Chapitre 15 Seraphena

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Je n'avais pas prévu de le voir ici, près de la cheminée, au milieu de la nuit. La lueur des flammes danse autour de lui, projetant des ombres sur son visage impassible. Pourtant, malgré mon intention de rester distante, quelque chose m'attire vers lui. C’est probablement la curiosité ou peut-être un instinct désespéré de vouloir comprendre l’homme avec qui je suis désormais liée par ce mariage.

Lorsque je me lève pour m'approcher, il me fixe avec cette intensité qui me fait à la fois frissonner et me sentir vulnérable. J'ai toujours vu en Damon un adversaire, un homme froid et pragmatique, mais en ce moment, quelque chose a changé. L’atmosphère entre nous est différente, presque palpable. Il semble attendre une réponse, et il y a quelque chose de nouveau dans son regard, une lueur de curiosité qui me pousse à me livrer.

—  À quoi penses-tu, Seraphena ?  me demande-t-il, brisant le silence.

Je prends une profonde inspiration. C'est maintenant ou jamais.

—  À ce que tout cela signifie. À ce que nous sommes,  réponds-je avec sincérité.

Il me regarde, et pour la première fois, je vois une étincelle de compréhension dans ses yeux, comme s'il percevait enfin la profondeur de mes tourments. C’est un moment fragile, et je sens que je dois en profiter. Peut-être que nous sommes tous deux fatigués de cette lutte constante, de ce jeu de pouvoir qui nous éloigne.

— Nous sommes deux personnes qui tentent de sauver ce qui leur reste, dit-il finalement, sa voix calme mais empreinte d’un poids que je n’avais pas remarqué auparavant.

Sa réponse me touche plus que je ne l'aurais imaginé. Je reste silencieuse, digérant ses mots. En l’entendant, je réalise qu’il y a quelque chose de profondément humain derrière cette façade glaciale. Cet homme, que je pensais insensible, semble porter ses propres blessures, ses propres cicatrices.

Je me souviens des moments où j'ai jugé sa froideur, le considérant comme un être sans âme. Mais maintenant, en face de lui, je comprends qu’il cache quelque chose de bien plus complexe. Est-il vraiment aussi dénué de sentiments que je l’avais imaginé ? Ou essaie-t-il simplement de ne pas se laisser submerger par les défis qui l’entourent ?

— C'est étrange, n'est-ce pas ?  dis-je, cherchant à briser la tension qui s'est installée entre nous.  Nous sommes ici, unis par un mariage qui n'est rien d'autre qu'un contrat, et pourtant… Je m'arrête, incapable de mettre des mots sur la suite.

Il incline légèrement la tête, son intérêt éveillé.

— Pourtant ? relance-t-il, m'incitant à continuer.

— Pourtant, il y a une sorte de… connexion. Je le dis presque à voix basse, comme si l’admettre rendrait cela trop réel.

Il hausse un sourcil, visiblement surpris par mon affirmation.

— Une connexion ? répète-t-il, presque incrédule. Tu es consciente que cela pourrait être dangereux ?

Je lui lance un regard défiant, mais je sens que mes mots sont pleins de vérité.

—  Peut-être, mais je préfère cette connexion à l’indifférence. Je ne veux pas vivre une vie de faux-semblants, Damon.

Il semble réfléchir à mes mots, son expression se radoucissant légèrement.

— Je ne suis pas sûr que je sois capable de cette proximité, Seraphena. J'ai toujours pensé que la distance était préférable. Moins de douleurs, moins de complications.

Sa confession m'étonne. Il admet avoir choisi la solitude, mais cela me fait me demander : qu'est-ce qui l'a conduit à cette décision ? Je ressens un élan de compassion envers cet homme qui, malgré son apparente force, semble si fragile.

— Je comprends, mais ne crois-tu pas que l'amour, même dans sa forme la plus imparfaite, pourrait être une source de force ?

Il me regarde, la surprise dans ses yeux. J'ai l’impression qu'il essaie de déchiffrer mes intentions, mes véritables motivations. Peut-être que je vais trop loin, mais je me sens audacieuse.

— Je veux dire, ce mariage n’a pas à être un fardeau. Nous pouvons choisir d’en faire quelque chose de plus.

Sa réponse tarde à venir, et je me demande si j'ai franchi une ligne. Puis il parle, lentement, comme s’il pesait chaque mot :

—  Je ne sais pas si je peux m'engager dans cela, Seraphena. J'ai été déçu, trahi.

Je vois une lueur de douleur passer dans son regard.

— Ce n’est pas facile pour moi non plus, Damon. Je ne voulais pas être ici, mais maintenant que je le suis, je veux essayer. Je veux comprendre ce que nous sommes réellement.

Il semble considérer mes mots, et je peux voir la lutte qui se joue en lui. Je sais que je prends un risque en ouvrant ainsi mon cœur, mais je ne peux pas continuer à vivre dans la méfiance. L'idée d'un mariage sans affection, sans respect, me fait mal.

—  Peut-être que nous pourrions apprendre à nous connaître,  propose-t-il finalement, la voix plus douce.

C’est un pas en avant, même s'il reste timide. Je suis encouragée par cette ouverture, mais j'ai également peur de ce que cela pourrait signifier.

— Je serais d’accord avec ça. Mais cela signifie que nous devons être honnêtes l’un envers l’autre, même si cela implique de partager nos blessures, nos peurs.

Je vois la tension se relâcher légèrement dans ses épaules. Peut-être que cet échange inattendu pourrait devenir le début d'une nouvelle compréhension entre nous.

— D'accord,  dit-il enfin, un petit sourire se dessinant sur ses lèvres.  Commençons par le début.

Ce moment, même si je sais qu'il n'est qu'un début, est porteur d'espoir. Peut-être que derrière la façade de cet homme se cache un cœur qui, tout comme le mien, aspire à quelque chose de plus grand. Alors que nous continuons à parler, je réalise que cette conversation pourrait bien être le point de départ d'une alliance inattendue, une chance de transformer ce mariage en quelque chose qui dépasse le simple contrat. Une opportunité de guérir ensemble.

Les sœurs Belcourt. Tom 1 Promesse amèresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant