Les sœurs Belcourt. Tom 1 Promesse amères

Chapitre 21 Seraphena

Le soir tombait lentement sur le manoir, la lumière dorée du soleil couchant filtrant à travers les grandes fenêtres, baignant les murs de nuances chaudes. Pourtant, malgré la beauté du spectacle, un sentiment de malaise s’était installé en moi. J'étais tiraillée entre l'idée séduisante d'une alliance avec Damon et la méfiance que je lui portais encore. Cette proposition d'unir nos forces pour affronter nos ennemis communs me troublait. J'avais toujours été indépendante, une battante, et l'idée de dépendre de lui, même temporairement, me donnait des frissons.

Damon se tenait devant moi, l'air sérieux, son regard perçant rivé sur moi. Son attitude calme et déterminée ne faisait qu'accentuer la confusion.

-Nous devons être unis pour faire face à ceux qui nous menacent, avait-il déclaré, sa voix grave résonnant dans la pièce comme une promesse ou une menace, je ne savais plus vraiment.

Je le regardai, le scepticisme gravé sur mon visage. Je ne pouvais m'empêcher de penser à tout ce qui s'était passé, aux jeux de pouvoir, aux manipulations. L’idée d’entrer dans une alliance avec lui, même pour une cause juste, était troublante.

— Tu penses que je vais te faire confiance après tout ce qui s'est passé ? demandai-je, ma voix trahissant un mélange d'agacement et d'incertitude.

Il haussait les épaules avec une nonchalance qui m'exaspérait.

— Ce n’est pas une question de confiance, mais de survie, répondit-il, son ton implacable, comme s'il avait déjà anticipé ma réaction.

J'étais bien consciente des enjeux. Les menaces qui pesaient sur nous étaient réelles, et je ne pouvais pas ignorer les signes alarmants qui annonçaient une tempête. Mais cela ne signifiait pas que j'allais céder ma liberté ou mon autonomie. La vie que j’avais construite, malgré les circonstances, était précieuse à mes yeux.

—  Donc, tu veux que je te suive dans ton plan ?  répliquai-je, croisant les bras, essayant de me donner une contenance.  Comment peux-tu être sûr que nous ne serons pas trahis encore une fois ?

Il ne répondit pas immédiatement, semblant peser mes mots. Je pouvais voir qu’il était en train de réfléchir, cherchant à formuler une réponse qui, espérait-il, apaisait mes inquiétudes.

—  Parce que nous avons quelque chose que nos ennemis n'ont pas : nous savons comment nous battre,  finit-il par dire, sa voix prenant une teinte plus douce, presque persuasive.

Je restai silencieuse, son regard ne quittant pas le mien. Ses yeux semblaient chercher une réponse, un signe de ma part qu'il pouvait espérer. Je n’étais pas prête à lui donner cette satisfaction. Je savais que je devais faire preuve de prudence, mais l’idée de nous unir, même temporairement, pour un objectif commun me semblait inévitable.

Le conflit en moi grandissait. Chaque jour passé à ses côtés me dévoilait des facettes que je n’avais pas soupçonnées. Il était plus complexe qu'il n'y paraissait, et bien que je ne puisse pas lui faire entièrement confiance, je savais qu'il avait ses propres raisons d'agir. Il n’était pas un monstre, mais un homme piégé dans un système qui le dépassait.

—  Et qu'est-ce que tu proposes exactement ?  demandai-je, feignant l'indifférence alors que mon cœur battait la chamade à l'idée de ce qui pourrait suivre.

— Je propose que nous formions une alliance temporaire,  répondit-il, le regard sérieux.  Un partenariat pour contrer ceux qui veulent nous voir tomber. En travaillant ensemble, nous pourrons protéger nos intérêts respectifs.

L'idée d'une telle collaboration me fascinait autant qu'elle me terrifiait. Je savais que je n'avais pas le choix. Je pouvais continuer à me battre seule, mais cela risquait de me coûter cher. Dans un monde où chacun joue sa propre partie, une alliance avec lui pourrait être ma seule chance de survie.

—  Qu’est-ce qui garantit que tu ne me trahiras pas à la première occasion ?  rétorquai-je, un défi dans ma voix.

Il soupira, comme si mes doutes l'agaçaient.

— Je ne suis pas ici pour te trahir, Seraphena. Je n'ai pas besoin d'ennemis supplémentaires. Nous avons déjà assez de problèmes. Mais si tu continues à te battre seule, je crains que tu ne sois finalement la perdante dans cette histoire, déclara-t-il, son regard inébranlable.

Ses mots résonnèrent en moi comme un glas. Je savais qu'il avait raison, mais la perspective de lui accorder ma confiance restait un obstacle immense à franchir. Comment pourrais-je me laisser entraîner dans ce jeu dangereux sans craindre pour ma sécurité ?

Je pris une grande respiration, mon esprit en ébullition. La situation était complexe, et je ne pouvais ignorer les réalités qui l'entouraient. Damon et moi avions un ennemi commun, et ce dernier ne manquerait pas d'agir. Accepter sa proposition serait comme plonger dans l'inconnu. Mais avais-je vraiment le choix ?

—  D'accord, je suis prête à envisager cette alliance, dis-je finalement, ma voix ferme malgré la tremblante incertitude qui me parcourait.

Damon marque un sourcil, étonné.

— Tu veux dire que tu es d'accord ? demanda-t-il, un mélange de surprise et de satisfaction dans sa voix.

— Je dis simplement que je vais considérer ta proposition. Mais sache que je ne te ferai pas confiance aveuglément. Nous jouerons chacun notre jeu, répondis-je, déterminée.

Il hocha la tête, respectant ma décision tout en sachant qu'il avait obtenu un avantage. Nous nous trouvions à un carrefour, et bien que je ne sois pas entièrement à l'aise avec cette nouvelle dynamique, je sentais qu'une alliance, même fragile, pouvait nous offrir une chance de sortir vainqueurs.

—  Alors, commençons à tracer notre chemin,  déclara-t-il, un léger sourire aux lèvres, et je ne pouvais m'empêcher de penser que ce partenariat, aussi inattendu soit-il, marquerait le début d'une nouvelle ère dans notre relation.

J'espérais que notre collaboration serait à la hauteur des défis qui nous attendent. L'inconnu était terrifiant, mais je savais que c'était peut-être notre seule chance de faire face à ce qui s'annonçait. Les lignes entre l'ennemi et l'allié étaient floues, mais une chose était certaine : je n'étais plus seule dans cette lutte, et même si cela me terrifiait, il était temps d'accepter cette étrange alliance.