28 - Insouciants

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Une fois passée l'arche, les quatre compagnons chevauchèrent lentement, ébahis, ouvrant grand leurs yeux pour les gorger de tout ce qui les entourait. Les gens ici n'avaient rien à voir avec ceux du village. Tous les styles cohabitaient, les vêtements les plus colorés et les plus incroyables. Les classes sociales se mélangeaient joyeusement, depuis les clochards qui mendiaient jusqu'aux bourgeois prenant garde à ne pas salir leurs luxueux vêtements. Les rues étaient larges et animées, les injures comme les rires y résonnaient, et les piétons se bousculaient pour laisser le passage aux quelques chevaux. Des enfants couraient et jouaient en toute liberté, les couples s'embrassaient sans souci de pudeur. Des personnes en uniforme bleu semblaient veiller à l'ordre public ; ils interrompaient les nombreuses bagarres qui se déclaraient. On voyait partout des vendeurs munis de plateaux ou de grandes boîtes s'époumoner pour vanter leurs produits.

Des échoppes pittoresques donnaient directement sur la chaussée, sans l'intermédiaire d'un trottoir. Certaines étaient de simples comptoirs, séparés par des portes discrètes, où les passants achetaient petits objets ou nourriture à emporter. Mais il y avait également de véritables boutiques et des bars dont les larges portes restaient ouvertes pour mieux attirer les clients. Les bâtiments étaient colorés et hauts de nombreux étages. Certains ne présentaient que d'étroites fenêtres, d'autres disposaient de balcons de toutes les tailles.

Coco frappa dans ses mains, excitée, et leur désigna du doigt un adulte vêtu de manière excentrique. En échange de pièces brillantes, il faisait pousser des fleurs dans de petits pots en terre pour émerveiller des enfants vêtus richement.

-Un mage ! s'écria Andrew, lui aussi exalté. Et il fait de la magie devant tout le monde, en plein jour ! C'est génial !

Yū hocha la tête, l'air heureux. Ciel elle-même s'autorisa un sourire. Coco claqua de nouveau ses mains l'une contre l'autre et attira leur attention sur un commerce à l'allure accueillante, séparé de la rue par une cour. La fillette leur tendis son carnet.

"On pourrait laisser nos chevaux à l'auberge."

-Bonne idée, ça sera plus pratique, acquiesça Yū.

Coco sourit et ils descendirent tous de leurs montures, avec plus ou moins de grâce et d'aisance. Louvoyant à travers la cohue, ils gagnèrent l'entrée repérée par l'enfant. Un homme large d'épaules vint à leur rencontre.

-C'est pour une chambre ? grommela-t-il.

-Pas pour l'instant, expliqua Yū, on voudrait juste vous confier nos chevaux, c'est possible ?

-C'est gratuit si vous payez d'avance une chambre pour cette nuit.

Ils s'entreregardèrent. La fillette griffonna rapidement un message.

"De toute façon on doit bien dormir quelque part. On a assez d'argent pour prendre une chambre cette nuit ou même plusieurs."

Yū demanda donc deux chambres au propriétaire de l'auberge, et Andrew trouva le prix demandé dans les sacoches du cheval, grâce à la générosité des villageois et aux économies de Coco. On leur assura que leurs montures seraient bien traitées et ils repartirent donc tous les quatre, plus légers, à travers la ville, les deux clés de leurs chambres en poche.

-J'ai faim, déclara solennellement Yū.

Les autres exprimèrent joyeusement leur accord. C'est ainsi qu'ils se mirent en quête de leur repas. Les adolescents ne connaissaient rien à la nourriture locale, aussi Coco prit-elle en main le choix. Ils s'arrêtèrent finalement devant un stand qui proposait des brochettes d'aliments variés. Ils en commandèrent une chacun en mélangeant tous les ingrédients proposés, et les mangèrent en déambulant dans la cité. C'était délicieux. Coco était aux anges. Ciel se fit la réflexion que la petite fille avait peut-être grandi en ville, et que l'exil en pleine campagne avait dû être difficile à vivre. Mais elle n'en était pas sûre. L'enfant et son passé étaient encore une énigme pour eux tous.

Les Âmes des Jours de PluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant