Une vengeance à haut risques.

XX.

Janvier 2016, l'île de Nifelheim.

Point de vue de Nathan Mendes.

Ma gorge se serre face à la gigantesque masse noire de Nifelheim qui se dessine dans la pénombre. Il y a trois ans je suis mort ici, lentement et dans la souffrance. M'évader de cet enfer a été comme une renaissance pour moi, alors le fait de revoir les falaises de cette île m'effraie au plus haut point. D'ailleurs j'ai encore plus peur qu'avant et je n'aime pas cela. Je pense qu'après avoir retrouvé le goût des petits bonheurs d'une vie normale, je ne peux plus revivre dans cet enfer, je n'en suis plus capable. Maintenant j'ai beaucoup trop à perdre. Je pousse un soupir agacé. Je n'en reviens pas d'avoir penser cela. Je sais très bien que cela me rend faible et vulnérable, mais cela fait tellement longtemps que je ne me suis pas senti aussi bien et aussi vivant que je me suis doucement laissé glisser vers ce bonheur factifs. Et puis il y a Sarah. Elle a le don de me faire rire et de me rendre heureux malgré tout ce qu'il s'est passé. Avec elle, tout parait tellement plus simple que je me sens plus fort. D'ailleurs, c'est ce que je veux être à ses yeux pour la rassurer. Je ne veux pas lui montrer à quel point j'ai peur du général pour éviter qu'elle panique. De plus je sais qu'elle se reprochera ma mort si je me fais tuer ce soir alors je dois être fort, pour elle. Je ne veux plus qu'elle pleure à cause de moi, j'ai fait trop de mal autour de moi pour mériter ses larmes. Parfois je me demande pourquoi m'a-t-elle aidé ? Pourquoi m'a-t-elle couvert sachant que j'avais des grenades et des chargeurs dans mes poches ? Qu'est-ce que j'ai fait pour qu'elle m'accorde autant de confiance et de gentillesse ? Je n'ai pas de réponses à ces questions mais il est impensable qu'elle devienne malheureuse par ma faute. Je m'en voudrais même à six pieds sous terre. Et puis j'aime trop le sentiment qui m'envahi quand je la protège. C'est sûrement égoïste de ma part mais j'aime la voir sourire. C'est comme si elle allumée une lumière dans ce monde de ténèbres, comme si son bonheur ravivé le mien. Il est donc hors de question que le général gâche tout cela. Un sentiment étrange m'envahis soudain. Je veux me libérer des ces chaines et du marionnettiste qui me contrôle, autant pour mon bien que pour celui de Sarah.

Je resserre mes doigts autour de la crosse de mon arme semi-automatique et jette un coup d'œil à Ali. Il est concentré sur la barque silencieuse qui s'éloigne peu à peu de nous. Peter vient de nous déposer au pied de la falaise nord-est sur les rochers émergeant de l'eau. Nous attendons son signal pour escalader la paroi rocheuse. Tout à coup, la voix chuchotant d'Ali me demande :

« Ça va ? »

Je sais pertinemment que cette question n'est pas anodine mais je fais comme si de rien n'était. Le regard posé sur la surface plane de l'océan, je réponds calmement :

« Toujours, ai-je dis à mi-voix.

- Je te connais assez pour savoir que quand tu dis ça, c'est que quelque chose ne va pas, reprend-t-il sur un ton sérieux. J'ai besoin de toi au meilleur de ta forme et bien concentré.

- J'y suis. Ce n'est pas ce soir qu'ils vont voler ma vie, rassure-toi. »

Je le sens soupçonneux mais je n'essaie pas de le convaincre, aucune envie. Et puis je sais que Sarah nous écoute. Soudain, la voix de Peter annonce dans mon oreillette :

« Il n'y a personne, vous pouvez y aller. Il vous reste 5 minutes.

- Reçu. »

Nous escaladons avec facilité la roche humide. Silencieusement, nous entrons dans la cabane qu'occupé la sentinelle il y a 10 minutes. Je ne suis jamais monté ici alors mes yeux font machinalement un rapide tour des lieux. Il y a une chaise près d'un trépied où est positionné un fusil de précision pointé vers une fenêtre qui donne sur l'océan. A ma droite une autre ouverture me permet de voir un autre poste de surveillance. Il n'y a rien d'autre. L'ambiance est toujours aussi morte sur cette île, comme quoi dans certains endroits rien ne change. Ali déplace le corps de la sentinelle que j'ai abattu afin de prendre sa place.