Ch II: Un drôle d'aveu

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Le lendemain, la matinée s’annonce belle. Les cours se déroulent tranquillement. Lors de la pause, je prends les escaliers pour me rendre à la bibliothèque. Je ne me lasse jamais de cet endroit. J'allais entrer quand une voix familière m'appelle. C’est Claïra. Je me tourne vers elle, sentant déjà une confrontation imminente.

- Oui ?
- Je peux savoir à quoi tu joues ?
- De quoi tu parles ? (Bien que je connaisse déjà la raison de sa présence ici.)
- De Will ! Je t’ai vu flirter avec lui dans la bibliothèque hier.
- Tu te trompes, on ne faisait que parler.
- Menteuse, j’ai vu la façon dont vous vous regardez.
- Fais attention à ce que tu dis, jeune fille. Tu nous as vu, et alors ? (Elle commence vraiment à m'énerver.)
- Il m’appartient, je t’interdis de l’approcher.
- Alors prends-le... si tu peux, bien sûr, répondis-je avec un air de défi.
- Réveille-toi, ma chère, car je l’ai déjà, dit-elle avant de s'en aller toute confiante.

Je reste plantée là, dérangée par sa remarque. Je ne veux plus lire, je n’ai plus d’humeur. Je retourne en classe et reste jusqu’au son de la cloche. Le censeur vient nous annoncer que le professeur de sciences sociales sera absent et que nous devons garder le silence pour ne pas déranger les autres classes. La tête sur le pupitre, je m’apprête à dormir quand une main touche mon épaule.

- Owen ? Qu’est-ce qu’il y a ?
- Rien. Viens jouer avec nous.
- Mais on vient de nous demander de garder le silence.
- Je sais... Il n’y aura pas de problème, t’inquiète.
- D’accord. C’est quel jeu ?
(Il se penche vers mon oreille.)
- Action ou vérité.
- Cool, je suis partante.

Nous nous dirigeons vers son banc, le dernier. Les gars du banc d’avant nous font face, y compris Will. Ses yeux ne me lâchent même pas une seconde. L’un d’eux prend une plume et place une règle dessus. Il marque un côté avec un marqueur pour montrer celui qui posera la question et l’autre celui qui répondra. On choisit qu’action. On rit beaucoup. La règle continue de tourner, et ce que je redoutais le plus arrive : Will et moi. Heureusement, c’était à moi de poser la question.

- Action ou vérité ?
- Vérité.
- Es-tu en couple avec une fille de la classe ? Si oui, mentionne son nom. (Il ne s’attendait pas à une telle question vu son étonnement.)
- Oui, et c’est Claïra.

Je sens mon cœur rater un battement. Je suis choquée. Alors, elle disait vrai. Pourquoi flirte-t-il avec moi, alors ? J’ai plein de questions, mais je me reprends rapidement car on ne fait que jouer.

- Cool ! On continue, dis-je en cachant ma déception avec un faux sourire.

On joue encore quelques tours, puis la cloche annonce la deuxième pause. La journée passe rapidement.

Le soir venu, je m’apprête à dormir quand je reçois un message.
- Salut, Alie.
- Salut, c’est qui, je vous prie ?
- Quelqu’un que tu aimes beaucoup.

Owen adore jouer à ça avec moi quand il change de numéro. Sans doute c’est lui.

- Owen, arrête. Je ne suis pas d’humeur à jouer.
- Apparemment, vous êtes très proches. Parfois, j’ai même envie d’être à sa place.

Serait-ce Will ?

- Will ?
- Oui, c’est moi.
- Comment as-tu eu mon numéro ?
- Ce n’est pas important. Tu disais ne pas être d’humeur, qu’est-ce qui ne va pas ?
- Mon humeur ne te concerne pas. Va te faire voir !
- Du calme ! Je voulais seulement qu’on parle.
- Je n’en ai pas envie, alors bonne nuit !

Je ferme mon téléphone, furieuse. Ma tête est en feu, trop de questions... Je me tourne dans tous les sens, voulant hurler toute ma peine, mais je me retiens jusqu’à m’endormir.

