Doux rêve

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Depuis que nous dormons, je ne crois plus rêver.
C'est pour cela que je reste éveillé.
Pouvoir m'imprégner un peu plus d'un cauchemar
Mes rêves sont trop doux, pas assez noirs
Quelque part, je garde espoir d'un soir agité
Où ta bonté ne viendrait m'habiter
Et ta beauté cesserait de laver la sève
Jaillissant des nuisibles de mes rêves
Que tu défigures jusqu'à l'hémorragie
Un pas de plus vers la nécrophagie.
Pourtant de cette engeance, de cette infamie
Naissent guerres, vengeances et famines
Soudoyées par quelques pirates écrivains
Foudroyés sur la mer le lendemain
Or dis-moi, dans ce monde de sang et chaos
Quelle est ma place si ce n'est là-haut,
Près des nuages où repose ton visage
Qui d'un coup rend les chimères si sages.
Pour autant tu ne ramènes pas les pirates
Tués en mer ou par Ponce Pilate
Des poètes renégats voguant affamés
Dont beaucoup ne se rèlevent jamais.
À trop te contempler, j'en perds mon désespoir,
À trop me contenter, tu tues ma gloire.
J'ai navigué si longtemps dans les eaux funèbres
Que des spectres brûlés et hâlés zèbrent
Désormais mes traits saillis par l'air trop saumâtre
Et mes cernes au teint noir-olivâtre.
Les jours étaient moins prospères, les nuits plus mornes
Mais j'aimais les pirates et leurs cornes
Et je suis avec toi là-haut à somnoler
Et les marins ne savent pas voler.
Je n'entends plus ni leurs chants ni leurs sérénades,
À les croire morts et mes jérémiades
S'accordent en un chœur pour incendier mes ailes :
Destin d'Icare or lui n'avait pas d'Elle
Donc je m'évapore loin des flots étiolés
Et tu me fais marin qui sait voler.

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