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VITTORIA SANTONI

Maya elle avait beau avoir quatre ans, c'était une vraie ptite conne quand elle s'y mettait.

Et ce matin, à sept heures, elle s'y mettait clairement. J'ai serré les dents en sentant la douleur s'accentuer. Sérieux, ses parents pouvaient pas lui dire de ranger ses jouets ? Histoire que je sois pas en retard et de mauvaise humeur.

- Eh dis pas des gros mots devant ta nièce.

J'ai relevé la tête en direction de la tête brune à moitié endormie sur mon canapé.

- Bah t'es restée dormir toi ?

Il a hoché de la tête en tirant sur elle la couette. Alexandre, c'était plus ou moins mon seul pote depuis que j'étais à Paris. En ce moment il squattait l'appart parce que c'était plus proche du studio et il revenait souvent tard donc ça lui évitait des allers retours. Son album "Plus ort que l'orage" devait sortir fin mars donc en ce moment il taffait comme un fou.

Pour en revenir à l'appart, j'étais censée faire profil bas puisque techniquement il n'était pas à moi. Cette colocation à quatre commençait à me taper sur les nerfs. Pourtant ça faisait déjà un an que ça durait et onze mois que je me disais qu'il fallait que je trouve un autre logement. Tout ça c'était à cause de cet imbécile de Livio.

Mon frère jumeau à justement débarqué dans le salon.

- T'es en retard pour le taff meuf.

J'ai enfilé mes converses sans faire attention à sa remarque. J'étais clairement en retard et pour une fois c'était pas lui qui m'avait mise en retard donc je pouvais même pas l'embrouiller. Franchement si j'avais su le nombre incalculable de galères dans lesquelles il allait me mettre, je l'aurais graille dans le ventre de notre maman.

Il y avait quand même un point sur lequel je pouvais pas le critiquer : j'avais un taff grâce à lui. Sans lui, je serai encore à moisir dans ma Corse natale. Il était monté à Paris à ses dix huit ans et y avait rencontré Alexandre ou plutôt Bekar, lors d'une soirée. C'était d'ailleurs grâce à lui qu'il avait rencontré Nour, sa copine avec qui il avait eu une adorable petite fille (Maya).

Enfin adorable c'était relatif. Je passais la journée à travailler dans un foyer avec des ados en difficulté et certaines journées pouvaient être vraiment dures mentalement. Alors quand je rentrais le soir et qu'elle me montrait un dessin où on voyait clairement une vache mais c'était censé me représenter, j'avais un peu envie de pleurer.

J'ai attrapé mon sac à main et ma veste.

- On s'capte ce midi ?

Alexandre à juste levé le pouce avant de se lever, sans doute pour piquer mon lit.

Une fois arrivé au centre social, j'ai ouvert mon bureau et j'ai direct commencé à travailler. J'étais censé aller à une soirée avec Alexandre ce soir et j'avais cette fâcheuse habitude de terminer de travailler tard et ensuite avoir la flemme de bouger.

Vers midi j'ai rejoins le rappeur pour aller dans un de nos restos préférés. Il m'attendait devant le centre, un sourire amusé.

- J'ai cru ils allaient pas te laisser venir.

J'ai souris en suivant son regard en direction de deux jeunes avec qui j'avais passé la matinée pour faire leur dossier.

- Ils sont sympas. On a fait toute la préparation d'un dossier pour obtenir des aides. J'espère vraiment qu'on va trouver une famille d'accueil où ils peuvent rester ensemble.

- T'es vraiment dévouée à ton taff, c'est cool mais oublie pas de prendre du temps pour toi.

J'ai haussé des épaules. Lui et Livio me tenaient régulièrement ce genre de discours.

Une fois installées et nos plats commandés, j'ai redemandé l'adresse au brun pour ce soir.

- Je viendrais te chercher, c'est plus simple parce que c'est une soirée pour l'anniversaire du label. On est pas mal d'artistes invités.

J'ai siroté le fond de mon verre. Il m'avait déjà invitée à plusieurs soirées du même type et c'était toujours un peu gênant. J'avais l'impression d'être un imposteur ou quelqu'un qu'on avait trouvé dans la rue en mode "Ah t'as rien de mieux à faire ? Bah vas y rentre".

- Pas de soucis. J'suis venue en voiture donc je rentre vite me changer et tu passes me prendre ensuite.

Il a approuvé mes paroles en hochant de la tête.

- Je viens pour dix huit heures. La soirée commence tôt parce qu'il y a un apéro avec le blabla officiel. Un peu relou mais avec un peu de chance y aura du Moët.

J'ai ricané. Si la qualité de la soirée reposait sur le champagne, ça promettait.

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J'ai lâché un juron en voyant qu'il était seize heures trente. Il y avait zéro moyen que je sois prête à dix huit heures si je partais que maintenant du bureau. J'ai attrapé mes affaires avant de dévaler les marches et j'ai salué au passage un groupe de jeunes installés dans le foyer.

- T'es pressée ?

Je me suis arrêtée en entendant Inès. C'était une de mes chouchoutes même si j'essayais de pas le montrer. Elle me faisait tout le temps mourir de rire et elle était vachement intelligente à seulement onze ans.

- Un petit peu. Je sors ce soir et j'ai rien préparé.

Une de ses copines la rejointe, les yeux brillants de malice.

- Tu vas voir ton amoureux ?

J'ai rigolé. Ces deux là, elles adoraient les ragots.

- Si seulement j'en avais un, j'aimerais bien.

On a encore un peu discuté et j'ai finis par rejoindre ma voiture. Sortir du créneau ma demandé un effort de dingue. Vu que j'étais en retard ce matin, j'avais fais aucun effort pour la garer. On aurait dit qu'elle était tombée du ciel. J'ai reculé doucement en faisant attention à ne pas toucher la voiture derrière. L'abruti qui l'avait garé avait décidé de me coller le cul. Une voix s'est exclamé venant de dehors.

- Putain fais gaffe !

J'ai baissé la vitre en voyant un mec avec des lunettes de soleil, capuche et casquette qui regardait furieusement l'arrière de ma voiture en agitant sa clope dans ma direction.

- C'est bon je l'ai pas touché ta voiture.

Le mec ma regardé et a ensuite regardé son Audi de merde.

- Tu vas réussi à sortir sans me la rayer ?

Respire Vittoria. T'as pas le temps d'aller le balayer, t'es déjà en retard. Je lui ai dit d'aller se faire foutre en essayant de vite me tailler. L'effet était très peu convaincant car j'ai galéré à sortir sous le rire méprisant du pauvre mec.

Je lui ai jeté un dernier regard dans le rétro et j'ai vu qu'il m'adressait un doigt d'honneur. Quelle ville de merde.

Il y avait vraiment intérêt à avoir beaucoup de champagne ce soir.

BIKINI BOTTOM - plkOù les histoires vivent. Découvrez maintenant