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Mardi 21 juillet, 16h, chez moi

"Bon, peut-être que je vais devoir y aller." dit Alexandre, après encore une journée de parler d'elle.

Quel soulagement de pouvoir parler de toutes ces choses qui faisaient qu'on l'aimait !

Quel soulagement de voir qu'il comprenait tout ce que je ressentais parce qu'il ressentait la même chose !

Nous nous levâmes en même temps et il me fit la bise. Je le racompagnais à la porte et quand je l'ouvris, je tombai sur Natanaël qui toisa Alexandre méchamment.

Il marcha sur moi et m'embrassa en guise de bonjour.

Je lui rendis son baiser pour le rassurer et il se détendit immédiatement. Il se tourna vers Alexandre quand nos lèvres se séparèrent.

"Bonjour, je suis Natanaël."

"Alexandre."

Il tendit sa main et Natanaël la secoua très rapidement avant de se tourner vers moi.

"Ça va ?"

J'acquiesçai en m'empêchant de lui sauter dessus.

Il était vraiment trop sexy en mode jaloux.

Alexandre était extrêmement gêné et je vis même un peu de déception dans ses yeux.

Genre.

Enfin bref il s'en alla rapidement en me faisant un signe de tête et en fermant la porte derrière lui.

Je me tournai vers Natanaël qui m'observai.

"Il est beau."

"Largement moins que toi."

"Je suis jaloux."

"Je sais et il n'y a pas de quoi."

"Je suis pas jaloux dans le sens que j'ai peur qu'il me prenne ma copine. Non, je te fais trop confiance pour ça."

Sourire.

"Alors tu es jaloux dans quel sens ?"

Hésitation.

"Moi aussi je voudrais parler de ce qui va pas avec toi."

Surprise.

"Tu voudrais que je te parle de mes frères et de ma soeur ?"

"Oui, si tu en ressens le besoin."

A mon tour d'hésiter.

"Tu sais... En parler avec Alexandre me faisait du bien parce qu'il connaissait Marion. Tu ne la connaissais pas, ni aucun d'entre eux. J'ai pas envie de faire des monologues."

"Il me semble que tu te trompe."

Je fronçai les sourcils mais n'eû pas le temps de lui demander des explications puisqu'il me prit la main en m'entraînant dans le salon.

Il nous fit asseoir sur le canapé et il continua.

"Quand j'avais 11 ans, j'ai perdu mon meilleur ami. Il s'appelait Franck et il est mort d'un cancer."

Mon coeur s'arrêta. Vivre un de ses premiers deuils à 11 ans, quelle cruauté de la vie !

Il continua.

"Personne ne le connaissait aussi bien que moi. Je me disais que personne ne pouvait comprendre, que ça ne me servirait à rien d'en parler à quelqu'un qui ne le connaissait pas."

Il prit une pause, le temps pour moi de m'identifier à lui. Il avait vécu ce que je vivais. Pas aussi durement que moi, mais il comprenait au moins un peu ma souffrance.

"Un jour au collège, notre professeur de français nous a demandé d'écrire notre plus triste moment dans la vie. Évidemment, j'ai écris à propos de Franck. J'ai eu 19/20 et le point qu'il m'avait enlevé était seulement parce que j'avais fait quelques fautes d'orthographe."

Je ris et murmurai "Vantard.".

Il sourit avant de reprendre.

"Le professeur, Mr Gisclon je crois qu'il s'appelait, a compris que j'avais besoin d'en parler même si moi même je ne m'en rendais pas compte. Alors il m'a demandé de venir le voir après la classe, et il m'a demandé plus de détail sur Franck 'pour voir si je ne peux pas te rajouter ton point'" il dit cette dernière phrase en levant ses mains et en imitant des guillemets. "Évidemment, une fois lancé, je ne pus m'arrêter et je lui parlai pendant près d'une heure. Quand j'eu finis, il me sourit et me dit que même à l'oral j'avais fait des fautes d'orthographe, et qu'il ne pouvait donc pas me rajouter ce point. Et moi je le remerciai, pas parce que je n'aimais pas les 20/20, mais plutôt parce que je me sentais tout léger. Lui parler avait allégé ma souffrance."

Je restai quelques instants partagée, ne savant pas vraiment quoi faire. J'hésitais entre l'embrasser, lui dire merci et commencer à parler.

Finalement, je fis les trois.

NatanaëlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant