Chapitre quatorze.

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Cela faisait aujourd'hui un mois. Un mois qu'ils avaient eu leur appartement. C'était un charmant petit logement qu'ils occupaient. Deux chambres s'y trouvaient : la plus grande pour les deux frères. Elle était composée de deux bureaux, deux lits, deux armoires ainsi qu'une salle de bain qui leur est adjacente.

La plus petite n'en demeurait pas moins spatieuse. Elle comptait un bureau, une salle de bain, et un lit banal, mais il y avait la présence d'une coiffeuse et d'un synthétiseur, qui faisant la joie de l'adolescente. C'est ainsi que chaque soir elle jouait un morceau de piano différent, connu ou non, et que chaque soir les frères s'endormaient au beau son qu'elle leur procurait.

Cela faisait aujourd'hui un mois qu'ils travaillaient tous les deux à l'administration du lycée. Ils triaient les dossiers des élèves, tapaient au clavier les demandes de bourses, ou encore, jouaient les secrétaires des surveillants. Cela les amusaient d'autant plus que cela ne leur prenait que quatre ou cinq heures par semaine, en plus de leur cours, et qu'ils passaient ces heures ensemble.

Cela faisait aujourd'hui un mois qu'ils avaient tous deux arrêté de fumer.

Cela faisait un mois qu'elle avait prétexté vouloir un changement d'atmosphère et de prise de responsabilités pour quitter son domicile familial. Ses parents l'avait vivement encouragée à cette envie d'autonomie surprenante, au contraire de son frère qui ne la croyait absolument pas. Elle avait d'ailleurs fait ses valises sous le regard inquiet et interrogatif de son aîné. Il l'a questionnait pour essayer de trouver une faille dans son mensonge, un problème dans son monologue qui ferait ressortir la vérité dans chaque parcelle de sa peau, mais rien. Il ne récoltait que des oui, non, ou encore des arrête d'être si inquiet.

Cela faisait un mois qu'elle se sentait bien, qu'elle n'avait pas eu affaire à la copine de son frère, de près comme de loin. Elle se sentait bien.

Cela faisait un mois que le dossier de tutorat avait été accepté. Un mois qu'il l'avait annoncé à sa mère et que cette dernière l'avaient entièrement accepté, consciente des problèmes qu'elle leur avaient causés, et qu'elle était fière d'avoir un fils si mûre pour à peine dix-huit ans d'existence.

Cela faisait un mois qu'il emmenait et cherchait son frère à l'école, ses horaires étant gentiment aménagé par le lycée, au courant de la triste histoire familiale. Il se sentait bien.

Cela faisait un mois que le petit savait. Il savait que sa soeur était vraiment malade, que sa mère était vraiment alcoolique et que son père était vraiment un lâche. Mais il savait qu'il était désormais sous la responsabilité de son aîné, devenu son tuteur, et ça a été le plus beau cadeau qu'il avait pu recevoir en sortant de son école primaire : La vérité.

Cela faisait un mois que tous les trois vivaient confortablement dans leur petit loft décoré et aménagé par leurs propres soins. Ils étaient bien.

Un mois sans aucun soucis.

Un mois sans aucun problème.

Ils étaient loin de penser que leurs destins allaient être à ce point chamboulés à cause d'un malheureux repas qui réunirait leur deux familles.

A cause d'une simple envie de vouloir pardonner.

A cause d'un simple manque qu'ils ressentaient chaque jours, chaque heures, chaque minutes, passés loin de leur cocons familiaux auquel ils étaient habitués.

A cause de mensonges révélés.

A cause de larmes cachées.

A cause d'évènements passés.

Ils ne s'attendaient pas à recommencer. Ils ne s'attendaient pas à devoir tout recommencer.

Ils ne voulaient pas retomber.

Ils ne pensaient pas retomber.

La chute sera douloureuse, mais ils ne doivent pas oublier qu'ils ne sont plus les deu adolescents tourmentés d'il y a deux mois.

Ils sont deux adolescents peinés, énervés, qui voudraient crier leur haine au monde entier, mais ils ne doivent pas le faire. Pour lui. Pour le petit qu'ils élèvent maintenant à deux. Pour celui qui leur donne la force de croire que l'innocence et l'inconscience existait encore. Pour celui qui leur fait vivre une deuxième enfance à travers la sienne.

Ils ne s'attendaient pas à gâcher un mois de paix à cause d'un simple message envoyé :

« Vous êtes invités à dîner. »

Identity.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant