10; Reese

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C'EST LE JOUR J. C'est le jour où je retourne à l'école après une semaine et trois jours de convalescence. L'idée ne me plait pas vraiment. Certes, je suis beaucoup moins désorienté et plus à l'aise au sein de la ville, mais le fait de retourner à l'école... J'ai peur de la réaction des gens. Puisque personne ne veut me dire qui j'étais dans la passé, je n'ai aucun indice concernant la réaction de mes camarades de classe. Seront-ils enchantés de me revoir ? Déçus ? Soulagés ? Je ne pourrais jamais l'admettre à voix haute, mais j'ai la trouille. La veille, je n'ai pas dormi de la nuit à la simple pensée de retourner en société.

Cependant, je me suis encouragé à sortir du lit ce matin en espérant qu'au moins une personne dans ce bahut de protestants pourrait m'aider à comprendre. Callie sera présente, j'en suis certain. La dernière fois, notre conversation c'est très mal passé. J'ai été un peu brusque, je l'admets. Peut-être qu'elle s'ouvrira à moi si j'y vais plus en douceur. Enfin, c'est ce que j'espère.

Moira se tient dans le vestibule, un manteau sur le dos. Elle me fait signe de me dépêcher, tandis que je descends les escaliers à vivent allure. Lorsque je lève les yeux dans sa direction, je réalise à quel point elle ressemble à une Barbie. Une version plus studieuse, cependant. Sa queue-de-cheval blonde tombe dans le milieu de son dos, alors qu'un ruban de couleur rose la maintient en place. Elle porte un chemisier blanc parfaitement repassé ainsi qu'une jupe rose pastel. Son gloss à la fraise donnent un aspect de brillance à ses lèvres, tandis que son mascara lui donne l'air d'avoir des yeux de chiots.

Je vous présente Barbie Moira, studieuse et adoratrice de tout ce qui est rose et qui sent la fraise.

Je secoue la tête pour chasser l'image de ce jouet en plastique ridicule qui me vient à l'esprit. Un sac à dos bleu marin se trouve près du porte-manteau. Je parie que c'est celui qu'Annie m'a acheté pour mon retour à l'école. Il est horriblement laid, du style "le-gars-qui-le-porte-est-probablement-toujours-puceau".

« Allez, Reese ! Dépêche un peu. » s'exclame Moira en me souriant.

Je l'ignore de mon mieux, tandis que j'enfile un manteau qui me semble potable et qui me réchauffera en ce mois de novembre avancé.

Au moment où nous nous apprêtons à partir, Annie fait son apparition dans le vestibule. Elle porte un col roulé ainsi qu'un pantalon noir. L'air songeuse, ma tutrice s'appuie contre le mur et me regarde.

« - J'ai signé tes papiers pour la psychologue. Tes séances devraient commencées la semaine prochaine.

- Je... Je... »

Je suis trop surpris pour parler. Alors, comme ça, Annie est prête à signer mes papiers ? J'ai bien cru que c'était cause perdue en voyant toute la paperasse traîner sur le comptoir pendant plus d'une semaine. Je me suis trompé, à vrai dire. Je vais avoir des séances avec un psychologue qui pourra peut-être m'aider à comprendre qui je suis et ce qui m'a amené à disparaître. C'est la première fois que j'ai envie de remercier Annie.

Ce n'est pas pour autant que je le fais.

« - Je vais faire des courses, cet après-midi. S'il y a des trucs que tu aimerais que je t'achètes... dis-le moi.

- Des trucs ?

- Reese, j'ignore ce que c'est que d'avoir un garçon à la maison... Peut-être as-tu besoin de crème à raser. »

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