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"Les couples les plus improbables sont les meilleurs"
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- Qu'est-ce qu'on fait aujourd'hui, Heyne?
Le concerné baille à s'en décrocher la mâchoire. Le soleil se lève à peine et quelques rayons filtrent à travers les fenêtres sales de l'appartement. Heyne et ses deux sbires se trouvent dans un quartier malfamé de la grande ville, où ils sont sûrs de ne pas être dérangés. La journée s'annonce ennuyante, et il sent que s'il ne fait pas quelque chose et vite, il va exploser d'ennui.
Il se frotte les yeux, fatigué, se lève et se dirige vers la "cuisine" (Peut-on vraiment qualifier une pièce de cuisine quand elle ne contient qu'un lavabo qui fait sortir de l'eau couleur blanchâtre, un réfrigérateur qui n'est presque pas froid et une table dont l'un des pieds est manquant ?) . Il hésite entre une pomme rassie ou du lait caillé depuis des semaines, décide qu'il n'a pas faim et enfile un débardeur blanc. Il s'adresse ensuite à Mike et Matthy.
- Vous faites ce que vous voulez les gars, dit-il. Moi j'ai quelque chose à faire.
- Comme d'habitude, grogne Matthy. Malgré ces longues années passées à tes côtés, tu nous laisse toujours en plan le matin, à croire que tu nous cache quelque chose.
-Le temps qu'on a passé ensemble n'a rien à voir avec le fait que la confiance est de mise et que je dois tout vous dire, où je vais, avec qui, et quand je reviendrai. On a tous nos propres secrets, moi les miens et vous les vôtres. Débrouillez-vous avec.
Sur ce, il ouvre en grand la porte d'entrée et part, en prenant au passage la pomme pourrie. Ca reste quand même quelque chose à grignoter.
Il sort de l'immeuble en respirant avec force l'air pollué de la ville. Quelle horreur. Il ressert ses bras autour de lui pour se réchauffer et marche dans l'allée en direction d'une rue plus fréquentée. Il passe la matinée et le début d'après-midi à tirer ses flèches puis décide de faire une pause. Il s'assoit sur un banc, las. Ces matinées répétitives le gavent. Et il en a assez que Mike et Matthy se plaignent tous les matins. Et cela ne fait que deux ans. Il soupire et se laisse aller à la contemplation de la ville.

Il regarde vers le ciel rosé et aperçoit tout d'un coup une flèche ambrée voler dans les airs. Son esprit analyse aussitôt: une flèche d'Amour. Elle semble se diriger droit vers une jeune fille rousse qui se promène avec son chien. Ça ne va pas du tout pour Heyne. Son boulot est d'inculquer la Haine! Cette flèche est une offense pour lui. Indigné, il se rend invisible, son arbalète en main. Il vise et tire avec précision en direction du projectile ennemi. Il fait mouche, la flèche d'Amour explose, épargnant la fille rousse, qui ne se doute de rien."Je t'ai évitée bien des soucis" pense-t-il. Et il continue son chemin, mine de rien. Brusquement, la journée s'annonce plutôt bonne: il a un Sentiment à chasser de cette ville, qui est sur son territoire à lui. Une place contenant plus d'un Sentiment peut mener à la catastrophe si ceux-ci sont concurrents, et Heyne  sent que celui-ci ne va lui attirer que des ennuis, ce qui lui fait rappeler l'avertissement d'Hermès. D'un geste ample il fait disparaître son arbalète, le dévoilant tout entier dans son sublime jean moulant et son débardeur blanc. Bon, utiliser ses sens pour repérer l'ennemi ne devrait pas poser trop de problèmes. Une énergie étrangère est présente dans le centre ville, il décide donc de s'y rendre.

Ce n'est pas chose facile de repérer le Sentiment, il peut être n'importe où, entre toute la foule qui se presse dans les boutiques, traverse les trottoirs ou tout simplement flâne dans les rues animées, ou encore il peut être invisible, occupé à viser ses prochaines victimes. Il se cache dans une ruelle sombre et fait apparaître un sweat à capuche et des lunettes de soleil. Pour ne pas se faire repérer, il rabat son capuchon sur la tête et décide de se mêler à la foule.
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-Wow... C'est ça la ville? C'est merveilleux! Murmure Ame à l'intention de ses Amours. Ils s'échangent un regard amusé devant la stupéfaction de la jeune fille. En effet, la vision est assez spectaculaire: d'immenses immeubles montent vers le ciel très haut, comme s'ils pouvaient atteindre la demeure des dieux. Et les gens! Ame n'en a jamais vu autant massés dans un seul endroit. Ils semblent tous avoir une direction différente, l'air concentré sur leur destination. Cependant, malgré la fraîcheur, le soleil tape fort en ce début d'après-midi. À l'insu de tous, elle se fait apparaître une ombrelle en dentelle. Aussitôt abritée, elle se plonge dans la foule, l'air émerveillé, les deux Amours volant à ses côtés.
-Très bien, Ame, dit Cupy. Nous voilà dans le feu de l'action. Comme c'est excitant!
-Oui, acquiesce Done,mais il nous faut être prudent. Il y a du monde autour de nous, il faut donc être discret quand tu agiras.
-Que dois-je faire? Demande Ame, tout en contournant un groupe de touristes prenant en photo une fontaine avec, oh ironie, un petit cupidon un arc et une flèche à la main.
-Commençons petit, répondit Done. Tu vois cette fille là-bas?
-Qui ça? La gothique? S'exclame son frère d'un air choqué.
- Oui eh bien, tu as quelque chose contre les gothiques?! À quelques mètres d'elle il y a ce garçon avec des lunettes et des livres plein le sac. 
En effet, une fille au trait d'eye liner épais et aux cheveux bleus foncés, des bracelets de clous à ses mains et des vêtements sombres marche d'un air las devant eux. Juste à côté se trouve son opposé: un garçon soigné, les cheveux bien coiffés, les habits bien ajustés et des lunettes rectangulaires est assis sur un banc en train de lire.
-Quoi? S'étrangle Cupy. Tu ne veux quand même pas les mettre ensembles? Ils sont irrémédiablement opposés!
-Et alors? Rétorque Done. Les couples les plus improbables sont les meilleurs.
- Dans ce cas je me lance, se décide Ame.
Elle laisse en plan les deux Amours. Done en profite pour tirer la langue à son frère. Ame accélère le pas. Arrivée à la hauteur du garçon, elle fait apparaître une flèche qu'elle rend invisible aux yeux de tout le monde et le plante dans son dos. Il se raidit soudainement, mais Ame en a finit avec lui. Elle fait apparaître son arc et cherche la gothique du regard, celle-ci s'étant éloignée. Elle la repère au loin, l'air perdu dans ses pensées. Ame vise et décoche sa flèche qui va droit se planter dans son cœur. La victime trébuche et manque de tomber.
-Que la magie opère.incante-t-elle doucement, un sourire aux lèvres.

Sentiments Humains (en pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant