Cela faisait bientôt six mois que j'étais bénévole aux restaurants du cœur, six mois que je voyais cette femme épuisée venir chaque semaine avec ses trois jeunes enfants. La semaine passée, je l'avais entendu crier sur eux avant de se mettre à pleurer. Je m'étais alors proposée de les garder gratuitement quand elle en aurait besoin, pour la soulager un peu. D'abord méfiante, elle m'avait finalement proposé de venir jeudi soir.
Le soir dit, je me suis donc retrouvée dans un couloir gelé, entourée d'aboiements incessants et une odeur indéfinissable mais écœurante dans le nez. Elle m'avait fait entrée.
-Vous êtes sûre que vous ne voulez pas être payée ?
-Oui vraiment, lui souriais-je, ça me fait plaisir.
Elle avait ensuite appelé ses enfants. Ils étaient restés contre le mur, intimidés, jusqu'à ce que je sorte trois petits barbapapas en peluche de mon sac. Les voir aussi contents avait dû rassurer leur mère qui m'avait souri et était finalement partie.
Après avoir joué un moment, je les ai couchés. Ou du moins essayé. Je venais de fermer la porte de leur chambre quand un voisin se décida à écouter sa musique à fond. Un des enfants ouvrit la porte.
-Il y a trop de bruits...
-Je vais aller arranger ça, ne t'inquiètes pas. Va te recoucher microbe, dis-je en lui embrassant le front.
J'étais alors sorti pour chercher qui était celui qui trouvait amusant d'écouter Raspoutin aussi tard. La musique semblait venir de la porte juste à côté, j'ai donc sonné. Après avoir longtemps insistée, un homme d'une cinquantaine d'années m'a finalement ouvert. Il empestait l'alcool.
-T'as quoi toi !
-Est-ce que vous pourriez baisser votre musique s'il vous plait ? J'aimerais dormir.
Il me regarda de haut en bas avant de s'arrêter sur ma poitrine qu'il fixa. Souriant avec le peu de dents qui lui restait il me répondit :
-Bien sûr, bien sûr. Viens j'ai un lit si tu veux.
Il se mit sur le côté pour me permettre d'entrer.
-Non merci, je voudrais juste que vous baissiez la musique.
-T'es une coquine toi.
Je m'apprêtais à répéter ma demande quand la porte d'en face s'ouvrit.
-Ferme ta gueule Bastien ! Et éteins ça !
Comme si je n'existais plus, il me bouscula pour s'approcher de l'homme qui venait de crier.
-Tu vas me parler mieux toi !
-Et toi tu vas éteindre cette merde sinon j'appelle la police.
La menace fit son effet et il retourna dans son appartement en maugréant.
-Démocratie mon cul, totalitarisme oui !
Une fois qu'il eut fermé sa porte, je me retournais en souriant vers l'autre homme.
-Merci.
-J'l'ai pas fait pour toi princesse, mon mec commence tôt demain.
Et il claqua la porte.
J'étais seule dans ce couloir terrifiant et le soudain silence était assourdissant. Puis, les aboiements recommencèrent. Je soupirais avant de retourner dans l'appartement.
Je suis vraiment heureuse d'avoir la vie que j'ai.
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Dans ma tête
Cerita PendekMélange de toutes petites histoires plutôt sombres qui me passent par la tête. Tout et n'importe quoi s'y entrechoquent pour former ce livre aux multiples personnalités.