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Je ne dois pas décevoir mon président.
L'art de manipuler les gens est quelque chose de très facile à mettre en pratique dans la vie quotidienne, mais plus compliqué à faire durer dans le temps.
Cela demande un certain savoir-faire et un certain pouvoir afin de parvenir à avoir une réelle emprise sur cette personne.
Le choix des gestes, des mots employés est souvent très minutieux.
Chaque détail compte.
Il y a évidemment plusieurs moyens de parvenir à manipuler quelqu'un.
La manipulation par les coups est souvent celle qui est le plus utilisée. S'acharner physiquement sur une personne jusqu'à ce qu'elle soit tellement apeurée à l'idée de souffrir physiquement qu'elle se comporte de la manière voulue par le manipulateur.
Il est difficile de sortir de ce cercle, mais cela l'est encore plus lorsque que la manipulation est psychologique.
Parvenir à entrer dans l'esprit d'une personne afin de lui imposer un mode de vie, la convaincre que cette manière est la meilleure pour elle.
Jouer sur la culpabilité.
Sur l'humanisme d'une personne.
Se positionner en tant que mentor, effectuer un travail sur plusieurs mois afin d'atteindre la confiance absolue de la part de la victime, simplement pour ensuite pouvoir la manipuler à sa guise.
Gabriel avait l'impression d'étouffer.
Il était envahi par des souvenirs lointains, des souvenirs le mettant en scène lui, passant des nuits entières à bosser, se retrouvant au bord du malaise la journée.
Des souvenirs de lui, changeant complètement son mode de vie, ses goûts et sa manière de se comporter.
Tout ça pour lui.
Tout ça pour la validation de cette personne, tout ça pour prouver qu'il n'était pas un incapable, parce que prouver était devenu son quotidien.
Il devait le rendre fier.
Parce que, qu'était-il sans lui ?
Il n'était rien.
Parce qu'il avait passé son temps à le lui répéter, lui répéter qu'il n'était rien sans lui.
Lui répéter que tout ce qu'il lui avait offert, il pouvait le lui reprendre à n'importe quel instant.
Passant des heures à lui dire encore et encore à quel point sa vie ne devait tourner qu'autour de lui.
Parce qu'au final, la chose la plus importante était toujours ancrée dans son esprit, aussi vive que les souvenirs qui le hantaient jours et nuits.
Il ne devait pas décevoir son président.

Gabriel se réveillait en sursaut, la respiration rapide, des sueurs froides parcourant sa colonne vertébrale.
Il ne se rappelait plus de son rêve, et pourtant, il était terrifié rien qu'en essayant d'y repenser.
Il se redressait, se rendant compte qu'il s'était endormi sur la table, le croissant à moitié mangé en face de lui, accompagné de la bouteille de jus qu'il n'avait même pas touché.
Il se passa une main sur le visage, essuyant la sueur sur son front, tentant de calmer les tremblements qu'il sentait dans sa main.
Un coup d'œil à l'horloge le fit soupirer, se forçant à se lever en essayant de remettre de l'ordre dans son esprit.

"Putain."

Se relevant, il se dirigeait vers sa chambre, s'habillant rapidement en ne voulant pas être en retard.
Il avait énormément de choses à bosser aujourd'hui.
Il mit du temps à trouver ses chaussures, fronçant les sourcils en ne les trouvant pas à leur place habituelle.
Il les rangeait pourtant toujours au même endroit.
Soudain, une scène se déroula dans son esprit, une scène le représentant lui, complètement avachit sur son lit en train de converser avec un homme dont il n'arrivait pas à se rappeler le visage.

"Bordel mais qu'est-ce qu'il s'est passé hier soir.."

Soupirant, il enfilait ses chaussures, sortant de chez lui et montant dans sa voiture avant de se diriger vers Matignon, non sans se poser des centaines de questions concernant la soirée de la veille.
Sur le chemin, il sentit son téléphone vibrer.
Elena.
Il décrochait, souriant avant même de parler.

"Elena, bonjour."

"Gaby, comment tu vas ? Pas trop mal à la tête ?"

Il rit légèrement.

le poids du mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant