Elle était splendide. Une œuvre d'art à elle toute seule. Son âme était peinte par les Dieux et son coeur recelait de merveilles. Les grains de beauté sur sa peau dansaient au rythme des galaxies et des milliers de soleils se couchaient dans ses yeux chaque soir. L'univers lui-même, s'il l'avait voulu, n'aurait pu parfaire une telle entité avec autant de passion et d'audace réunies dans un même corps et imaginées dans un même esprit.
Et si on m'avait demandé de la décrire à travers le ciel j'aurais désigné les étoiles. J'aurais pointé du doigts ses épaules fines parsemées d'éclats de tendresse ainsi que son sourire d'arlequin qu'on pouvait facilement croire enchanté.
Puis elle a tourné son regard vers moi la toute première fois et nos yeux se sont croisés. Alors, j'ai su. J'ai su qu'elle était celle que je cherchais depuis toujours.
Et lorsque par un mystérieux hasard elle en était venue à s'enquérir de ma couleur préférée, j'ai tout simplement acquiescé lorsqu'elle a soupçonné un orange tempéré. Le orange, mais pas n'importe lequel, est alors, et à jamais, devenu la seule teinte valable à mes yeux.
Elle était cette part de moi-même que je me refusais à admettre, à comprendre et à croire. Elle était l'exact opposé de ce que j'étais à l'époque. Elle représentait tout ce que j'avais peur, par convention, de devenir, et il m'arrivait souvent de croire davantage en son ambition qu'en moi-même. Cependant, jamais elle n'a su accepter ce fait, car peu importe l'admiration que je lui portais, elle veillait, telle un miroir, à me renvoyer l'image dont je la gratifiais.
J'avais pris l'habitude de la regarder peindre pendant des heures ses œuvres et écrire ses histoires. Je l'écoutais les narrer jusqu'à tard dans la nuit puis ensuite toute endormie, elle venait coller ses mains pleines de peinture contre moi. Chaque soir le orange dominait et chaque nuit j'apprenais à aimer de plus en plus cette fatalité.
J'aimais sa façon de tourner sa plume entre ses doigts fins en attendant de trouver l'inspiration, son ton lorsque ses personnages prenaient la parole et son sourire lorsqu'elle contemplait mon expression après ses tirades. Je refusais de paraître désintéressé alors doucement je commençais à interpréter. Alors, les dizaines de personnages dont je faisais la connaissance chaque samedi à minuit me tenait compagnie même durant les après-midis.
J'aimais son regard sur mon dos tourné qui disait : tu ne me vois pas, mais quoiqu'il arrive je suis prête à intervenir pour te protéger. J'aimais le parfum de ses cheveux au sortir de la douche et la couleur de ses mains bronzées. J'aimais l'expression qu'elle avait lorsqu'il pleuvait et qu'elle s'installait dans son fauteuil pour écrire ainsi que la peinture sur ses joues lorsqu'elle oubliait où elle était.
J'aimais la sensation de sa bouche contre la mienne et l'odeur de son amour lorsque nous nous enlacions. J'aimais cette tâche qu'elle avait le long de la mâchoire et j'adorais enrouler mes doigts dans ses mèches pendant qu'elle s'interrogeait sur la nature de la vie.
J'aimais sa façon d'être et sa propension à devenir. J'aimais sa facilité à vivre et sa difficulté à détester. J'aimais ces expressions lorsqu'elle s'extasiait et celles qui la défiguraient lorsque je lui refusais ses baisers.
J'aimais la courbure que formait son dos lorsqu'elle travaillait et la façon dont elle tenait à écrire ses idées à la main plutôt qu'à la machine. Ses doigts rongés par l'encre me rappelait constamment cet univers qu'elle était. Même constellée de tâches, elle semblait vraie, jamais elle ne m'est apparue déguisée.
J'aimais tout ce qu'elle était même lorsqu'il m'arrivait de la détester. Il m'était impossible de lui en vouloir car jamais elle n'était rancunière. Jamais elle ne me laissait le temps de me sentir coupable avant elle. Jamais elle ne m'a tourné le dos même quand je commençais à lui tourner le mien.
Jamais je n'ai vu un coeur si pure et si beau. Son regard naïf était inspirant et son air extasié encourageait nos délires qui durait la nuit entière. Je prenais ses joies et ses peines et m'en faisais une couverture douce et soyeuse. Elle prenait son sourire pour venir en coller un sur mes lèvres. Elle comprenait les vagues qui secouaient mon âme et j'aimais le bruit de son navire qui approchait les rivages de mes larmes.
Les raisons qui la poussaient à être étaient celles qui me permettaient de devenir. Mais maintenant, elle n'est plus et elle ne deviendra plus jamais. Elle appartient au passé et seul mon souvenir lui permet encore d'exister. Elle qui avait l'habitude de constamment devenir est condamnée désormais à errer au passé.
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Les rêves ne meurent jamais
Poesía*** Les personnages et le monde dans lequel vous vous apprêtez à entrer m'appartiennent. Merci de ne pas faire de plagia. Bonne lecture ! *** "Il fut un temps, j'écrivais parce que je voulais être quelqu'un d'autre, désormais j'écris pour retrouver...