TROISIÈME PARTIE

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TROISIÈME PARTIE : APPRENDRE À NOUS TU-« TOY »-ER


Que se passe-t-il, au fond, lorsque l'on s'enferme dans l'entente des mots de sa propre langue? « Le mot écrit, dit Ferdinand de Saussure, se mêle si intimement au mot parlé dont il est l'image, qu'il finit par usurper le rôle principal. » Mais de cette constatation, Saussure ne tire pas la même conclusion que David R. Olson (professeur de science cognitive à l'Université de Toronto) et Roy Harris (professeur de linguistique à Oxford), à savoir que ce rôle principal provient du fait que c'est le « mot parlé » (tel qu'on l'entend dans nos sociétés alphabétisées) qui est la représentation orale du mot écrit et non le mot écrit qui est la représentation écrite ― l'image ― du mot parlé.

Autrement dit : le mot est toujours d'abord un mot écrit. Ledit « mot parlé » est une sorte d'illusion d'optique : « une projection de l'image graphique sur l'écran de l'oral » (Harris). Avant l'invention de l'écriture, l'homme (ou la femme) préhistorique ne parlait pas avec des mots, mais avec quelqu'un d'autre (ou quelqu'une autre). Parler, cela veut d'abord dire : parler-avec-(un)-toi, ici et maintenant. Et inversement. Aussi nous faut-il redécouvrir ce rapport originaire de « toi » à toi ― qui est aussi le rapport d'un monde vers l'autre ― en apprenant à nous tu-« toy »-er à nouveau.


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