Ce matin, je me réveille un peu mieux. Mais je n’oublie pas ce que Will m’a fait. Je suis amoureuse de lui et il a joué de ça. Durant la première pause, je passe voir mes copines pour me changer les idées. On discute un peu, puis je les laisse pour aller dans la partie primaire, sous les arbres. Il y a deux bancs pas trop longs, perpendiculaires l’un à l’autre. Je m’assois, respirant l’air à pleins poumons. La cloche sonne, je rentre pour suivre deux autres heures de cours. Pendant ceux-ci, Claïra ne cesse de parler de son copain aux filles, ce qui m’agace beaucoup. Ses amis ne prêtent même pas attention au professeur.

Lors de la deuxième pause, je me rends à la bibliothèque pour terminer un livre que j’avais commencé, qui parle de la confiance en soi. Quelques bonnes minutes plus tard, je vois Will entrer et se diriger vers moi. Il tire la chaise en face de moi et s’assoit.

- Alia, s’il te plaît, on peut parler ?
- Je t’écoute, mais je n’ai pas beaucoup de temps.
- Je crois que j’ai des sentiments pour toi.

Quoi ? Il vient de dire qu’il m’aime. Non, non, reprends-toi. Tu es plus forte que ça.

- En quoi est-ce important ? Je crois que c’est mieux que tu passes du temps avec ta copine que de rester là à me suivre partout.
- En fait... Depuis le premier jour, toi et Claïra m’avez attiré. Alors, j’ai commencé avec Claïra, puisqu’elle est plus docile que toi.
- Que veux-tu dire par "commencé" ?
- Quand une fille me plaît, je couche avec elle pendant quelques mois, puis je la laisse tomber pour une autre.
- Mais t’es fou ou quoi ? Tu te sens à l’aise de me raconter des sottises pareilles.
- Tu me rends dingue, Alia. Tu es la seule fille qui me résiste. Je crois que je pourrais changer grâce à toi.
- Je peux t’aider à changer, mais en restant seulement ton amie. Claïra t’aime trop pour que je lui fasse une chose pareille.
- On n’a qu’à garder notre relation secrète. Il suffit que je t’aie.
- Franchement, t’es cinglé.
- À cause de toi.
- Ne rejette pas ta folie sur moi, salaud !

Je lui lance mon livre au visage de toutes mes forces et quitte la bibliothèque, remplie de colère.

Je descends rapidement les escaliers du deuxième et du premier étage, car la bibliothèque se trouve au deuxième. Je sens les larmes monter dans mes yeux. Jamais un garçon ne m’a traité de la sorte. Ils me traitent toujours avec respect. Je cours rapidement en direction du couloir car je ne veux pas être vue en train de pleurer. À peine ai-je mis les pieds dans le couloir que je rentre dans quelqu’un. J’ai failli tomber, heureusement, la personne a eu la gentillesse de me rattraper. Sans que j’aie le temps de réagir, il me serre dans ses bras, contre sa poitrine. J’ai su que c’était un garçon, je n’ai pas regardé car j’avais grand besoin de ça. Après quelques instants, il me lâche et je remarque le nouveau de l’autre NSIII. Je recule rapidement, tout en m’excusant. J’ai honte, je crois que je ne fais qu’empirer les choses.

- T’as pas à t’excuser !
- Alors merci...
- C’était gratuit.

Il me fait un clin d’œil, puis s’en va. Oh mon Dieu ! Il est trop beau, et bien bâti aussi. Bon, ressaisis-toi. Je rejoins ma classe.

Cette terrible journée terminée, je rentre chez moi encore remplie de tristesse. Norra fait de son mieux pour m’aider à me changer les idées mais en vain. Ma mère l’a remarqué, mais je lui ai dit que tout va bien, car elle aurait piqué une crise si elle savait qu’un garçon ose me traiter de la sorte. Après avoir pris mon bain, mangé, fait mes devoirs, je me suis couchée. Puis je reçois un message.

- Alie !
- Oui ? (C’est Owen.)
- J’ai appris qu’il s’est passé quelque chose de grave entre Will et toi.
- Et ?
- J’aimerais que tu lui pardonnes, il le regrette.
- Il a perdu sa langue, lui ?
- Non, je ne veux pas que tu gardes rancune alors, s’il te plaît, essaie.
- J’y penserai... Bonne nuit, Owen !
- Bonne nuit ! Repose-toi bien.

Je ne sais pas ce qu’il a pu raconter à Owen, mais je ne suis pas prête à le pardonner aussi facilement. J’essaie de penser à autre chose, puis m’endors.

À travers les âges...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant