! Qu'est-ce que tu fous ici?!
-Mon frère, persifle-elle. Il est avec le tien. Et je préfère largement ta compagnie à celle d'une bande de drogués.
-Ah bon?
-Je ne dis pas que j'apprécie ta compagnie non plus hein, simplement que je préfère être avec toi qu'avec eux.》

La petite brune s'installe à mes côtés et remonte ses genoux contre sa poitrine pour se protéger du vent. Ses cheveux d'ébène voltigent autour de son visage angélique. Au bout d'un moment, elle murmure:

-《Tu veux que je te racontes un truc de dingue?
-Hum...si tu veux...
-Clarkson compte organiser un spectacle d'hiver. Avec tous ses élèves.
-Vraiment? Et comment ça marche?
-C'est avec les groupes de tables. On va devoir créer des séquences. Tu y crois toi?
-Comment tu sais ça?
-Peu importe (elle hausse les épaules). Arrête avec tes questions!》

Elle me donne un coup de coude et observe la vue d'un regard critique en tortillant entre ses doigts une mèche de sa chevelure sombre. Elle porte un pull gris à rayures sous une veste en cuir. Ses pieds pendent du toit dans sa paire de New Balance. Soudain, j'ai du mal à discerner la gosse de riche du premier jour. Habillée si simplement...on dirait une autre.

-《Tu veux bien me jouer de l'harmonica?
-Attends...t'es sérieuse Phoebe? Tu m'as pris pour qui?
-S'il te plaît, minaude-elle. J'adore cet instrument! Allez, Hugo!
-Non!
-Si!
-Non!
-Allez!》

Je souffle et glisse l'instrument contre mes lèvres. Une mélodie entraînante s'en échappe. La brune joint sa voix au timbre si original et nous voilà à improviser un concert.

Il ne faut pas se mentir, la voix de Marvish est à tomber. Un peu rock et suave à la fois.  Atypique et si reconnaissable. Elle se marie parfaitement avec la mélodie acoustique de l'harmonica.

Soudain, elle s'arrête et se relève. Ses yeux sont tristes et vides,un sourire douloureux étirant ses lèvres pulpeuses.

-《Hé tu vas où?
-Je me casse! Peu importe où! Je me casse!!!
-Mais...Phoebe...attends!》

Elle s'en va au courant et je la poursuit. Je l'entends alors hurler. J'arrive à la rattraper à temps, l'empêchant ainsi de tomber à travers les barbelés. Sa main s'accroche à la mienne désespérément, emmêlant ses doigts aux miens. Sa peau est tiède. Sa paume toute douce. Instinctivement,ma respiration s'est accélérée en un rythme intense. Ses pupilles glacée rencontrent mon regard inquiet.

Je l'aide à se remettre d'aplomb tandis que les questions se succèdent dans ma tête. Cette fille est décidément imprévisible. Elle aurait pû crever, bordel! Si je n'avait pas été là...en fait non. Si je n'avait pas été là, elle ne serait pas sur ce putain de toit!
Mais pour l'amour de Dieu, elle ne peut pas regarder où elle marche deux secondes?! Elle est vraiment idiote.

-《Merci, chuchote-elle encore sous le choc. Oh Hugo...merci.
-T'es vraiment conne! T'aurais pû crever! C'est ce que tu veux?
-Bien sûr que non!
-Alors fais un peu attention! Ça t'apprendras à partir si brusquement.》

Elle se tait et baisse les yeux,terrorisée. Ça se lit dans ses yeux: elle a vraiment, vraiment peur. Ses traits paraissent figés par l'effroi et elle tappe du pied contre le barbelés.

-《Arrête ça, Marvish! Tu vas te faire mal.
-C'est pas ces putains de barbelés qui vont faire quelque chose à...
-Ces putains de barbelés ont failli avoir ta peau, Marvish. Alors ils peuvent bien bousiller tes pieds et tes chaussures.
-Depuis quand t'inquiètes-tu pour moi?

Je souffle et passe une main sur mon visage. Cette meuf va me tuer un jour...


H.A.P.P.Y.: THE DESTINY OF USOù les histoires vivent. Découvrez maintenant