Chapitre onze.

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Ils venaient d'arriver à la fête foraine et déjà le petit ne tenait plus en place. Il courrait à droite, puis à gauche, demandait à son aîné de le porter puis de le lâcher lorsqu'ils passaient devant une attraction qui lui plaisait.
Les deux adolescents ne se plaignaient pas du comportement qu'avait le plus petit. Au contraire, ils étaient heureux. Tout simplement, heureux.

Elle pensait qu'il avait le droit de vivre pleinement son enfance et de profiter de son innocence avant de connaître les premières peines, déceptions et trahisons de l'adolescence, comme elle l'avait fait quelques années auparavant.

Il pensait que son petit frère avait lui aussi le droit de s'amuser, et d'oublier quelques instants la dureté des visions dont il a été témoin malgré ses dix bougies à peines soufflées. Protecteur comme il l'était, il avait reçu la semaine passée la dernière partie du dossier de tutorat, exprimant la nécessité d'un logement. Il n'avait pas l'argent, ni le travail adéquat, mais il avait des compétences qu'il comptait bien mettre à profit.

«Tiens, comme promis, petit monstre !» Lui annonçait la jeune fille en lui donnant une énorme barbe à papa, aussi rose que les lèvres du petit garçon. Il lui embrassait la joue pour la remercier sous le regard tendre et admiratif de l'adolescent.
«Hey ! Attendez ! Je veux faire du tir à la carabine !» Criait-elle en voyant les deux garçons s'éloigner main dans la main. Ils la rejoignait rapidement.

«Qu'elle est mignonne ! Tu veux un petit nounours Danna ?» La taquinait-il en lui tirant la joue comme on le ferait à un enfant de cinq ans. Elle roulait des yeux en essayant de cacher son sourire, puis elle répondait :

«Non Kyle ! Je veux ce nounours là !» Elle pointait une énorme peluche du doigt, à l'effigie de Winnie L'Ourson, qui devait être plus grande que le petit qui les accompagnait.

Il acquiesçait, puis la poussait gentiment avant de payer sa partie. Il réussi à éclater les trois ballons en moins d'une minute et donnait fièrement la peluche à son destinataire légitime.

«Merci beaucoup, Kyle.» Souriait-elle, en serrant son gros nounours dans ses bras. Pour simple réponse il lui prit la main puis ils repartaient tous trois parcourir ce parc d'attractions éphémère.

«Kyle ! Kyle ! Je veux faire la grande roue !» Hurlait le petit. L'aîné acquiesçait en souriant et après avoir gentiment patienté, ils montaient tous ensemble dans une même cabine.

Alors qu'ils se trouvaient au point culminant de la roue, elle admirait les hautes montagnes qui se présentaient au loin. Elle aimait ressentir ce calme, cette liberté et cette "zénithude" qu'elle avait seulement quand il était avec elle.

Le petit, assis entre les deux adolescents, expliquait :
«Tu sais Danna, avant, quand Oriana vivait encore avec nous, on allait tout les week end faire la grande roue ! C'était tellement cool...

-Oriana ?» Demandait-elle. L'aîné tournait sa tête vers le paysage et serrait la main de son petit frère pour le faire taire. Il espérait secrètement qu'il ne dirait rien, et priait pour que ce soit le cas... Sans aucun succès.

«C'est notre grande sœur. Elle est partie il y a deux ans parce qu'elle frappait maman, alors la police l'a emmenée dans un hôpital bizarre.

-James, tais-toi.» Chuchotait le plus grand.
«Bah quoi ! C'est vrai !» Reprit le petit, «Même que la dernière fois, elle nous a frappés nous !

-James, fermes la bon sang !» Hurlais l'adolescent, plus honteux et énervé qu'il ne l'avait jamais été dans sa vie.

D'une attitude enfantine, il croisait les bras sur sa poitrine et fermait les yeux, espérant disparaître. Mais, n'est-ce pas en disparaissant que nous nous faisons remarquer par notre absence ?

Identity.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant