Chapitre 5

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J'esquive aisément chaque soldat, le village est en feu et les paysans se regroupent en masse dans les grandes rues, ce qui m'offre une bonne couverture. Arrivé devant les grandes portes je saute dans un chariot qui s'échappe à toute vitesse loin des flammes. Je me cale confortablement entre deux bottes de foin placées au fond du véhicule et masque mon visage le plus possible en ramenant mes jambes à mon cou.

Je souffle, soulagé de m'éloigner de cette prison. J'ai l'impression d'y avoir été retenue pendant des mois. Je vais pouvoir reprendre ma vie auprès des autres. Je n'ai aucune idée de ce qui se passe dans la basse-ville, j'espère seulement que tout le monde va bien et que la garde n'a pas trouvé notre camp. Mes pensées se dirigent inlassablement vers Nate qui doit être mort d'inquiétude, est-ce qu'il me cherche ? Je prie que non, on pourrait s'éloigner sans s'en rendre compte.

Et Jake ? Alexander n'a pas dû cesser de le sermonner depuis ma disparition, c'est le plus vieux, c'est celui qui veille sur nous. Ambrose doit être déçu, Alec ne rie sûrement plus et Loucka à dû pleurer. Tout est de ma faute.

La lune est toujours haute dans le ciel lorsque je saute de la charrette qui traverse une forêt, je ne peux plus prendre le risque de suivre le vieil homme, il doit sûrement se diriger dans une ville voisine. Je m'éloigne du chemin de terre et m'enfonce dans les bois à la recherche d'une quelconque lumière qui pourrait m'indiquer que mon quartier n'est pas loin. Je continue d'avancer même si mes pieds butent sur des branches à cause de la fatigue, mes yeux se ferment quelques fois mais je ne dois pas m'arrêter. Je ne suis pas assez loin. Je marche pendant une petite heure et me laisse tomber contre un tronc d'arbre, je suis épuisé. Je n'arrivais pas à fermer l'œil lorsque j'étais dans cette cage, sans parler de la chaleur étouffante qui me pompait deux fois plus d'énergie.

Ma tête bascule et j'observe les étoiles. Elles m'ont l'air si paisibles, flottant en dessus de nous. J'aimerais savoir lesquelles vous représentent pour que je puisse les admirer. J'espère que vous ne m'en voulez pas, mes chers parents. Je pense chaque jour à vous et si vous suivez ma route, vous verrez que je n'arrête pas de me battre pour votre vengeance. Je n'arrêterai jamais, vous serez fier de moi je vous le promet.

J'expire une nouvelle fois et quelque chose de chaud et humide coule le long de ma joue gauche. Je cache si bien ma souffrance depuis qu'ils ne sont plus là, alors pourquoi je me sens si faible lorsque la nuit tombe. C'est comme si la lune réveillait mes démons ou que l'obscurité s'emparait de moi pour m'engloutir un peu plus.

Le chant d'un rouge gorge fait écho et le soleil m'éblouit, je me suis assoupie. Je prends quelques instants et concentre mon attention sur la nature qui m'entoure. Le bruit des vagues me fait subitement ouvrir les yeux, je ne les avais pas entendu hier soir. Je me relève et suis le son du cours d'eau mêlé au vent qui tourmente le feuillage des arbres. Je slalome entre eux en courant, les oiseaux s'envolent sur mon passage mais je ne m'en préoccupe pas. Une grande rivière se dresse devant moi, le courant est fort et l'eau cogne contre les roches qu'elle contient. Je me précipite et tombe à genoux en joignant mes mains pour les tremper dans celle-ci. Une fois désaltéré j'observe les environs, je ne sais pas où je suis et je ne sais même pas quelle direction prendre. J'ai l'impression que rien ne pourrait être pire.

Le feu ne s'est pas propagé dans la forêt ils ont dû l'éteindre à temps, même si ma tenue n'y a pas résisté, elle est brûlée aux extrémités. Ma capuche est enfoncée sur ma tête et mon visage est couvert de suie quand j'aperçois enfin un village. Je m'avance prudemment sur le chemin principal et certains me dévisagent sur mon passage, mon apparence actuelle ne doit pas inspirer la confiance. Je traîne des pieds, affamé. J'ai dû m'enfoncer un peu trop loin dans la campagne pour arriver ici, je doute même que la garde connaisse cet endroit, il me semble perdu dans l'espace et dans le temps. Certains enfants me coupent la route en essayant de s'attraper, des femmes leur crient d'arrêter et de venir manger. Mon ventre fait un drôle de bruit, qu'est-ce que j'ai faim. Le village est constitué de petites maisons en bois avec un toit en chaume, alignées le long des chemins de terre qui le constituent. De nombreux jardins et fleurs entourent les habitations, donnant un côté plus accueillant.

𝐋'𝐞́𝐭𝐫𝐞𝐢𝐧𝐭𝐞 𝐝𝐞𝐬 𝐜𝐨𝐧𝐭𝐫𝐚𝐢𝐫𝐞𝐬 {bxb}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant