"Le garder ?
- Ici. Quelques jours, deux ou trois.. Il faut qu'on s'assure qu'il n'a pas attrapé de maladies avec ses lames, qu'il n'a rien consommé de dangereux pour sa santé. Et il faudra que vous reveniez vous pour qu'on.. Comment dire ? Qu'on organise une thérapie sur plusieurs rendez vous avec lui. La plupart des patients sont réticents alors si nous nous rendons compte qu'il refuse de parler avec les psychiatres de notre service, nous devrons nous arranger avec vous pour prendre des rendez vous réguliers. Vous êtes de sa famille ?
- Son petit-ami."
Là, la jeune femme me regarde une, deux secondes peut-être avant de me sourire en penchant légèrement la tête sur le côté alors que je me sens rougir. Puis je détourne le regard en passant une main dans mes cheveux :
"Enfin de toute façon pas de soucis. Je viendrai tous les jours alors.. J'ai le droit de le voir ? De lui apporter à manger, il a le droit à..
- A tout. Quand monsieur Malik a rencontré les médecins, il leur a dit qu'il n'avait jamais essayé de se.. De mettre à fin à ces jours.
- Et si il mentait ?
- C'est pour ça qu'on le garde quelques jours. Tant qu'on est pas certains qu'il est.. Excusez moi, c'est mon premier jour ici."
Lola, elle s'appelle Lola, c'est marqué sur la petite étiquette sur sa blouse. Cheveux mi-longs, pleins de boucles, une peau claire comme ces nuages blancs d'un matin d'hiver, des yeux qui crient pardon, pardon, excusez moi, vous savez moi aussi j'ai peur du monde. Et elle prend une seconde pour remplir ses poumons d'air frais, peut-être se calmer alors qu'elle passe une main dans ses cheveux, ses doigts maigres, presque squelettiques, et je me souviens m'être toujours dit que les médecins se spécialisaient dans ce dans quoi ils avaient des problèmes.
"Pas de soucis.
- Désolée, elle dit dans un rire plein de gêne. Donc je disais qu'on le garde ici pour essayer d'évaluer le degré de sa.. Maladie, de son mal psychologique. Vous serez informé de toutes les évolutions et il y a beaucoup de chances pour qu'il puisse sortir d'ici après demain."
J'hoche la tête lentement. Il est presque 11h30, j'ai l'impression que le monde avance plus vite que moi, d'être spectateur de tout ça.
Je me gratte la nuque, tandis qu'elle me fixe en attendant surement que je dise quelque chose, alors je m'exécute en lui adressant un petit sourire aimable :
"Merci beaucoup.
- Je vous en prie. Appelez moi en cas de soucis. C'est le bouton rouge, au dessus du lit.. Vous le verrez, vous inquiétez pas."
De nouveau, je hoche la tête. Je suis incapable de réellement parler, dans ce besoin de prendre des distances avec cette putain de réalité. Je suis incapable de prendre position, de dire clairement oui ou non.
Je ne veux pas de cette vérité, je ne veux pas de ce monde.
Je ne suis pas dans cet hôpital, d'ailleurs il n'existe même pas. Je ne suis pas dans ce jean, dans ce tee-shirt, dans cette veste. Je ne suis pas rentré hier soir, je n'ai pas retrouvé Zayn dans son sang, je n'en ai pas été couvert, je n'ai pas appelé l'ambulance, je ne suis pas monté dedans, je n'ai pas pleuré.
J'ai pas pleuré, putain, j'ai pas pleuré.
Je ne suis pas rentré chez moi après, je ne me suis pas couché, je ne me suis pas relevé, je ne me suis pas fait un café, je ne suis pas resté éveillé toute la nuit, à frotter le sol, je n'ai pas pris de douche, je ne me suis pas changé.
J'ai pas pleuré, putain, j'ai pas pleuré.
Je ne veux pas de cette vérité, je ne veux pas de ce monde.
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Sinistrés
Fanfiction"Harry a déjà foutu ma vie en l'air une fois. Je ne le laisserai pas recommencer avec celle que je construis loin de lui."