1.1; le retour

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Ce soir, Ambre rentre de l'école en balançant son sac dans sa chambre et s'enfermant dans cette dernière. Les parents de l'adolescente ne savent pas la raison, mais la dernière fois qu'ils ont essayé de lui demander ce qu'elle avait en insistant, ça s'est mal terminé. Donc ils s'occupent de leurs affaires et font comme si tout allait bien.

L'adolescente enlève ses converses rouges et sa veste bordeaux, puis va directement sur son téléphone en s'étalant sur son lit. Elle traîne parmi son fil d'actualité Facebook, aime quelques publications et éteint son portable. Après s'être relevée de son lit, Ambre allume la radio et met une station qui diffuse de la bonne musique. Prenant un mouchoir qu'elle froisse et son démaquillant, elle enlève rapidement son mascara. Elle retourne ensuite sur son lit double et prend son portable pour programmer une alarme à dix-huit heures quarante cinq. Elle s'engouffre dans les couvertures chaudes et confortables, puis moins de deux minutes après, la jeune femme est déjà endormie parmi la chaleur de son lit tant aimé.

Ambre est réveillée par une musique qui provient de son portable et en gardant les couvertures montées jusqu'au nez, une fine main dépasse pour éteindre d'un geste paresseux l'alarme. L'adolescente baille à s'en décrocher la machoire et enlève les couvertures pour se lever de son lit si confortable. Elle pose un pied par terre, puis le deuxième et se dresse complètement. Elle essuie le sommeil de ses yeux avec ses mains formés en poings et va mettre ses converses rouges. Ambre prend ensuite sa veste polaire, ferme la fermeture éclaire et sort de la maison en prévenant ses parents.

Le trajet se fait silencieux. Pas comme si d'habitude, il est bruyant, mais comme si ses pensées se calmaient. La sieste lui a fait du bien, ça l'a aidé à remettre ses idées en place et Ambre se sent bien. Malgré qu'elle a plusieurs poids sur ses épaules, l'adolescente a l'impression d'en avoir soulevé un et même temps si ce n'est pas beaucoup, ça reste quelque chose.

Quand Ambre voit le pont, ses épaules se relaxent alors qu'elle n'avait pas remarquer qu'elles étaient tendues. La jeune femme aperçoit la même figure que ces derniers jours et ça ne la surprend qu'à peine. Elle va quand même s'assoir en tailleur avec une dizaine de mètres les séparant.

Après plusieurs minutes de détente, Ambre ouvre ses yeux qu'elle avait fermés pour mieux se détendre et tourne sa tête vers Nathan. Celui-ci a le regard baissé sur l'eau si paisible et il semble tellement concentré. L'adolescente mord sa lèvre, voulant parler avec le garçon, mais se demandant si ça vaut réellement la peine. Si les deux adolescents sont là, c'est pour se détendre et laisser son esprit naviguer, pas pour discuter avec les autres. À moins que discuter consiste à se détendre, mais à deux.

- Tu viens ici souvent ?

Les mots se sont échappés des lèvres d'Ambre avant qu'elle ne puisse les arrêter et pendant un instant, elle craint que Nathan ne l'ait pas entendu, mais le contraire est prouvé lorsqu'il se tourne dans la direction de la fille.

- Oui, mais un jour, j'arrêterai.

Le regard du garçon est vide, ses yeux bleus ne montrant aucune émotion et Ambre se sent intimidée. Ses lèvres pâles bougent doucement pour former cette série de mots si petite, mais qui peut dire tellement de choses.

Il arrêtera ? Dans quel sens ? Va-t-il arrêter de venir car il en aura marre ou car il ne sera plus là ? Vient-il car il a perdu un être cher ou car il veut lui-même se perdre ? Est-ce pour ça qu'il vient souvent ? Pour souhaiter sa perte ? Les questions se multiplient dans l'esprit à Ambre et elle ne remarque pas Nathan se rapprocher de quelques mètres.

- Désolé si ça paraît impoli, mais, euh, pourquoi tu n'étais pas là hier ?

L'adolescente le regarde, regarde ses cheveux si sombres et désordonnés, ses yeux d'un bleu si clair, son visage si pâle avec ses pommettes si visibles.

- Eum, j'étais trop fatiguée et j'avais besoin de faire une pause après être venue six mois non-stop, répond finalement Ambre, d'une voix incertaine.

Le garçon hoche la tête et regarde quelques secondes la fille avant de détourner son regard vers l'eau. Il y a un long silence et Ambre pense qu'il n'y aura rien de plus. Elle baisse son regard sur ses cuisses enveloppées par un jean skinny noir et ses pensées naviguent à nouveau.

«Un jour, j'arrêterai», il y a tellement de sens qu'on peut mettre à cette simple phrase. Il peut s'arrêter car il en aura marre, car il sera trop grand, car il aura autre chose à faire. Mais il peut aussi arrêter car il sera au fond de l'eau au lieu d'être assis sur le pont et ça effraie Ambre un peu. Car même s'ils ne se connaissent pas tant que ça, elle a déjà eu une amie proche qui s'est enlevé la vie et savoir qu'une autre connaissance qui a fait partie, même à peine, de sa vie a fait de même n'est pas plaisant. Savoir que quelqu'un qui a fait partie de sa vie et s'est enlevé la sienne fait un choc, car tout est remis en question. Lors de la mort d'Émilie, Ambre s'est remise en question et s'est tout blâmé. Savoir que son amie est morte alors qu'elle ne la même pas vu mourir psychologiquement est affreux.

L'adolescente regarde sa montre, vingt heures trois. Elle se relève ddélicatement, enlève la poussière de son jean et après avoir enjambé le vieux grillage avec peu de difficulté, elle regarde Nathan, qui se trouve de dos. Elle ouvre la bouche, comme si elle voulait lui dire quelque chose, mais aucun son ne sort. Donc elle part sans rien dire.

The Brige of Sad Teens [en pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant