6-la cape

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Le matin était encore jeune lorsque l'on frappa à ma porte. Légèrement surpris, je posai la ceinture que j'étais en train de boucler et me dirigeai vers l'entrée de ma chambre. Peu de gens venaient me voir, surtout à cette heure.

J'ouvris la porte, et mon cœur fit un bond.

Rûn se tenait là.

Il était vêtu des mêmes vêtements abîmés, mais il semblait plus nerveux que la dernière fois. Dans ses mains, il tenait ma cape, pliée avec soin. Ses doigts tremblaient légèrement, comme s'il luttait pour maintenir son calme.

« Je... Je viens rendre ça, » dit-il, tendant la cape vers moi. Sa voix était à peine plus qu'un murmure.

Je la pris lentement, mais je restai silencieux, attendant qu'il dise autre chose.

« Merci, » reprit-il, son regard fuyant le mien. « Mais... tu n'aurais pas dû. »

Je fronçai légèrement les sourcils.

« Pourquoi pas ? » demandai-je calmement.

Il leva enfin les yeux vers moi, mais son regard était empli de peur et d'hésitation. « Parce que... je n'en vaux pas la peine. Et toi, tu ne peux pas te permettre de te mettre en danger pour moi. »

Ses paroles m'irritèrent plus que je ne l'aurais cru. Comment pouvait-il croire qu'il ne méritait pas de l'aide ?

« Rûn, écoute-moi, » dis-je en prenant un ton ferme mais pas brusque. « Je ne pouvais pas rester sans rien faire face à quelqu'un qui a besoin d'aide. Tu mérites mieux que ça, peu importe ce que tu penses. »

Il secoua la tête, ses yeux se détournant de nouveau. « Non. Tu dois arrêter. Si quelqu'un te voit... Si Kerna apprend que tu m'aides... tu pourrais avoir des problèmes. »

Je laissai échapper un soupir, agacé par son obstination, mais pas par lui. Par cette situation injuste qui l'avait poussé à vivre dans la peur constante.

« Je m'en moque, » répondis-je avec sincérité.

Son regard se tourna vers moi, surpris, presque incrédule.

« Tu devrais pas, » murmura-t-il, mais sa voix manquait de conviction.

Je fis un pas en avant, instinctivement. Mon intention était de lui montrer qu'il n'était pas seul, qu'il pouvait compter sur moi, peu importe les conséquences. J'essayai de saisir doucement sa main pour renforcer mes mots, mais il recula brusquement, son corps tendu comme un arc.

« Non, » dit-il, sa voix soudain plus forte, presque désespérée.

Il recula de quelques pas, ses bras croisés sur sa poitrine comme pour se protéger.

« Tu n'as pas le droit de me toucher, » murmura-t-il, le regard baissé.

Je sentis mon cœur se serrer. Ce n'était pas juste une règle imposée par Kerna. C'était une peur profondément ancrée, une peur que je ne pouvais ignorer.

« Rûn, je suis désolé, » commençai-je, cherchant à apaiser la tension.

Mais avant que je ne puisse dire autre chose, il fit volte-face et s'enfuit, ses pas légers disparaissant rapidement dans le couloir.

Je restai immobile un long moment, la cape toujours dans mes mains. Une part de moi était frustrée, mais une autre comprenait son geste. Il avait peur, et cette peur dirigeait chaque aspect de sa vie.

Mais moi, je refusais de me détourner. Pas cette fois. Je devais trouver un moyen de l'aider, de lui montrer qu'il n'avait pas à porter ce poids seul.

le voyage de VilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant