Magies et Fascination

Partie 1: La Tour Sombre - chap VI

En raison de la fête de la veille et de l'heure tardive à laquelle ils étaient partis se coucher, Alistair ne passa prendre Stéphanie que vers onze heures.

Au cours de la soirée, Alistair en avait appris beaucoup sur le caractère de sa condisciple. La jeune fille avait animé la réception de sa joie de vivre et de sa bonne humeur, charmant tous les avaloniens présents. Sa sociabilité et son grand sourire avaient définitivement conquis les mages. Au moment du dessert, elle avait même insisté pour transformer le pavillon de Jan en discothèque, allouant à chaque convive une tâche particulière de la décoration. Bien vite, apparurent un projecteur laser, une lumière noire, une sono, une collection de CD et des spots multicolores. Jouant à la fois les DJ et les animatrices, elle emporta les avaloniens dans un tourbillon de danses qu'elle sut choisir avec un instinct sûr. Formant les couples lors des danses de salon, invitant elle-même les plus récalcitrants sur la piste, il est certain qu'elle fit de cette soirée un moment inoubliable.

Cependant, l'heure avançant, les mages finirent par partir et, bientôt, les jeunes gens se virent obligés de laisser Jan se coucher. Sur le chemin de leurs bungalows, Stéphanie fit une proposition à Alistair.

— J'ai vraiment pas envie de me coucher. Ça te dirait un petit bain de minuit ?

— Quoi ? à cette heure ci ?

Il se mordit la lèvre, se maudissant d'avoir répondu sans réfléchir. La jeune fille avait levé un sourcil et affichait un sourire moqueur. Il reprit bien vite, avant de subir la remarque ironique qui n'allait pas manquer de tomber.

— Oui, bon, je sais ! un bain de minuit c'est en pleine nuit ! non, ce que je voulais dire c'est : maintenant ? tu n'es pas fatiguée ? Et puis, on n'a pas nos maillots.

— Bof ! c'est pas super nécessaire, il n'y a personne sur la plage à cette heure.

La bouche d'Alistair s'arrondit en un « O » muet. Il chercha vainement quelque chose à répondre, mais ne trouva rien. Il décida donc de laisser glisser la remarque et de changer de sujet.

— Après l'entraînement de ce matin, la baignade cet après-midi et la fête de ce soir, j'avoue marquer un peu le pas.

Pour la première fois depuis qu'il connaissait la jeune fille, Alistair lut de la déception et un peu de tristesse dans son regard. Il se sentit coupable et ce sentiment lui serra le cœur.

— Tu y tiens tant que ça à ton bain de minuit ?

Stéphanie ne répondit pas, elle se contenta de hausser les épaules en soupirant, la mine toujours aussi triste. Il sentit qu'elle ne disait pas tout.

— Qu'est-ce qu'il y a, Steph ? reprit-il en posant sa main sur son bras.

— Je m'en fous du bain, Al. Je veux juste ne pas aller me coucher.

Toute sa bonne humeur avait disparu et Alistair mit quelques instants à comprendre ce qui n'allait pas.

— Tu avais des amis proches dans l'avion ?

Il s'en voulait de ne pas avoir percé cet abcès plus tôt, mais elle mettait tant d'énergie à paraître insouciante et sereine, qu'il ne pensait pas qu'elle pût en souffrir. Lui ne connaissait que Daniel à bord du Boeing et il le savait en sécurité. La mort des autres passagers l'avait touché, bien sûr, mais pas à un niveau intime.

— Proches ? répondit-elle en secouant la tête, non pas vraiment. Mais je travaillais depuis longtemps avec certains d'entre eux. Et puis, il y en a un, Yves, qui aurait pu le devenir... il est mort à cause de moi.