6/ La face cachée de Londubat

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La nuit était à son apogée, laissant le château gigantesque de Poudlard dans le silence total. J'étais allongé, depuis plusieurs heures, dans mon lit à baldaquin, sans parvenir à m'endormir. La lune m'éclairait le visage, dévoilant mon angoisse. C'était ce soir qu'il me fallait agir. Les paroles de Pansy résonnant dans mon crâne, je me levais en observant mes voisins endormis. Finnigan ronflait un peu, une main sur sa précieuse affiche de sa troupe favorite de Quidditch. Potter, lui, grognait dans son sommeil tout comme Weasley. Le seul qui manquait dans cette salle insonore, c'était ma future victime. Je l'avais entendu descendre les marches de bois menant à la salle commune, discrètement, quelques temps plus tôt. Je m'étais demandé ce qu'il allait faire alors que le couvre-feu avait frappé tous les esprits. Il me facilitait la tâche sans s'en rendre compte. 

Doucement, mes pieds nus touchèrent le parquet vernis et je me dirigeais vers l'escalier en colimaçon. Je prenais garde à la moindre de mes respirations, au moindre de mes gestes. Si quelqu'un me voyait, ce serait une catastrophe... Ou une chance ? Personne ne sembla éveiller par ma sortie et j'atteignis la pièce sans soucis. Assis sur un fauteuil, un hibou à côté de lui, Londubat sanglotait timidement. Il fixait la cheminée où ma lettre sincère avait été jeté sans remarquer l'ombre qui ondulait derrière lui. J'avais sorti ma baguette et je la brandissais nerveusement vers le dos de l'élève. Pourquoi pleurait-il, seul, un parchemin dans les mains ?Alors, aussi discret qu'un chat, je tordis le cou pour lire le papier qu'il froissait lentement.


Cher Monsieur Londubat,

Suite au décès de Madame Augusta Londubat le 2 mai 1998, la charge financière et sociale des patients Monsieur Frank et Madame Alice Londubat vous revient. Les progrès des deux patients étant importants, une nouvelle technique médicale ingénieuse sera, si acceptation, réalisée sur eux dans l'espoir d'une évolution positive rapide. 

Cette méthode étant novatrice, les coûts de cette dernière s'ajouteront aux frais de séjour à l'Hôpital de Sainte-Mangouste, domiciliée à Londres. La note finale vous est calculé ci-dessous:

21 254 + 6 321 = 27 575 gallions

Cette somme est à verser avant le 5 février 1999, sinon quoi les patients seront renvoyés à leur domicile. Merci de votre compréhension, avec nos salutations sincères,

les magicomages de l'Hôpital Sainte-Mangouste.


Comment de l'encre sur une feuille pouvait me procurer un tel désarroi ? J'avais envie de m'excuser, de l'aider. Je ne savais pas, tout comme la plupart de ses camarades, que sa grand-mère avait péri dans la bataille. Je n'avais pas le droit de rajouter des malheurs dans sa vie, je ne pouvais pas. Alors, anxieux à l'idée de la réaction de Pansy et soulagé de ne pas avoir à murmurer le sort, je reculais vers l'escalier, laissant le malheureux. Les marches grincèrent sous mon poids mais aucune oreille affûtée ne perçut ma remontée dans le lit aux draps rouges. Dans mon crâne, j'ouïs les plaintes du Gryffondor durant des heures et, sans arrêt, les mots de la fameuse lettre se plantaient dans mon coeur compatissant.



Le sommeil avait fini par m'emporter et ce fut lentement que, le lendemain, je me réveillais. Weasley et Potter claquaient la porte derrière eux, me laissant seul dans le dortoir. Finnigan et Londubat semblaient être sortis plus tôt que les deux exécrables Gryffondor. Mes jambes eurent du mal à me porter jusqu'à la chaise où trônait ma robe de sorcier. Je l'enfilais, sans grande envie malgré ce samedi radieux. Une semaine était passée depuis la rentrée mais, pour moi, un mois s'était écoulé. Je descendis dans la salle commune, repensant à la veille et, alors que j'étais dans mes pensées soudaines, je jurais voir le lourdeau, encore assis devant le feu éteint. Mais il n'y avait personne. J'avais vraiment l'impression que l'on m'évitait. Jusqu'à ce bruit. La porte grinçante du dortoir féminin qui s'ouvrait lentement, laissant apparaître le visage de Granger. Elle avait des cheveux en bataille, une mine fatiguée qui lui allait étrangement bien. Ses yeux pétillants à moitié endormis ne diminuaient pas son sourire d'ange. Une fois que son regard brumeux se posa sur moi, il se durcit et, sur un ton sec, elle demanda :

"Bien dormi ?

