12 ~ Question-Réponses.

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Mercredi, suivant les conseils de Célia, j'arrivai au stade de Caudron une demie-heure après celle que Jonas m'avait indiquée sur son bout de papier. D'ailleurs, depuis qu'il m'avait donné ce dernier, nous n'avions pas eu la moindre interférence mentale; lui comme moi devions nous barricader dans nos pensées, à mon avis. Ainsi, je m'approchai de la pelouse du terrain en appréhendant un peu ce qui allait bien pouvoir suivre.

Quand, à l'angle du gymnase, je découvris le terrain de foot de mon rêve, je ne fus pas vraiment surprise. Et quand je vis un groupe de jeunes garçons courir un peu partout la balle au pied, je ne le fus pas plus. Je me doutais bien que Jonas m'avait donné rendez-vous ici pour que je regarde un entraînement depuis le "monde réel". Par contre, la raison m'était toujours inconnue.

Patiemment, en me disant que je finirai bien par le découvrir tôt ou tard, je me dirigeai vers les gradins en essayant de ne pas me faire trop remarquer, et m'y installai. Contrairement à la scène que j'avais vécue dans mon rêve, je ressentais la brise glaciale de ce mois de février et m'enveloppai plus étroitement dans ma doudoune. Le col remonté jusqu'au nez, j'observai alors les garçons en short courant à la lueur des spots éclairant le terrain. Le soleil était couché depuis une bonne demie-heure, mais des traces orangées étaient toujours imprégnées dans le ciel grisâtre. Au fur et à mesure que la nuit prenait ses droits, une brume vint de nouveau se poser sur ce paysage, donnant un air à la fois similaire et contrasté au spectacle de mon rêve.

Comme la dernière fois, les joueurs répétaient plus ou moins les mêmes exercices. Sauf que cette fois-ci, mon regard les balaya à la recherche d'un joueur précis. En plus de la distance et de la petite nappe de brouillard qui commençait à se poser, ce fut difficile de le reconnaître tout simplement parce qu'il était totalement différent de celui que j'avais l'habitude de voir. Oui, ce garçon qui tapait joyeusement dans la main de ses équipiers, distribuant des claques amicales dans leur dos, celui qui baissait la tête, concentré, quand l'entraîneur donnait ses instructions... Oui, ce garçon était bien Jonas, celui qui, en cours, était froid et méprisant avec tout le monde, celui qui tenait tête aux professeurs et avait toujours un air morose et supérieur. Comment une simple histoire de ballon pouvait-elle autant transformer un homme?

J'aimais ce Jonas footballeur. Il semblait tellement... sincère. C'était bête pourtant comme impression: je me situais à plusieurs dizaines de mètres de lui, il était enveloppé dans ma brume, et je ne voyais que sa minuscule silhouette se déplacer en contraste avec les spots qui l'éclairaient de l'autre côté. Et pourtant, c'était comme si je le voyais bien mieux à cet instant que lorsque je l'observais en cours à deux petits mètres de moi.

A la fin de l'entraînement, toute engourdie de par le froid et mon immobilité, je me levai et rejoignis directement la sortie. Cependant, alors que je venais de passer les grilles du portail, je me sentis comme... frustrée. Certes, j'avais aimé le voir s'entraîner, sauf que là je ne voyais pas vraiment à quoi tout cela rimait! Dans son mot, il m'avait dit que je trouverai des réponses à mes questions. Or, ce n'était actuellement pas vraiment le cas. Alors, je m'immobilisai devant ce portail, croisai les bras sous ma poitrine pour me tenir chaud, et attendis. Je ne savais pas vraiment pourquoi est-ce que je restai plantée là, ni même d'où me venait cette hardiesse, mais je ne pouvais pas rentrer chez moi ainsi. Ça aurait été comme... une perte de temps d'être venue ici si je partais maintenant, sans la moindre réponse.

Au bout d'un quart d'heure, quand je commençais à vraiment douter de ma détermination à rester ainsi immobile dans la nuit glacée dans une ruelle déserte, la porte du vestiaire grinça et découpa un carré de lumière sur le trottoir sombre, laissant des effusions de joie me parvenir. Un à un, les joueurs sortaient du local en souriant. Ils formaient une équipe qui avait l'air très soudée, et les voir aussi complices mettait du baume au cœur.

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