Tome 2 Ω Sang-Mêlé Ω Vengeance

Chapitre 19

Nathan 

Essoufflé, je m'adosse contre le tronc de ma victime en fermant les yeux. La rage semble enfin avoir quittée mon corps, me laissant éprouver toute la douleur que je me suis infligé en frappant l'arbre à mains nues. Mais cette souffrance n'est rien au sentiment d'abandon qui me tenaille. J'ai attendu de longues minutes devant la porte, mais elle n'est pas sortie. Pourquoi ?

La tête entre les genoux, les mains meurtries dans le vide, j'attends. Quoi ? Je l'ignore. L'envie de débarquer dans la chambre pour lui enlever ne veut pas me lâcher, et pourtant... on est tombé d'accord sur ce compromis dont je suis à l'origine. Si elle ne sort pas, elle est à lui. Mais putain, je suis vraiment trop con.

Le simple fait de les imaginer ensemble ranime en moi des émotions violentes, qui tentent sournoisement de prendre le pas sur ma raison. Elles se déchainent en moi, obligeant la teinte de mes yeux à se foncer lentement jusqu'à... ce qu'une odeur familière  s'impose à mes sens. 

En alerte, je bondis sur mes jambes en fronçant les sourcils. J'ai grandi dans un endroit lugubre, où cette odeur... l'odeur du sang était mon quotidien...Et le simple fait de humer l'air me fait comprendre qu'une personne est gravement blessée, voire probablement déjà morte.

Contrarié, j'enfonce mes mains dans les poches de mon sweat avant de remonter à la source d'un pas traînant. En voilà une bonne occupation pour me changer les idées, même si je doute qu'une biche tapée par une voiture me divertisse beaucoup. 

Pourtant, une bourrasque plus violente que les autres me fait inhaler une grande bouffée d'air polluée par cette odeur. Une grimace tend à déformer les traits de mon visage lorsqu'une évidence me frappe : Il y a beaucoup plus de sang que prévu. 

Mon rythme cardiaque s'accélère à mesure que je prends pleinement conscience de cette information. Dans le même temps, la montée d'adrénaline qui parcourt mes veines m'incite franchement à me dépêcher. Pourtant lorsque ma tension atteint son point de non-retour, mon instinct de combattant prend la relève en balayant mon esprit. 

La saturation qui assaille mon cerveau se fait annihiler par lui, forçant mon attention sur l'ensemble des détails présents dans mon environnement. Comme les chênes profondément marqués par le froid de l'hiver, avec leurs feuilles mortes qui craquent sous mes pieds et le hibou plus haut sur une branche qui épie les moindres de mes faits et gestes. 

Finalement, c'est l'odeur insoutenable de sang qui me ramène les pieds sur terre. Et malgré mon envie aussi morbide qu'irrépressible de découvrir le carnage qui se joue à plusieurs mètres devant moi, mon corps est forcé de s'immobiliser. 

La simple vue d'un mouvement suspect dans le buisson que je viens de dépasser, déclenche une véritable alarme dans ma tête et accapare désormais toute mon attention. Je ne réagis pas immédiatement, jusqu'à ce que ma balle glisse entre mes doigts toujours à l'abri dans mon sweat. Comme si elle prenait un malin plaisir à me rappeler que je ne suis pas un être infaillible, surtout pas contre un titan mystique de plusieurs millénaires. Qui en plus de ça, s'est récemment découvert un passe-temps glauque, celui de massacrer les jolies blondes. 

Après des années d'emprisonnement, il aurait pu tout simplement tirer son coup en priant pour que Zeus ne se préoccupe pas de son absence. Malheureusement, j'ai l'impression que supporter le poids de l'univers sur ses épaules l'a bien fait disjoncter. Et même la meilleure des psychologues risquerait de sombrer dans la démence avec un patient aussi atteint. Pas forcément à cause de sa nature mystique, mais plutôt de sa folie alimentée par des millénaires de tourments qui lui ont torturé l'esprit.