5.

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J'ai été voir mon psychologue aujourd'hui, j'ai également croisé Cullen qui sortait lorsque je suis entrée.
On s'est lancé un regard complice et imperceptible, puis la porte s'est refermée sur le lien qui filait entre nos yeux.

Je me suis demandé s'il allait m'attendre je ne sais où, si on allait passer à nouveau un peu de temps ensemble après la séance. Cela m'a légèrement déconcentré. J'ai tout de même raconté ma semaine à monsieur Obst qui a pris des notes, puis on en a discuté. Mais je sais qu'on fond, c'était moi qui parlait le plus.

En sortant, j'avais pris un rendez-vous, même jour même heure, avec lui la semaine suivante. J'ai traversé la salle d'attente et j'ai descendu les trois marchés qui me séparaient encore du trottoir, Cullen était là.

-Salut, a-t-il dit.
-Salut, ai-je répété.

J'ai observé les valises qu'il avait en dessous des yeux, imaginant les nuits blanches qu'il devait subir pour posséder de si importants cernes.

-Tu veux qu'on mange quelque-chose ?
-Non.

Il a froncé les sourcils.
-Je voudrais bien marcher, par contre.
Il a souri, a hoché la tête.

Alors on a marché, on a aussi discuté.

-Pourquoi tu viens chez Obst, toi ? m'a-t-il demandé.
-Je fais une dépression, il paraît. J'ai perdu mon père il y a plusieurs années.
-Je suis désolé.
-Je sais, tout le monde l'est. Et toi, pourquoi on dit que tu es fou ? C'est bien ce que tu m'avais d..
-Je m'en souviens.

Il a levé les yeux pour regarder le ciel.

-Je pense beaucoup trop, c'est pour ça. Pour simplifier. Tu te trouves dépressive ?
-Je ne sais pas.
J'ai suivi son regard.
-Je ne sais pas exactement ce que c'est qu'une dépression, mais je suppose que je vais bien, moi.
-Tu es heureuse ?
-Non.

J'ai ri amèrement.
-Je le vis très bien.
J'ai souri.

-Et puis, c'est quoi le bonheur ?
J'ai ri un peu plus fort, il a ri aussi. On s'est jeté un coup d'œil.

-Tu ne voudrais pas me dire un autre truc sur toi ? a-t-il questionné.
-Que veux-tu savoir ? Je n'ai pas grand chose à dire.

On s'est assis sur un banc qu'on a trouvé et on s'est mis à fixer les nuages qui se formaient dans le ciel. Je ressentais cette chose étrange qu'était de me sentir inintéressante, de ne plus savoir où me mettre. Avant, je ne m'étais jamais posé la question. Mais j'ai fini par dire quelque-chose, puisqu'il ne répondait pas à ma question.

-Je ne sais pas.
-Tu ne sais pas grand chose.

Après, on s'est chacun raconté notre quotidien banal à en mourir, jusque neuf heures environ.

Quand j'ai jugé qu'il se faisait tard, j'ai secoué la tête, puis je me suis levée.

-Merci pour la discussion, Cullen.
Alors il s'est levé à son tour.
-Tu t'en vas ?
-Oui. Regarde.
J'ai pointé du doigt le ciel menaçant.
-D'accord.

Ensuite, il a posé sa main sur mon épaule et on s'est fait la bise, puis je suis partie sans me retourner.

Fade, volume 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant