Chapitre seize.

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Le dîner était posé sur la table longue et rectangulaire. Les trois habitants du studio étaient côtes à côtes, la fille se trouvait au milieu, et leurs mains étaient liées.
Le plus petit ne comprenait pas ce qu'il se passait, ce qu'il se disait, mais savoir que Danna était la pour eux lui suffisait largement pour ne rien écouter et attendre sagement que cette horrible soirée se termine.

Il savait que la venue de sa sœur n'était pas une bonne idée. Que tout cela allait mal finir. Mais il n'avait rien dit, ne voulant pas empêcher son petit frère de vouloir voir cette sœur qu'il connaissait à peine.

Elle savait qu'inviter la copine de son frère n'allait pas l'aider à passer une excellente soirée de retrouvailles. Mais elle avait accepté, ne sachant pas quoi dire si son frère lui aurait demandé la justification de son refus.

Et c'est donc sans le savoir que les deux adolescents ont organisé une soirée malheureusement mémorable pour eux.
Ils étaient loin de se douter que pendant le repas, la femme hyperactive et bipolaire aurait fait une fausse couche suite à une colère incontrôlée, qui avait comme source un maudit plat que Danna avait trop salé. Le SAMU était venu la récupérer, puis le reste des invités s'était réuni autour de la table basse, assis sur des canapés en smili cuir plutôt confortables que les jeunes gens avaient acheté à un particulier.

Ils étaient loin de se douter que le frère de l'adolescente allait leur annoncer son mariage, et que la jeune fille allait finalement craquer et enfin avouer la vérité à tous. Enfin avouer que son ex-belle-soeur n'était qu'une malveillante croqueuse de diamants. Celle-ci dévoilée, était partie en furie, laissant un homme amoureux déçu. Vraiment déçu. Pas de sa sœur, non, il savait qu'elle ne voulait pas lui faire de mal et il l'a comprenait, mais déçu d'avoir été berné pendant plus de cinq ans et d'avoir fait subir ce canular à sa famille entière.

Ils étaient loin de se douter que le père de l'adolescent, et le frère de l'adolescente allaient être appelés pour un immeuble en feu. Ils étaient loin de se douter que lorsqu'ils seraient uniquement avec les deux femmes qui les ont mis au monde, que le calme était revenu, que les nombreux événements fâcheux de cette soirée avaient été enfouies et déclarés tabous, et qu'ils étaient tout simplement bien, qu'ils recevraient un appel. Un fameux appel.

Bizarrement, quand le téléphone fixe de l'appartement a sonné, tous se sont tus. Tous ont compris. Les deux mères ont plaqués leurs mains sur leurs bouches alors que les larmes décoraient leurs visages. Le petit avait caché ses oreilles, n'espérant rien entendre de ce qu'il croyait. Les deux adolescents ont liées leurs mains, ont décroché le téléphone, ensemble, et ont mi le mode haut parleur. Et ils l'ont entendu.

Ils ont tout d'abord entendu les sirènes d'ambulances. Des fracas de verres. Puis, une voix sourde leur annonçant la mort de deux pompiers surnommés héros de la Patrie.

Une femme pleurait pour la mort de son mari.
Une autre, pour la mort de son fils.
Un petit, pour la perte de son père.
Quand à nos deux adolescents, ils se tenaient la main très fortement, sans aucunes émotions, comme vidés.
Ils ne faisaient qu'écouter la peine qu'offrait cette pièce, sans agir. Ils ne prenaient personne dans leur bras. Tout ce qu'ils ont fait, c'est fouiller dans le sac qu'Oriana avait laissé, et y sortir un briquet, et des cigarettes à rouler.
Ils s'étaient dirigés au balcon, sans rien dire, main dans la main.
Ils avaient fumé. Et pas qu'un peu.
Mais, ils n'arrivaient pas à oublier.

Ils disaient trouver une solution ensemble, mais si aucune issue n'existe, le moyen de la trouver reste impossible.

Identity.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant