L'idéologie du coeur

Chapitre 14

Trois ans plus tard.

- Dépêche-toi, Oli, on va être en retard !

Ana court partout dans l'appartement, stressée par cette soirée.

- Du calme, Ana. Pourquoi tu es si stressée ?

- Je ne sais pas, je pense que j'ai juste trop hâte de voir ce que va donner cette cérémonie d'ouverture des JO. Ça va être un truc de dingue ! Je suis tellement heureuse qu'on ait pu avoir des places VIP !

Je la regarde en souriant, amusé par son enthousiasme.

Une fois arrivées sur place, nous sommes impressionnées par les installations énormes qui ont été construites pour les Jeux. Nous sommes toutes les deux éblouies par le travail des organisateurs.

- Mesdemoiselles, vos tickets, s'il vous plaît.

Nous tendons nos tickets, reçus grâce à l'un des contacts d'Ana, et nous nous dirigeons ensuite vers les loges VIP, situées à côté de la loge présidentielle.

- J'ai entendu dire qu'il serait juste à côté du président. Murmure Ana.

Je comprends immédiatement de qui elle parle.

Ana avait découvert ce qu'il s'était passé entre Julien et moi lorsque une vidéo de notre dispute avait fuité sur les réseaux. En voyant les images, elle s'était précipitée chez moi, me donnant l'opportunité de tout lui raconter. Sa présence et son soutien avaient été essentiels pour moi, et je ne sais pas ce que j'aurais fait sans elle.

- Je ne le cherche pas, Ana. Je suis juste curieuse de savoir combien certains ont payé pour être assis ici, alors que nous, nous avons eu ces places gratuitement. Je ne comprends toujours pas comment tu as pu les obtenir aussi facilement.

- Olivia, il faut que je te dise...

Soudain, un tonnerre d'applaudissements retentit, annonçant le début du spectacle. Je me lève pour applaudir à mon tour, impatiente de découvrir le show qui nous attend ce soir.

Après plusieurs heures de spectacle, je décide de me rendre au bar pour m'hydrater un peu, après avoir passé mon temps à crier pour encourager les sportifs. Une fois arrivée, je prends deux verres, un pour moi et un pour Ana, et tombe nez à nez avec Lou. Ça fait des années que nous ne sommes plus vue depuis ce qu'il s'est passé entre Julien et moi.

- Olivia ! elle me saute dans les bras.

- Lou ! Comment tu vas ?

- Très bien, j'ai enfin été admise dans cette école de mode dans laquelle je voulais aller ! Et toi comment tu vas ? C'est vrai ce qu'on raconte sur toi, tu as quitté la politique ?

- Oui, j'ai décidé de me concentrer sur d'autres projets cette année. Je travaille dans un centre pour jeunes dépendants, on les aide à se réinsérer dans la société. C'est pas un travail facile, mais c'est extrêmement gratifiant.

- Eh bien, je suis heureuse que tu aies trouvé ta voie. Tu es rayonnante en tout cas ! Qui va bien pouvoir remettre mon frère en place maintenant que tu es partie ? Dit-elle en rigolant.

- Ho ne t'inquiète pas, j'ai légué ma place à une vraie lionne, alors je ne m'en fais pas pour ça ! Je rigole en pensant à Ana qui ne laissera aucune chance à ces adversaires pour en placer une lors des débats.

Elle rigole.

- Ana, c'est ça ? J'ai déjà beaucoup entendu parler d'elle. Bon, il faut que je te laisse, le final va bientôt commencer et je ne veux absolument pas rater ça.

- Passe une belle soirée, Lou.

- Toi aussi, ma belle !

De retour à notre place, j'explique la rencontre que je viens de faire à Ana mais celle-ci semble nerveuse. Avant que je puisse lui demander ce qui la tracasse, les lumières s'éteignent presque complètement, plongeant le stade dans l'obscurité. Une douce mélodie commence à s'élever dans l'air, et je reconnais immédiatement les premières notes de cette chanson que j'aimais tant.

Mon cœur se serre en entendant Céline Dion chanter les premières paroles de « l'hymne à l'amour ».

Je tourne la tête, le regard cherchant quelque chose, quelqu'un... Et c'est alors que je le vois. Julien est là sur son siège, les yeux rivés sur moi.

Il m'observe déjà, son regard rempli d'un mélange de sentiments que je ne peux pas entièrement déchiffrer. Il y a de la tristesse, du regret, et quelque chose de plus profond, de plus doux.

Ana se penche vers moi, le regard fuyant.

- Oli... il faut vraiment que je te le dise, c'est Moran qui m'a envoyé les places.

Je reste silencieuse, les larmes aux yeux. Je croise de nouveau son regard, et cette fois, je comprends ce qu'il veut dire. C'est un adieu, un dernier au revoir entre deux personnes qui se sont aimées. Il se contente de me regarder, avec ce regard lourd de tout ce qui aurait pu être, mais qui ne sera jamais.

Je prends une profonde inspiration, laissant le poids de ces années de souvenirs se déverser doucement. Chaque instant partagé, chaque rire, chaque dispute me revient en mémoire. La complexité de notre histoire se résume désormais à ce simple regard, un langage silencieux qui dit tout ce que nous n'avons jamais pu exprimer.

Et pour la première fois en trois ans, je lui rends son regard, sans colère et sans rancune. Juste une tristesse et une tendresse partagées.

Lentement, je détourne les yeux, laissant la musique me bercer. C'est la fin. La véritable fin, cette fois-ci. Et même si c'est douloureux, une sorte de paix m'envahit.

La chanson s'achève, les lumières se rallument, et je sais que c'est le moment pour nous deux de continuer nos vies, séparément, mais avec un dernier souvenir en commun, doux-amer, qui restera gravé en nous à tout jamais.

Fin.