Juste pour le jeu...

2. Première nuit

Il me ramena jusqu'à chez moi. Étant émancipée, j'avais un appartement à moi toute seule.

Je l'invitai à entrer et il flasha sur la PS4 dans mon salon. Il s'assit par terre contre le canapé après avoir allumé la console.

Vas-y fais comme chez toi! avais-je envie de lui balancer.

Il m'énervait déjà.

Je respirai un bon coup avant de venir m'installer dans ses bras, un sourire de façade accroché à mes lèvres. Il prit une manette et je l'imitai. Il inséra le jeu Until Dawn dans le lecteur et le menu s'afficha. 

Je le regardai hébétée car le jeu se jouait en solo mais il me tendit la manette, en me disant que je pouvais commencer. Je venais de l'acheter et mon cœur était tout emballé à l'idée d'avoir peur. La partie commença et je tremblai. On rentra directement dans le feu de l'action et ma peur fut mise à rude épreuve.

Soudain, quand je frissonnai de tout mon être, Cameron me fit sursauter en me pinçant les côtes.

— Va te faire foutre! laissai-je échapper.

Il me fit les gros yeux et, sans un regard, je me concentrai à nouveau.

Il rit à gorge déployé, comme je devais m'en douter. Je tremblai toujours et mon dégoût face à cet être s'amplifia. Son rire m'exaspérait. Je lui lançai un regard noir, le faisant taire puis il serra légèrement le bras autour de mes épaules pour me ramener légèrement vers lui, signe qu'il essayait d'être gentil. Essayait.

Mon téléphone sonna.

Je m'écartai de lui en mettant le jeu en pause et saisis mon portable avant de lire le nom de Noah sur l'écran.

Noah.

Noah était mon frère. Il avait cinq ans de plus que moi et habitait à Paris avec sa copine. On avait toujours été très proche après le départ de ma sœur et il m'appelait toutes les semaines. Je ne pouvais – voulais – pas refuser l'appel. Je m'excusai auprès de Cameron et décrochai.

—  Allô? commençai-je.

— Salut Charlie!

— Noah!

— Qu'est-ce que tu deviens?

— La rentrée s'est bien passée.

J'omis volontairement de parler de Cameron. Sujet tabou avec mon frère. Il ne l'avait jamais apprécié. Sûrement son instinct protecteur.

— Mais j'imagine que toi tu t'éclates bien, repris-je en pensant à sa vie là-bas.

— Ouais, on fait beaucoup de sortie avec Romane.

Romane était sa petite-amie.

— Et mon école d'art est juste top, mon premier cours s'est super bien passé! Je pensais venir le week-end prochain. Tu pourrais m'héberger?

— Oui pas de problème. Il y aura Romane?

— Non, sa rentrée est trop chargée. Je t'appelais pour te dire ça, j'ai un rendez-vous là, bisous, Charlie!

— Bisous.

Il raccrocha tandis que Cameron me regarda, abasourdi. Évidemment, il semblait vexé que je n'aies pas parlé de lui. Mon frère aurait trop mal réagi, je voulais limiter les dégâts.

Il ouvrit la bouche pour commenter quand je levai la main pour lui dire de se taire. Il fronça les sourcils, vexé d'avoir été traité de la sorte. Je secouai la tête et allai prendre un verre d'eau dans la cuisine.