Les maux de Fanta

Chapitre 5 - Kady se libère 1/5

Il fait froid. Où suis-je ? J'ai peur. « Kady, où es-tu ? » Kady n'eut pas le temps de répondre que sa belle-mère l'avait déjà attrapée et jetée au sol. « Kady, ne t'ai-je pas dit de refaire la lessive ce matin ? » Kady avait six ans, elle aurait dû aller à l'école à cet âge-là. « Kady,
lève-toi ! » Une gifle secoua tout le corps de Kady, suivie de coups de poing. La petite s'effondra. « Kady, lève-toi ! Tu ne te lèves pas ? Très bien, tu l'auras voulu. » Sa belle-mère s'apprêtait à jeter un seau d'eau sale sur elle. Et là, la douche froide arriva « AHHHH ! » Kady se réveilla en sursaut. Comme d'habitude, elle avait fait le même cauchemar.

Elle était traumatisée. Mais ce jour-là, elle ne réagit pas comme à l'accoutumée. Aujourd'hui était un jour triste pour elle. Les larmes coulaient silencieusement sur son visage. Aucun son ne sortait de sa bouche, seulement des larmes, des larmes lourdes de vécu. Elle savait que ce ne serait pas une journée de joie. Peut-être un pressentiment ? Était-ce une prise de conscience ? Non, elle ne reconnaîtrait jamais que son
comportement a était le pire des comportements qu'un être humain puisse avoir au cours de sa vie. Elle jouait toujours la carte de la fierté. Si seulement elle savait que cette carte la mènerait à sa perte, elle aurait sûrement choisi une autre voie ! En se levant de son lit, elle décida de se confesser une dernière fois : « Je suis Kady. Je n'ai pas eu la vie facile. Au cours de celle-ci,
j'ai aperçu de nombreux signes que j'ai choisis d'ignorer. Avec du recul, j'aurais pu être plus attentive. J'ai été blessée, et j'ai voulu rendre ce mal au centuple. Mais me suis-je sentie à l'aise dans ce bain de méchanceté ? Ai-je réussi à soigner mes blessures ? Se sont-elles cicatrisées comme il se doit depuis mes six ans ? Et surtout, tout cela m'a-t-il permis de grandir comme il le fallait ? Était-il nécessaire de blesser les autres pour apaiser mes maux ? Avec du recul... Non.
Reproduire un schéma qui nous a détruits est
typique de l'être humain. J'aurais aimé prendre un chemin différent. Peut-être aurais-je été plus heureuse. » Cela faisait maintenant une semaine
que l'incident s'était produit. Entre-temps, Oussmane était venu embêter Fanta, ce qui ne lui déplaisait pas. Il lui transmettait les cours et en profitait pour la draguer ouvertement. Djennah aussi lui rendait souvent visite. Le vendredi soir, Bouba annonça à Kady qu'il allait devoir discuter avec les frères et sœurs, les cousins, cousines et les voisins dans la cour de la concession. Kady comprit immédiatement
que ce ne serait pas une partie de plaisir.

Elle n'avait encore jamais été confrontée à ce type
de réunion. Pour la première fois dans sa vie
d'adulte, elle ressentit de la peine, de la peur et
de la tristesse suite à l'annonce de ce rassemblement. Bouba lui demanda si elle avait quelque chose à confesser. Kady, raide et fière, ne répondit pas. Bouba ne voulait pas en arriver là avec elle, mais il n'eut pas le choix. Lorsqu'il insista à nouveau, Kady répondit de manière virulente, laissant entendre que s'il avait une
idée en tête, qu'il aille jusqu'au bout. Sa fierté était si immense que, pour elle, mourir était préférable à l'humiliation.

Le lundi arriva. Bouba se réveilla, prêt à affronter une longue journée. Il s'adressa à Kady : « Prépare-toi, nous allons à l'école de Fanta. Nous avons rendez-
vous. » Étonnamment, Kady était prête. Arrivés
à l'établissement, Bouba commença à discuter
avec l'instructeur.
Bouba : « Je suis vraiment désolé de
l'incident qui s'est produit avec ma fille. »
Instructeur : « Je comprends votre
désolation, monsieur, mais ce sont les règles.
Nous n'avions d'autre choix que de procéder à
son exclusion. »
Bouba : « Je comprends, et c'est tout à fait
normal. Cependant, j'aimerais vous faire part de
quelque chose. Je sais qui a mis cette substance
dans le sac de Fanta. » Fanta, assise, était sereine.

Quant à Kady, son cœur commença à palpiter très vite. Elle prit la parole, d'un ton suspect : « Bouba, arrête ça ! Je t'ai déjà dit que c'était elle. Je t'avais prévenu
qu'elle nous couvrirait de honte. » Bouba l'interrompit : « J'aimerais que tu me laisses
parler avec l'instructeur sans me couper. » Puis
il se tourna vers ce dernier et reprit : « La
personne qui a mis cette substance dans le sac,
c'est Kady, ma femme, celle que vous voyez ici.
» Les yeux de Kady s'écarquillèrent. Prise de honte, elle voulut protester, mais Bouba continua : « Je l'ai entendue discuter avec une de ses amies, et elle se vantait de son acte. Voilà,
vous savez tout. » Prise de honte, Kady se leva brusquement et sortit de la salle.