Chapitre 11✓

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La nuit était tombée depuis longtemps lorsque Francesca insista pour que je l'accompagne chez Junior. Nous avions passé la soirée ensemble, riant et parlant de tout et de rien. Mais plus la soirée avançait, plus je me sentais mal à l’aise. Chaque mot, chaque geste me ramenait à la réalité : Francesca ne savait rien, et moi, je cachais un secret qui me rongeait.

— Vieni, Kemishe, reste un peu plus. Ce n’est pas tous les jours que je suis ici, dit Francesca, en me prenant la main avec enthousiasme.

Comment refuser ? Nous arrivâmes devant la grande maison des Witcher. L’air frais de la nuit ne faisait qu’accentuer le sentiment d’oppression que je ressentais. Je n’avais pas vu Junior depuis ce moment à l’école, et je ne savais pas comment gérer la tension qui subsistait entre nous. Quand Francesca poussa la porte, un frisson me parcourut. J'étais dans la maison de celui qui hantait mes pensées, aux côtés de sa fiancée, et la tension n'était plus supportable.
La maison était aussi luxueuse que je l'avais imaginée, mais elle avait quelque chose de froid. Peut-être était-ce l'ambiance glaciale entre Junior et moi, ou la présence omniprésente de sa mère, Madame Witcher, qui m'avait toujours intimidée.

Nous montâmes à l’étage, Francesca bavardant sans cesse. Nous étions sur le point d’entrer dans la chambre de Junior quand une voix grave et autoritaire s’éleva derrière moi.

— Francesca, il est tard, ne devrais-tu pas rentrer te reposer ?

Je me retournai pour voir Madame Witcher, debout dans l’encadrement de la porte, me regardant avec un mélange de suspicion et de froideur. Son regard se posa sur moi, et l'air se fit plus pesant. Je sentais que ce n'était pas une simple remarque. Il y avait quelque chose dans son regard, un jugement silencieux, comme si elle savait tout ce que je pensais, tout ce que je ressentais pour Junior.

—Buona sera, Madame Witcher, répondit Francesca, toujours aussi légère, ignorant la tension palpable dans la pièce. Nous étions juste venues dire bonsoir à Junior.

— Ah, bonsoir. Je vois, dit-elle d'une voix polie mais tranchante. Ses yeux glissèrent vers moi, me scrutant de la tête aux pieds. Kemishe, n'est-ce pas ? Je ne me souviens pas de t’avoir souvent vue ici… Tu viens d’une famille modeste, je crois. Comment se fait-il que tu sois aussi… proche de Francesca et Junior ?

Son ton, bien que courtois, était empreint d'une condescendance à peine voilée. Mon cœur battait à tout rompre, mais je refusais de me laisser déstabiliser.

— Oui, Madame, répondis-je en essayant de rester calme, la gorge serrée. Francesca et moi avons beaucoup sympathisé à l’école.

Elle esquissa un sourire froid, un sourire qui ne parvint pas à atteindre ses yeux.

— Je vois. Eh bien, tu sais, Francesca est une jeune fille spéciale. Très précieuse pour nous… Junior aussi, bien sûr. Nous faisons très attention aux personnes qui les entourent.

Le sous-entendu était clair. Elle me voyait comme une menace, ou tout du moins comme quelqu’un qui n’avait pas sa place ici.

Francesca, inconsciente de la tension entre nous, sourit joyeusement.

— Non ti preoccupare, Kemishe est la meilleure ! On s’amuse tellement ensemble, n'est-ce pas, Kemishe ?

Je souris faiblement, mais les mots de Madame Witcher résonnaient encore dans ma tête. Je savais que ma présence ici n’était pas la bienvenue, et que la mère de Junior ferait tout pour me le rappeler.

Francesca prit ma main pour m’entraîner dans la chambre de Junior, mais avant que je ne puisse la suivre, Madame Witcher posa une main ferme sur mon bras.

— N'oublie pas, ma chère, fit-elle à voix basse, le regard perçant, il y a des mondes différents. Et parfois, certaines personnes ne sont pas destinées à se mélanger.

Je la regardai dans les yeux, mon cœur se serrant dans ma poitrine. Cette soirée n’était qu’un rappel cruel de la place que j’occupais dans la vie de Junior — ou plutôt, de celle que je n’occupais pas.











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Veini* Tu viens
Buona sera*Bonne soirée
Non ti preoccupare *Ne t'inquiète pas





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