Not After Us, Only You - Tome 1

Episode 4

Épisode 4 : Qui est-ce ?

1

La nuit est tombée sur les collines d'El Paso, plongeant Comanche Peak dans l'obscurité la plus totale. Après plus de dix minutes de course effrénée à travers les sentiers poussiéreux, je me retrouve enfin face au portail qui mène à ma maison.

Je n'ai pas le temps d'utiliser mon badge. En réalité, si mais cela me demanderait de non seulement prendre une pause pour l'ouverture et une remarque de John — si sa matinée c'est bien passée — dans le cas contraire, une punition divine sur l'entraînement. Sans hésitation, je grimpe le grand rectangle de métal glacé, mes doigts s'agrippant fermement aux barreaux.
Mon père saura en regardant les caméras que ce n'est pas un intrus. Si je me dépêche, je pourrai désactiver l'alarme avant qu'elle ne se déclenche.

Mon souffle est bruyant, haletant, comme celui d'un cheval après une course folle dans les collines arides de Franklin High. Pourtant, quelque chose me fait stopper net.

Face aux grandes façades de ma maison, je suis soudainement prise d'un drôle de frisson. Tout semble figé à l'intérieur de la bâtisse, comme un véritable manoir hanté. Aucune lumière visible, aucun bruit. Tout est vide.
Les grandes fenêtres reflètent les premières étoiles du ciel, mais à travers, l'intérieur paraît étrangement mort.

L'absence de la moto de mon père, — alors qu'il est censé être là les lundis après-midi, son jour de repos — ne fait qu'accentuer cette sensation de malaise. Même si au fond, une part de moi tente de se rassurer : c'est John, il sait se débrouiller. J'avoue, le fait que son planning aurait pu changer du jour au lendemain me ferait doucement sourire si je n'avais pas cette petite voix, me hurlant à l'arrière de ma tête ; "Il y a un problème, Alerte Rouge".
Pour cet homme, ses plans ne sont pas simplement une routine. Non, c'est bien plus que ça. Pour lui, c'est presque une religion. Il agit comme si la fin du monde allait s'abattre sur nos têtes à la moindre modification, comme si dix minutes de retard pouvaient déclencher l'apocalypse. Un vrai psychorigide.

La seule hypothèse logique serait que John ait eu un accident, mais même là, ma tête refuse de l'accepter. Mon père n'a jamais d'accident. C'est le genre de type dont la carrière de pilote aurait dû être son vrai métier, tellement il maîtrise le volant et les deux roues. Il suffit de le voir dans un embouteillage avec sa bécane : on dirait qu'ils ne font qu'un. Avec lui, je n'ai jamais eu peur.

Et si quelqu'un lui était rentré dedans ?

Rien que d'y penser, j'ai la chair de poule, mais cette petite voix dans ma tête ne cesse de me harceler. C'est vrai... S'il lui était vraiment arrivé quelque chose, il reviendrait, comme toujours, avec son casque dans une main et son sac de courses dans l'autre — je ne vois pas d'autre raison pour laquelle il serait sorti. Il marcherait vers le porche, la tête baissée, ses cheveux balayés par le vent, se demandant comment il aurait pu faire pour éviter "l'incapable" qui lui est rentré dedans — encore une fois, ce genre de chose n'arrive jamais.
Puis, lorsqu'il m'aurait surprise en train d'épier son arrivée, il aurait esquissé un sourire en coin, comme si de rien n'était. Dans un autre monde, je me serais moquée de lui, taquinant son air faussement détendu. Mais en réalité, je serais restée là, immobile, les mains croisées dans le dos, à l'attendre pour dîner.
Il est comme ça, et je ne peux pas demander à John de changer pour des valeurs qu'il ne connaît même pas. Après tout, moi non plus, je ne les comprends pas vraiment. Nous sommes tous deux coincés dans nos propres réalités, et il serait vain d'attendre une transformation qui n'arrivera jamais.