Je ne suis plus retournée chez Cullen après ce jour-là, cela m'avait mise trop mal-à-l'aise. On s'était vu très souvent et ça s'était toujours bien passé. Il me faisait bien rire et il m'était arrivé de rêver la nuit que le vent soufflait dans mes oreilles et que son amour me réchauffait, que mon rire raisonnait haut, haut, haut, et je me réveillai dans mon lit, le sourire aux lèvres. Je semblais goûter au fruit acidulé du bonheur.
Je suis allée voir monsieur Obst un jour, après en avoir longuement discuté avec ma mère, pour lui dire que je n'avais plus besoin de ses services. Que j'allais mieux. Il m'a accueillie et on a eu une séance normale, puis à la fin, je le lui ai annoncé.
-Je vais arrêter de venir, à présent, ai-je dit, je me sens mieux, vous savez. J'ai retrouvé un certain goût à la vie. C'est en partie grâce à vous, ai-je menti, je vous remercie de m'avoir aidé et j'espère que nos chemins se recroiseront,...enfin, non..., pas vraiment, enfin, vous comprenez....
-J'en suis certain, a-t-il dit tout bas, j'en suis certain. C'est une bonne chose, ce que vous me dites là.
Je me levai et ramassai mes affaires, le remerciai alors qu'il hochait pensivement la tête. Je m'apprêtais à sortir lorsqu'il me rappela.
-Vous devriez arrêter de fréquenter Cullen Krieg.
Je n'ai rien répondu, j'ai seulement froncé les sourcils et j'ai disparu dans la salle d'attente. Toute gênée.Je l'ai retrouvé ce jour-là, on est allé dans un fast food et on a été regarder un film sur une place publique, assis par terre sur les pavés. C'était chouette mais c'était loin d'être comme dans les films, c'était loin d'être romantique. Cullen était comme d'habitude, mais je ne pouvais plus le regarder de la même façon. Je voulais lui demander s'il avait raconté au docteur qu'on passait du temps ensemble, j'étais redevenue méfiante.
Cette incertitude créait une distance tout nouvelle entre nous, je ne me sentais plus aussi bien à ses côtés. Peut-être que de mauvaises idées me montaient simplement à la tête, mais j'étais trop dans le feu de l'action pour me poser réellement. J'ai tout de même attendu la fin du film et j'ai fini par craquer.
-Est-ce que le psy sait, pour nous ?
-Pas à ma connaissance, a-t-il souri.Je m'en suis directement voulu. Obst avait simplement dû nous apercevoir dans un parc ou un café, je ne sais pas, j'aurais pu y penser.
-D'accord, ai-je soupiré. Je suis désolée, j'ai imaginé que tu avais pu lui dire.
-Oh, ce n'est rien. Tu as l'air fatiguée.
-Oui. À propos de fatigue, tu n'arrives toujours pas à dormir ?Le pauvre faisait des insomnies depuis des années, jamais ça n'avait cessé. Mais il n'arrêtait jamais de me dire que depuis quelques mois, depuis qu'il avait emménagé à SF, c'était différent.
-Non, les médicaments n'y ferons rien.
-À quand remonte ta dernière heure de sommeil ?
Le silence de la réflexion s'installa entre nous alors qu'on marchait tous les deux. Il faisait froid et je frissonnais de temps à autre, attendant sa réponse.
-Une semaine, je crois.
-Tu vas passer une nuit dans un hôtel un de ces jours?
-Je ne sais pas, écoute, c'est compliqué... s'agaça-t-il.
-Je suis désolée, d'accord ? Je me fais du souci pour toi. Et Dieu sait que ça n'arrive pas souvent alors sois gentil tu veux.
-Oh, pardon.
-Viens passer une nuit à la maison.J'avais dit ça sans réfléchir, sans penser à ma mère ou à n'importe quoi, mais je l'avais dit. Ses yeux fatigués se levèrent vers moi et ce geste m'apparût comme s'il avait usé ses dernières forcespour y parvenir. Son regard fut traversé d'une étincelle de soulagement. Ou d'espoir, c'est plus commun.
-Oui, allez, ça te fera du bien. Je te jure que ça ne m'embête pas.
-Bon, alors d'accord, merci.
Et il sourit.

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Fade, volume 1
Ficção GeralElle était si fade elle voulait juste exister.. Poetokyo . © 2016