CHAPITRE CINQ

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Le jeudi, je passe la journée un peu impatient et obnubilé par ma future visite à un certain bouclé. C'est débile et enfantin, mais je n'arrive pas à arrêter d'y penser. Lorsque la sonnerie se déclenche, annonçant la fin des cours avec, je sors de ma salle et pars déjà hors de l'établissement. Cependant, quelqu'un m'attrape le bras et je me retourne vers Dan qui fronce les sourcils :

- Tu vas où ? On a dit qu'on allait en ville tous ensemble.

Je le regarde et réalise que j'ai complètement oublié. Je passe une main embarrassée derrière ma nuque et réplique :

- J'ai déjà quelque chose de prévu, désolé. Une autre fois.

- Tu vas faire quoi ?

Et bien-sûr, on met toujours plus de temps à répondre lorsque nous mentons que lorsque nous disons la vérité.

- Je dois m'occuper de mes frères.

- OK. Envoie-nous un texto si tu veux nous rejoindre.

- Pas de problème, merci et bon appétit.

- T'es bizarre, le nouveau. lâche-t-il avant de rejoindre les autres.

C'est la première fois qu'il m'appelle ainsi et ça creuse comme un fossé, un espace, entre nous. Pourquoi je ne lui dirais pas après tout ? Pourquoi je ne leur dirais pas ? Je ne fais rien de mal. Je souffle et prends le bus. Même ligne, même chemin, même hôpital, même chambre.

Une fois devant la porte, je me rends compte qu'il est un peu plus de dix sept heures quarante. Je frappe et s'en suit le même " oui ", bien qu'il paraît un peu plus vivant aujourd'hui comparé aux autres fois.

- Hey, je le salue.

- Salut.

Il est assis sur un fauteuil à regarder l'extérieur alors je lui propose :

- Tu veux qu'on aille marcher un peu ?

Il se tourne vers moi puis hoche positivement la tête telle une machine. Parfois, Il me paraît si loin de moi alors qu'il est si près. C'est si étrange. J'ai cette impression qu'il est complètement déconnecté et c'est assez intimidant à vrai dire. Il se lève ensuite et enfile une veste sans grande hésitation malgré son sweat épais.

- Tu as si froid que ça ? Parce qu'il fait plus de vingt degrés dehors, je le préviens.

- Ah, je ne savais pas.

Je me rends alors compte d'à quel point il est coupé de la réalité. Il repose sa veste et enfile des chaussures. Nous prévenons une infirmière que nous sortons nous promener et elle me dit d'alerter immédiatement quelqu'un dès le moindre problème. À ce point là ?

Nous prenons le soleil dans la figure dès lors que nous nous trouvons dehors.

- Tu avais raison.

- À propos de quoi ?

- La chaleur. il grimace, en fronçant le nez face à la luminosité.

Je souris et marche. Je remarque qu'il est très retissant et épie chaque personne du regard.

- Ça va le faire ?

- Je, ouais.

Il cache ses mains dans son pull noir trop grand pour lui et marche timidement près de moi.

- Dis-moi si ça ne va pas.

Il ne commente pas et nous avançons sans parler. Je le laisse profiter et préfère me taire de toute façon. Il part s'assoir sur un banc et je le suis pour faire de même.

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