LA MAUDITE

𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝟷𝟷 | 𝙼𝚊 𝚏𝚊𝚞𝚝𝚎

Bianca

Tokyo
18h34

Quand, depuis l'enfance, on n'a jamais reçu d'amour ni d'affection, il est naturel de les confondre.

Après plusieurs heures de réflexion, j'ai compris que, lorsqu'il s'est montré gentil avec moi, j'ai pensé que je commençais à développer des sentiments pour lui. Mais ce n'était pas le cas...

Enfin, je crois...

Et ce baiser...

Aucun garçon ne m'avait jamais touchée ni montré le moindre désir, alors je voulais simplement savoir ce que cela faisait... le goût de ses lèvres sur les miennes. Mais c'est mal. Il est déjà engagé ; je n'aurais jamais dû ne serait-ce qu'imaginer cela.

Assise sur une des chaises hautes du comptoir de la cuisine, je regarde Nour cuisiner.

Je suis seule dans la villa ; Sota est parti en voyage depuis trois jours, et Sakura est à l'université depuis ce matin à 8h. Je crois qu'elle étudie le droit.

Moi, j'ai continué mes études à l'orphelinat, où j'ai obtenu mon bac, mais je ne sais toujours pas ce que je voudrais faire.

Déjà 2 semaines que je suis ici.

Nour doit être dans la trentaine. Elle porte toujours des vêtements très couvrants et un voile sur la tête, et sa peau est mate. Elle est magnifique.

Je tape mes ongles sur le comptoir pour attirer son attention. Ses yeux bruns se lèvent et rencontrent mes yeux bleus.

— Oui ? me demande-t-elle.

J'écris rapidement la question qui me tourmente depuis notre première rencontre :

« J'ai remarqué que tout le monde s'incline devant Sota, sauf vous. Je me demandais pourquoi. »

J'espère ne pas être indiscrète ; je suis simplement curieuse. Elle me sourit avant de commencer son explication.

— Dans ma religion, il est interdit de s'incliner devant quelqu'un d'autre que notre Seigneur. Mais j'ai un immense respect pour Monsieur Suzuki.

Je comprends.

Je ne connais rien aux croyances, mais j'aimerais beaucoup en apprendre davantage sur sa religion.

« A-t-il fait quelque chose pour mériter votre respect ? »

— Il m'a sauvé la vie, répond-elle d'une voix teintée de nostalgie.

Il lui a sauvé la vie ?

Je m'apprête à lui demander comment, mais je suis interrompue par la porte d'entrée qui s'ouvre sur Sota, suivi d'un homme.

— Je vous en prie, entrez, l'invite Sota en désignant le salon.

Je me lève de ma chaise et m'approche d'eux, observant l'homme. Il doit être de la même taille que Sota, avec des cheveux bruns un peu désordonnés et des yeux...

Ils ont la même couleur que les miens.

L'homme se tend en me voyant, et ses yeux me détaillent de la tête aux pieds.

Mais qui est-il ?

— Bianca, je te présente Luke, dit mon tuteur.

La voix de Sota me sort de ma contemplation. Luke me tend la main, légèrement tremblante.

— Bianca..., murmure-t-il, la voix un peu vacillante.

Que se passe-t-il ?

Je regarde sa main sans savoir quoi faire. Quel est ce sentiment étrange que je ressens ? J'ai à la fois envie de serrer cet homme dans mes bras et de lui faire du mal.