ℂℍ𝔸ℙ𝕀𝕋ℝ𝔼 𝟡

101 8 8
                                    

Tout était calme. Si calme. Tout autour de lui, il n'y avait plus que le silence. Un silence profond et paisible qui l'enveloppait entièrement. Il était comme bercé par quelque chose d'intangible, d'inexplicable et de néanmoins si réconfortant. Il se sentait libre de toute contrainte physique. Loin de toute la souffrance qu'il avait fait endurer à son corps. Il était simplement là. Et pas ailleurs. Y avait-il réellement un ailleurs ? Son existence ne résumait-elle pas à ce moment ? Avait-il seulement vécu un jour ? 

L'espace intemporel et sans limite qui l'entourait ne répondit pas à ses questions. Il se contentait d'être là, lui aussi. Étaient-ils les deux seules entités désincarnées à flotter dans ce brouillard ? Mais comment l'espace pouvait-il être une entité ? Le fil déconstruit de ses pensées ne l'aidait pas à se concentrer. La dissociation avec son corps était certaine. Pourtant, il ressentait. Il percevait les rayons de la lumière qui lui picotaient la peau. L'apesanteur faisait également pression sur lui. Il le savait, puisqu'elle modifiait sa façon de se mouvoir dans cet espace. Comment faisait-il pour respirer avec toute cette pression ? Mais qu'était-ce, de respirer ? Peu importait. Il pouvait s'en passer, puisqu'il était là. Et pas ailleurs. Qu'avait-il déjà dans l'ailleurs ? Rien de mieux qu'ici, il en était certain. 

L'atmosphère était insaisissable, elle s'écrasait sur lui comme le feraient des vagues contre un rocher. Les pensées et les sensations se fondirent les unes aux autres. Était-il réellement le bienvenu ici ? Et pourquoi était-il là ? Mais où d'autre pourrait-il être ? Ailleurs ? Le cycle de ses pensées le poussait continuellement à se questionner sur cet ailleurs. Qu'y avait-il donc de si important dans cet ailleurs ? Il n'en fût pas certain, mais quelque chose semblait l'attendre là-bas, au-delà de cet espace-temps. Ailleurs. La lumière s'intensifia. Les picotements devinrent des brûlures et l'espace sembla se replier sur lui-même...

•••

Slavko ouvrit les yeux sur une voûte étoilée. Au même moment, une étoile filante fendit le ciel artificiel et laissa une traînée de poudre derrière elle. La Lisiraie possédait les meilleurs façonneurs de réalité virtuelle. Il le savait, pourtant il était toujours époustouflé par leurs travaux. Même après toutes ces années, il y avait certains spectacles dont il ne se lassait pas. Une voix le tira de sa rêverie.

- Koko ! Tu m'écoutes ou pas ? dit la voix. 

- Eve, je t'ai déjà dit mille fois de ne pas m'appeler comme ça en public, si quelqu'un t'entendait et... rouspéta-t-il, mal à l'aise. 

- Et quoi ? Le monde entier serait au courant que j'aime mon mari ?  se moqua-t-elle. Quel drame, ô misère ! Notre vie est finie !

Slavko décocha un regard faussement accusateur à sa femme. En guise de réponse, elle lui sourit de tout son soûl. Elle savait pertinemment qu'il ne résisterait pas longtemps à son charme. Effectivement, un étrange rictus -qui s'apparentait à un sourire chez lui- apparut sur son visage. Eve lui lança un regard malicieux. Folle de joie d'avoir remporté cette bataille, elle se jeta à son cou en riant. Slavko l'enlaça vigoureusement. Il était à deux doigts de lui briser les côtes mais il s'en fichait. C'était sa façon de lui dire qu'il l'aimait en retour, lui qui avait tant de mal avec les mots. Elle releva la tête si soudainement, que Slavko faillit se prendre un coup de boule.

- On a bien fait de sortir, regarde ! s'exclama-t-elle en pointant son doigt sur un coin du parc. Il y a une sphère musicale là-bas !

Slavko suivit le doigt de sa femme jusqu'à une bulle insonorisante installée dans le parc. A l'intérieur, une foule dansait. Sans même lui demander son avis, Eve le tira dans cette direction. Il n'était pas particulièrement fan des foules. Surtout lorsqu'elles étaient en mouvement. Pourtant, il la suivit sans faire d'histoire. Il était simplement heureux de la rendre heureuse. 

𝕃'𝔼ℂ𝕃𝔸𝕋 𝔻𝔼𝕊 𝕆𝕄𝔹ℝ𝔼𝕊Où les histoires vivent. Découvrez maintenant