Je me laisse tomber sur le lit comme un sac à patate épuisé. Je ferme les yeux de plaisir et je me laisse aller.
Mais ma mère, sans pitié, n'a pas la même idée que moi et m'appelle. Enfin elle s'égosille.
- Luc, bouge-toi et met la table, merci !
Je grogne vaguement une réponse ressemblant à un « oui ». Quand ma mère dit quelque chose, j'agis comme un bon petit soldat qu'elle a fait de moi. Et elle nous dirige ma sœur et moi d'une poigne de fer. Et désobéir revient à défier le diable nous apportant que des problèmes. Je relève donc ma carcasse pour aller mettre la table.
Je sors de ma chambre aussi grande qu'un cagibi, ce qu'elle était d'ailleurs à la base. Je traverse le tout petit couloir où trois portes se battent en duel ; la salle de bain, la chambre de maman et celle de Suri, ma petite sœur. Je rentre dans le salon et je me dirige vers la partie cuisine. Les deux pièces sont séparées par un petit bar. En passant près de ma mère, assise sur le canapé à lire le courrier, elle m'attrape par mon t-shirt. Je baisse donc les yeux vers elle, elle me regarde avec un sourcil levé et les coins des lèvres relevées. En soupirant bruyamment je l'embrasse sur la joue. Et elle se recule en gloussant de plaisir comme une adolescente.
- Tu es contente ? Je lui demande d'un air vaguement énervé.
Ce que je ne suis pas. J'aime juste l'ennuyer un peu. Après tout c'est mon rôle de fils.
- Pff, quel ingrat tu es ! Me répond-t-elle.
Je me retourne tout sourire. Ce que les habitudes de la vie sont agréables. Dans la cuisine je prends ce qu'il faut pour le couvert et je place le tout sur la petite table calée dans un coin du salon.
Chose faite je me laisse une nouvelle fois tomber comme un sac à patate épuisé mais dans le canapé cette fois ci. J'observe maman, qui est concentrée sur une facture me semble-t-il, elle est encore assez jeune. Assise en tailleur, elle mordille l'ongle de son pouce. Son front est plissé et son petit nez en trompette est légèrement rouge, sûrement à force de le gratter un tic qu'elle a quand elle réfléchit, ses yeux marrons sont pleins d'amour, enfin quand elle ne nous crie pas dessus, et ses cheveux blonds sont tout en désordre. Étrangement ils me font penser à ceux de Miss Pervers alias Isabelle la pompon girl. Les siens aussi semblent jamais coiffés, constat que j'ai fait après des années à nous croiser dans les couloirs des établissements appelés écoles. Je la revois encore dans ce couloir à me lancer cette foutue balle. Je mets quelques secondes à réaliser qu'on me parle.
- Lucas ! Lucas ! Me crie maman.
- Hum ? Pardon tu disais ?
Elle fronce les sourcils tout en plissant des yeux.
- A quoi tu pensais ?
- Au fait que tu faisais encore jeune pour une vieille comme toi. Je lui réponds avec un sourire diabolique.
Et sa vengeance ne tarde pas, elle me frappe le haut du crâne violemment.
- Aï ! Mais... !
- Tu n'as pas à traiter ta mère de vieille ! Et ne fais pas la moue.
Je me frotte la tête en faisant forcement la moue. Mais bizarrement mes pensées se dirigent une nouvelle fois vers la petite blonde désagréable de ce matin. Je ne m'attendais vraiment pas à la réplique qu'elle a dit ce midi. Elle est tellement tout en... retenue. Du moins c'est l'impression qu'elle m'a toujours donné après toutes ses années en la regardant distraitement de loin. Cette fille donne une impression d'inaccessibilité, comme si personne ne pouvait vraiment l'approcher intimement.
- A quoi tu penses ?
Maman a le don incroyable pour deviner certain truc nous concernant ma sœur et moi. Et c'est machinalement que je lui réponds.
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Un coup de foudre...
RomanceIls sont diamétralement opposés. Et pourtant irrésistiblement attirés l'un par l'autre. Les existences d'Isabelle et de Lucas ont toujours gravité sur le même plan mais sans jamais se croiser. Lorsque leur regard se percute pour la première fois...