Chapitre 6

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Côme

21h15

Elle avait réussi à m'énerver, moi qui voulais mettre mon plan à exécution, ça a raté dès qu'elle a commencé à parler de ses parents. Toute ma haine a refait surface et je l'ai ignorée tout le long de la soirée. Ça va être plus dur que ce que je pensais.

On arrive devant chez elle. La maison est imposante, comme je l'avais constaté tout à l'heure, construite en pierre calcaire, avec un toit en ardoise qui brille faiblement sous les rayons de la lune. Les murs épais et les petites fenêtres aux volets de bois peints en marron, témoignent d'une architecture robuste, typique de l'Aveyron. Une voiture est déjà garée devant l'entrée. Les lumières sont allumées derrière les fenêtres, éclairant légèrement la cour pavée.

Même si je ne lui parlais pas, je l'ai entendue dire qu'elle n'avait personne ici. Donc, qui cela peut-il bien être ? Ses mains, qui pendant le voyage n'étaient presque pas posées sur moi, se sont soudain agrippées à ma veste. J'éteins le moteur. Je veux descendre, mais elle est toujours accrochée à moi.

— Je ne peux pas descendre, il faut que tu m'amènes loin d'ici.

Je tourne la tête sans voir ses yeux, mais sa voix ne trahit pas : elle a peur, elle est même terrifiée.

— Descends.

Je détache doucement ses mains de ma veste.

Elle m'obéit et je fais de même. Cette voiture et ces personnes dans sa maison n'étaient pas les bienvenues, comme je m'en doutais. Elle me donne son casque, toute tremblante.

Je jette un coup d'œil rapide aux alentours. Le jardin est vaste, un peu sauvage, un grand lac brille grâce a la lumière, et avec des buissons non taillés et des arbres aux branches épaisses, formant des ombres dans la pénombre. L'entrée de la maison est dominée par une grande porte en bois massif, ornée de ferrures anciennes. Des marches usées mènent à cette porte, qui semble à la fois accueillante et un peux flippante.

— Tu as des invités ? finis-je par dire.

Elle lève le regard vers moi.

— Non... Mais je pense savoir qui c'est.

Plusieurs émotions passent dans ses yeux.

Je vois aussi de la détresse, quelque chose ne va pas.

— Si tu ne veux pas m'emmener loin d'ici, alors tu devrais partir. Merci de m'avoir accompagnée.

Elle tourne les talons.

Quoi ? Mais elle est contradictoire.

— Attends ! Tu dois me donner tes...

Son regard est luisant.

— Tes livres sur les voyages ou je ne sais plus quoi, finis-je par dire.

Elle allait ouvrir la bouche, mais un bruit de verre se brisant au sol résonna dans la maison, amplifié par les murs de pierre. Si quelqu'un doit la tuer, ça sera moi.

Par réflexe, je lui pris la main et, au pas de course, nous nous arrêtons devant la porte. Je rentre le premier.

L'intérieur de la maison est sombre, éclairé seulement par quelques lampes éparses. Les murs sont recouverts de boiseries sombres, et le sol est du parquet , ce qui semble être ma seule chose neuve ici. Les pièces sont vastes, avec des poutres apparentes au plafond, et une grande cheminée trône dans le salon, donnant à l'endroit une ambiance chaleureuse.

— Ah, te voilà !

Un vase s'est éclaté par terre, un homme est assis sur un canapé en cuir, dont les coussins sont enfoncés par l'usage. Son acolyte est en train de fouiller dans des placards en bois sculpté, à la recherche de quelque chose de valeur.

— Que faites-vous là ?

— T'es qui, toi, au juste ? Son mec ?

Je n'avais pas remarqué, mais je tenais toujours la main de la traîtresse.

Je la lâche doucement.

— Sortez de cette maison, c'est une propriété privée, ordonnai-je.

L'homme au crâne rasé se lève du canapé pour venir vers moi.

— Tu entends, Franck ? Le chinetoque nous cause.

Il lève son poing vers mon visage, il est bien trop lent. Je le contre avec ma main et, avec l'autre, je lui donne une petite baffe.

— Cassez-vous, je vous ai dit.

Son collègue sort aussitôt une arme.

La traîtresse, toujours à côté de moi, est tétanisée.

Je la pousse en arrière. Même si les balles humaines ne me font rien, j'ai bien peur que pour la traîtresse ce soit différent.

Il la regarde et rigole.

— Tu vois, Alana, je me suis rappelé une chose. Ton père était un crevard, mais ta mère t'a bien légué cette maison, non ?

— Oui, répond-elle simplement, toujours sans bouger.

— Je me suis dit que j'allais venir te rendre visite, histoire d'être sûr qu'il n'y ait rien de valeur. Pour l'instant, on a fait que le salon !

Il rigole.

— Il n'y a rien ici. Je te rembourserai, promis, tu le sais bien.

Ses lèvres tremblent et ses yeux commencent à briller.

— Non, non, non, ne pleure pas.

Il se rapproche dangereusement d'elle.

Il allait poser sa main sur son visage, mais je l'intercepte avant, et cette fois, je lui flanque un énorme coup de poing. Mince, ce fut un peu trop fort pour un humain. Tellement fort qu'il traversa la baie vitrée et s'étala sur le gazon à l'arrière de la maison, où quelques plantes en pot gisent, renversées.

Merde, je crois qu'il est mort. Je baisse la tête et je souffle. Je n'étais pas censé me faire repérer tout de suite.

Réfléchis ! Qu'est-ce que je fais ? Réfléchis.

— C... Côme ?

Je me retourne et je la vois, les larmes coulent le long de ses joues. Son regard est vide.

Son collègue tremble comme une petite chiotte et court à travers la baie vitrée brisée. Il ne s'arrête même pas devant son boss. Je ne peux pas le laisser filer.

— Reste là !

Je pointe mon doigt sur elle, mais son regard est toujours perdu.

Putain.

Une fois dehors, à ma grande surprise, son corps gisait par terre, sans tête, pas loin de son boss.

Quand je lève les yeux, une énorme bête poilue se tient devant moi. Chiotte, un Skor, une créature de la planète Sorus, mais que fait-il ici ! Il ne manquait plus que ça.

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