L'Atlantique, je veux la voir, et Joe, Auray

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   Les deux versions temporelles du professeur Xavier jouaient gros à laisser quatre rejetons avortés d'un projet militaire douteux sauver la planète, jugea l'X-men. Le monde aurait été mieux protégé par le commando de mutants américains que par des policiers au bord de la dépression et des êtres mécaniques en recherche d'un kébab. Sous ces obscures raisons, Cyclope se demanda s'il n'y avait pas là une logique profonde, philosophique. Pour protéger l'humanité et l'amener à s'introspecter, ne fallait-il pas qu'elle fût défendue par ses composants les moins humains justement ? 


   Si ces quatre individus, syncrétismes de la chair et de l'électronique, parvenaient à faire montre de vertus pour combattre leurs pendants qui en étaient démunis, les humains restés humains devraient en tirer un exemple presque larmoyant. Mais après ce retournement sentimental de Scott, il lui en vint un autre, plus cynique cette fois : ses congénères y prêteraient-ils attention ? En dégageraient-ils une conclusion et une morale à cette histoire ? Des sources, discutables au demeurant, faisaient état d'un cumul de deux-cents années de paix en plus de trois mille cinq-cents ans d'histoire. En dépit du manque de fiabilité inhérent à ce genre de faits et de leur optimisme confondant, l'information mouillait les yeux.


   Derrière le pilote, le reste de la cabine restait pantois. Les traits froids et l'attitude indifférente de Cyclope avaient suffi pour doucher le peu de sociabilité à laquelle les passagers étaient prêts à se soumettre. Pourtant, plus les quarts d'heure se suivaient, plus il abandonnait ses airs de pré-pubère puni, au point de dévoiler des rétines brillantes alors qu'il lança un regard à sa cargaison.


— C'est moi ou il pleure ? chuchota OXI-6.

— Non, je crois que tu as raison, alla en son sens Robocop.

— C'est qu'il a une vision perçante, mon frérot, se vanta Cordon de plage. Vous savez qu'il peut sauter en l'air ? Pour de vrai, je ne déconne pas.

— Moi, je peux faire aimer du Black Sabbath à une nonne de quatre-vingts ans, se la raconta Judge Dredd.
— Il est bizarre quand même ce Cyclope. Il râlait comme un fonctionnaire qui doit travailler jusqu'à 17h quand le professeur X l'a désigné pour nous piloter, et là il est tout émotif et ne cesse de se retourner vers nous, présenta OXI tout en se rapprochant de ses compagnons.

— Vous croyez qu'il va se suicider en fracassant l'avion contre la mer et que c'est pour ça qu'il est au bord des larmes ? risqua à demander Robocop.
— Je n'espère pas, je ne maîtrise pas encore totalement mon corps de motoculteur, tant pour piloter que pour me battre, regretta Dredd.
— Au pire, OXI-6 lui sautera dessus pour le maîtriser ! rassura joyeusement Cordon de plage.
— C'est vrai que j'en suis capable, assura son petit frère, trop content d'être sur le devant de la scène pour changer. Vous n'aurez qu'à faire diversion pendant que moi, je me place caché derrière vous. Et au moment où il ne s'y attendra pas, BAM, je bondis par dessus vous et je l'attaque au visage, façon facehugger, le huitième passager, tout ça.


   L'entrain d'OXI-6 avait attiré l'attention de Scott qui s'orienta vers eux à nouveau. Il leur offrit un sourire indescriptible, ou presque car une description peut toujours se tenter : banane aux épinards. Les zygomatiques donnaient une forme d'une banane contente, mais dont la bouche – de Scott, pas de la banane, une banane n'a pas de bouche, duuuh – aurait été remplie d'épinards pas frais. Un sourire qui précédait un beau vomi, en somme. L'effet n'était pas voulu, car Scott ne souhaitait plus de mal à ses passagers. Il avait si peu l'habitude d'être chaleureux que la situation en devenait gênante. Inévitablement, les globetrotteurs craignirent pour leur vie.

— Oh merde, il va passer à l'action !
— Tous en formation, les gars ! OXI-6, tu sais quoi faire !
Roger.
— Pour le futur ! s'époumona artificiellement Judge Dredd.


   Cyclope fut surprit par le cri d'encouragement du juge de ville, si bien qu'il en sursauta. Il les entendait parler entre eux tout bas depuis plusieurs minutes, mais pas assez fort pour que ses oreilles encore 100% d'origine captât leurs dires. Loin de les blâmer parce qu'ils l'écartaient de leur groupe, il avait entreprit de détendre l'atmosphère – ou plutôt : la tropopause, puisqu'ils étaient dedans. Ainsi donc, il leur avait souri. Revigoré par le fait d'avoir partagé des sentiments, il surveilla les instruments de bord avec une humeur qu'il connaissait rarement, surtout depuis que Jean Grey avait fui l'école. Alors quand le juge prononça son braillement, Scott l'accompagna quelques secondes plus tard :

— POUR LE FUTUR ! Vous allez leur montrer qui sont les patrons ! Je crois en vous, les mecs !


   Sur ce, il appuya sur un bouton et une chanson emplit la cabine : A real hero, de College et Electric Youth. Peu de personnes avaient vu cette facette de Scott Summers ; Robocop, Judge Dredd, OXI-6 et Cordon de plage furent surpris à leur tout. Bientôt, une fois qu'ils comprirent que leur pilote ne se montrait pas hostile, ils s'en voulurent d'avoir pensé à mal de lui et d'avoir manqué de le brutaliser.


   Ils volaient au-dessus de l'Atlantique. La musique synthwave les accompagnaient, à la fois mélancolique et entraînante. L'escouade fut galvanisée pour le combat à venir.

Deadpool vs. les transpalettes fous vs. Robocop et Judge DreddOù les histoires vivent. Découvrez maintenant