- Oui, très bien et... toi ? hésitais-je.

- Mal. Tiens, c'est pour toi."

Elle fouilla dans la poche de sa robe sombre et en sortit une lettre décachetée à l'emblème de ma famille. Furieux, je répliquais, en attrapant le parchemin :

"Où as-tu eu ça ?

- Calme-toi, rétorqua t-elle en me fusillant du regard. Je ne l'ai pas volé, si c'est ça que tu veux savoir. Neville me l'a donné, il l'a trouvé sur l'une des tables pendant la nuit et il avait peur que Harry ou Ron ne te joue un mauvais tour."

Bizarrement, ses yeux pleins de reproches m'assommèrent autant qu'un Impedimenta et je la crus sans problème. Malgré les apparences qu'elle montrait, je pensais qu'elle devait un minimum m'apprécier pour garder la lettre, si précieuse était-elle. 

"Merci... bégayais-je maladroitement. D'ailleurs, où est-il, Londubat ?

- Il est partit à Pré-au-Lard. Il ne m'a pas dit pourquoi mais... ne le dis à personne. Je sais qu'il te fait confiance, pour une raison que j'ignore encore."

Contrairement à Granger qui réfléchissait aux raisons de son départ, je savais exactement ce qu'il allait faire dans les boutiques bondées de la ville sorcière. Trouver un travail pour réunir les gallions nécessaires. Un silence s'abattit entre nous et elle marmonna qu'elle allait prendre son petit-déjeuner. Dans un élan sympathique, je m'exclamais en retour :

"Si ça te dit, on peux y aller ensemble."

Étonnée, elle acquiesça d'un hochement de tête avant d'ajouter :

"Avec plaisir, Drago."

Je lui fis le plus beau de mes sourire et, doucement, nous partîmes en direction de la Grande Salle. La discussion fut gênée mais nous arrivâmes à nous trouver des points communs bien que le fossé qui nous séparait était encore trop large pour que je puisse me sentir à l'aise avec elle. Je l'avais insulté, on l'avait torturé sous mes yeux et elle essayait d'être proche de moi. Les Gryffondor ne pouvaient-ils pas être aussi méprisants et prétentieux que leurs camarades avec le signe vert ? En harmonie, nos pas entrèrent dans la pièce où tout le monde était attablé. Parkinson, que je pus voir du coin de l'œil, faillit s'étouffer avec un verre de jus de citrouille. Agréablement, je me fis courtois et, d'un geste un peu absurde, lui montra une place, entre Potter et Lavande Brown. Elle s'y installa et je m'asseyais en face, joyeux. 

Une joie vite passée. Weasley, en nous voyant, devint aussi rouge que les tenues de Quidditch des lions, et, colérique, questionna sombrement :

"On peut savoir ce que vous faisiez, ENSEMBLE ?

- On discutait Ron, c'est tout, trancha Granger. Arrête ton numéro de petit-ami jaloux, c'est ridicule. 

- Ridicule ? répéta l'autre. C'est plutôt lui qui est ridicule !

- La discussion est close, conclut-elle. Drago est un Gryffondor et c'est absurde de le traiter autrement. (Harry ouvrit à son tour la bouche) Point final. 

- Merci Gran... Euh, je veux dire, Hermione."

La première fois qu'elle avait cité mon prénom, c'était plein de méfiance et de doute mais là, ses joues devenant pourpres, elle n'avait que de la sympathie dans la voix. Et mon ton fut le plus doux du monde en retour. Immédiatement, toute la haine que je pouvais avoir contre elle se dissipa et un creux au sein de mon estomac fourmilla. Elle avait dit que j'étais un Gryffondor. Et j'espérais qu'elle avait raison. Cette phrase, anodine pour l'émettrice, me remit du baume au coeur et je n'eus plus peur de mes amis Serpentard. Ils allaient comprendre s'ils étaient de vrais amis, comme le comprenaient Finnigan, Londubat et Hermione. 

UNE ANNÉE INATTENDUE (Dramione)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant