Chapitre 22

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- Amédée! Jean-Charles ! Je suis là!

Au comble de l'excitation, Martin balançait les bras pour attirer l'attention de son meilleur ami qui descendait tout juste du TGV, suivi de son mari. Débordant d'enthousiasme, il se fraya un chemin sur le quai à travers la foule de touristes encombrés pour se porter à leur rencontre, un sourire immense aux lèvres. Il était tellement heureux de cette visite tant attendue qu'il ne grinça même pas des dents devant la montagne de bagages griffés dont les deux hommes étaient chargés, et qu'il allait galérer à caser dans le coffre du SUV malgré sa taille. Il ne prêta pas non plus attention aux regards mi-moqueurs mi-impressionnés des autres passagers devant le look très Emily in Paris dont l'ancien mannequin s'était affublé. Le lin couleur azur n'est pas portable par grand monde mais agrémenté d'un fédora de paille blanc cassé et de lunettes de soleil over size, il composait un style certes outrancier, mais qu'Amédée assumait avec une classe que Martin lui enviait. 

- Mon poussin!

Il se jeta dans les bras tendus et les deux hommes s'étreignirent étroitement, heureux de se retrouver enfin. Les appels téléphoniques hebdomadaires ne suffisaient pas et se voir en vrai était un soulagement. Amédée colla deux grosses bises sur la joue légèrement rugueuse de Martin et lui ébouriffa les cheveux avec une affection moqueuse.

- Mais qu'est-ce que c'est que ce look? Il n'y a pas de coiffeurs dans ton bled?

- Il y en a, rit Martin en se libérant de l'étreinte pour saluer Jean-Charles. Mais je n'ai pas eu le temps d'y aller.

- Ni de te raser, d'après ce que je vois.

- Oh ça va, ce n'est pas comme si je réussissais à me laisser pousser la barbe pour de vrai. Tu t'es suffisamment moqué de mes trois pauvres poils comme ça depuis qu'on se connaît.

- Ce n'est pas une raison pour les laisser te défigurer ainsi! Une barbe oui, mais une barbe soignée.

Martin roula des yeux devant les outrances de son meilleur ami et sourit affectueusement à Jean-Charles, qui croulait sous la majorité des sacs et roulait des yeux avec résignation.

- Il n'a pas changé, pas vrai ?

- Oh ça non, confirma le grand brun. Médée, tu peux te bouger les fesses et venir m'aider? Je te signale que je porte ton bordel, là, le mien tenait en une valise cabine.

Le blond agita les doigts avec dédain mais concéda à venir délivrer son mari de son chargement. Attrapant un sac de cuir luxueux et un vanity, Martin le soulagea également et les guida à travers la cohue des parisiens, lyonnais et autres vacanciers tout juste débarqués à la gare TGV d'Aix en Provence. Les congés d'été ne débutaient que dans une dizaine de jours mais déjà, les premiers touristes arrivaient et les trains en provenance du nord de la France affichaient complets. Accoutumé à la foule, il se fraya un chemin facilement jusqu'au parking où la voiture les attendait.

Comme un gosse, Amédée s'empressa de se décharger de ses affaires dans le vaste coffre et avant que son compagnon ne le devance, trottina pour revendiquer la place  à côté de son ami. Martin sourit de ce sans-gêne, terriblement heureux de le retrouver avec ses petites manies et lança un regard compatissant à Jean-Charles, résigné à caser ses larges épaules et ses longues jambes sur la banquette arrière. Il s'installa à son poste de conducteur avec enthousiasme et démarra la voiture, direction Forsallier.

- Où sont les petits? interrogea Amédée à peine sorti du parking. Je m'attendais à les voir avec toi.

- La voiture est trop petite pour nous tous. Et en plus, se taper l'aller-retour à Aix dans ce cagnard n'est pas leur tasse de thé.

Après la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant