Trash America

Avant-propos

Cet avant-propos est proposé par @Mamasse, lecteur et critique. Merci à lui pour son engagement, et sa plume!

Par @Mamasse, critique littéraire

L'Amérique. C'est certainement l'idée qui fit fantasmer le plus d'aventuriers depuis près de 500 ans. Depuis qu'en 1524, missionné par François 1er, Roy de France, Giovanni da Verrazano entreprit l'exploration de la zone comprise entre la Floride et Terre-Neuve.

Commença dès lors l'incroyable aventure de la « Frontier », cette ligne virtuelle et mouvante, ce concept purement états-uniens, dont le sens échappe à la plupart des non-américains, et vulgarisé par l'expression réductrice de « conquête de l'Ouest ».

Alors considérée comme la Terre Promise par tous les peuples opprimés de la vieille Europe, ce qui n'était encore que l'embryon de ce qui deviendra les Etats-Unis et le Canada, a ouvert grand ses bras à toutes les âmes en quête de rédemption, de nourriture, d'oubli ou de salut, à ceux qui voulaient échapper à la justice, violeurs, criminels et assassins.

Mais naïfs furent ceux qui imaginèrent cette alternative plus facile que la voie qui leur était destinée chez eux. L'Amérique a sélectionné ceux qui auraient la chance de la fouler au pied. Une sélection naturelle implacable, ou seul le plus fort survit.

La dureté de la vie, la sauvagerie des peuples autochtones et la loi des armes ont fait le tri et déterminé ceux qui allaient devenir les américains. Il y eut beaucoup de braves, d'hommes et de femmes courageux. Mais il y eut aussi beaucoup d'esprits vils, ceux qui tuaient en tirant dans le dos, toute la fine fleur des crapules, et les plus passives des putes sous laudanum.

Il serait illusoire de penser que l'homme ayant su maitriser les contraintes du territoire, en soit devenu le maître. La société américaine d'aujourd'hui n'est rien d'autre qu'une résultante de la sélection que le territoire a mené à l'heure de sa conquête, cette terrible sélection qui s'effectue toujours, mais plus subtilement.

A l'heure actuelle, les Etats-Unis fonctionnent toujours de la même manière. C'est la loi du plus fort qui prévaut encore. Le plus fort économiquement, le plus ingénieux, le plus roublard, le plus beau, ou bien encore celui qui a la meilleure santé. Il faut être le meilleur pour assurer la pérennité de sa descendance. Je le sais, j'y vis, j'en suis un.. américain.

Il me semble que Vernon Morvan, - cet auteur quelque peu mystérieux, dont on ne sait en fin de compte pas grand-chose - a excessivement bien cerné les problématiques et les enjeux de la société américaine. Nous avons récemment découvert à l'écran le fameux film « The revenant », issu de l'œuvre éponyme exceptionnelle de Michael Punke. Cette œuvre illustre parfaitement une époque révolue de l'histoire américaine (1823 -1824). Il me semble que Vernon Morvan, dans son style décomplexé et direct, arrive à traduire efficacement les angoisses et les peurs de la société américaine aujourd'hui, en 2016. Son écriture est efficace, très violente, absolument pas consensuelle et franchement surprenante. Son roman est un thriller, incontestablement, mais il me semble qu'il aurait aussi bien pu être considéré comme une œuvre du genre « horreur », tellement son intrigue est machiavélique. Vernon Morvan a parfaitement cerné cette société unique et plus complexe qu'on se plait à la penser partout ailleurs. Son personnage, Tommy Beau, est un pragmatique. Il aborde la vie de manière tout à fait rationnelle. Il n'a rien, il ne possède que sa Victory, ses deux poings et ses valeurs. Il est fier d'être américain. Il sait qu'il est la progéniture de survivants, issu des plus forts. Il est inscrit dans ses gênes que rien ne viendra le secourir s'il ne se charge pas lui-même d'assurer sa survie.

A peine sorti de l'adolescence, Tommy Beau doit à son tour faire face à ce que l'Amérique peut produire de pire. Il est confronté à la violence économique et sociale, à la rupture scolaire et familiale. Il doit sauver sa mère de son addiction à la dope, et affronter la duplicité perverse et mystique d'une aberration de la nature, Wilson McConnan.

Ce roman est à découvrir absolument.