The Brige of Sad Teens [en pause]

3.5; la progression

- Je n'ai pas l'impression d'avancer.

Charlie tourne sa tête vers la gauche, où se trouve Ambre, ses yeux bleus reflétant de la tristesse.

- Comment ?

- Je n'ai pas l'impression d'avancer, répète l'adolescente en jouant avec la fermeture éclair de son manteau noir.

- Par rapport à... ? demande Charlie en levant un sourcil.

- À Émilie. Ça fait sept mois que c'est fini et j'ai l'impression d'être à la case départ.

- Ce n'est pas vrai, tu as avancé. Avant, tu pleurais pratiquement tous les jours et tu as loupé une semaine d'école. Tu peux être sensible, mais Ambre, tu as avancé.

- Je te crois pas. Du moins, pas réellement. Je veux dire, c'est vrai qu'avant, mon état était pire. Certes, mais là, ces derniers temps, rien que d'imaginer Émilie me rend triste. Il y a quelques jours, j'ai croisé une personne qui lui ressemblait énormément, ça m'a tellement choquée, j'en ai pleuré. Ça ne fait que sept mois, je devrais être passée par dessus, mais non, j'y pense pratiquement tous les jours et je me rejette toujours la faute. Tu appelles ça «avancer» ? Et bien, pas pour moi.

- Ambre.., dit Charlie, sans mot.

Assisse sur le banc, Ambre observe les feuilles brisées se faire soulever légèrement par le vent frais et enfonce ses mains abîmées dans les poches de son manteau.

- Même toi, tu es passée par dessus, répond la fille aux yeux bleus.

- Non, pas exactement. J'ai l'air de m'en être sortie, mais en fait, non.

- Ah oui ? Et comment ? rétorque-t-elle.

- Il m'a fallu beaucoup de temps pour m'en remettre et pourtant, il y a toujours cette partie qui repense à Émilie. Quand je vois une place vide dans une classe de cours, je me demande si elle était là, aurait-elle pu s'asseoir là ? Quand il y a un vide dans une conversation, je me demande si elle était là, aurait-elle rit et raconté une blague ou une anecdote qui lui passe par la tête ? Quand je vois un objet qui me fait penser à elle, mon cœur se brise un peu plus et je me demande comment aucun de nous n'a pu apercevoir ce qui se passait dans son esprit.

- Désolée, chuchote Ambre, après quelques minutes de silence.

- Ce n'est rien. Je souhaite juste qu'elle nous aurait dit quelque chose, même un indice, juste quelque chose pour nous faire savoir que quelque chose n'allait pas bien.

- Je pense qu'elle a donné quelques indices de temps à autres, mais on ne les a jamais remarqués. On ne le remarque qu'après sa mort, quand tout semble s'éclaircir, mais que c'est trop tard.

Charlie soupire et hoche la tête pour partager son accord silencieusement.

- On rentre ? Je commence à avoir froid.

Ambre répond un "d'accord" rapide et les deux adolescentes se lèvent du banc pour rentrer dans l'école.